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L'Ordre Infirmier voulu par les gouvernements des présidents Chirac et Sarkozy et rejeté par la profession s'enfonce dans la crise et le discrédit


Une naissance orchestrée par les milieux politiques les plus conservateurs
Démesure et incompétence
Rejet massif de l'ordre par la profession
Sauvetages par le pouvoir politique
Fuite en avant vers l'autoritarisme et la répression
Une dissolution faussement soutenue par les pseudo opposants syndicaux
Derniers rebondissements (2015)

Une naissance orchestrée par les milieux politiques les plus conservateurs

La droite chiraquienne puis sarkozyste, avec Xavier Bertrand à la manoeuvre dans les deux cas, a créé un Ordre Infirmier (OI) fin 2006 qui s’est mis en place en 2009. Le prétexte en a été le lobbying des syndicats des infirmiers libéraux qui ont organisé une campagne de concertation en trompe l’oeil en 2005 et le gouvernement a estimé qu’il tenait là l’occasion de légiférer et de discipliner via l’OI une profession exploitée et traditionnellement revendicatrice, en particulier dans le secteur hospitalier.

Il s’agit d’une profession où le travail est souvent très dur, où on ne compte pas ses heures et où les salaires ne suivent plus depuis longtemps. La profession est féminisée à 80% et est en manque chronique de personnel depuis de nombreuses années du fait notamment que de nombreux infirmiers et infirmières abandonnent la profession au bout de quelques années à cause du stress, de mauvaises conditions de travail et de la non reconnaissance financière de leur qualification. Les besoins en matière de soutien professionnel et social, de conditions de travail et de gestion du stress et en terme de reconnaissance des qualifications et de salaires sont une priorité pour toute la profession.

Mais dans une époque de régression économique, sociale et culturelle il n'est plus possible pour les pouvoirs publics de tolérer la création d'un organisme de représentation d'une profession qui seraient susceptible de porter et de donner de la légitimité à ce type de revendications. Dans ce contexte historique, la réforme, portée par une droite réactionnaire, sans réelle concertation, ne pouvait que mettre rapidement l’Ordre Infirmier en porte à faux avec la profession. Il aurait fallut pour donner une véritable légitimité à l'Ordre Infirmier pouvoir le créer dans le cadre de l'organisation d'Etats généraux de la profession, ce qui n'est tout simplement pas envisageable dans le contexte d'austérité financière et de répression des revendications sociales des professions de santé. Tout ceci explique que l'OI ait été, dès sa création, contrôlé par des bureaucrates sans représentativité et coupés de la profession et qu'ils se soit organisé très vite en opposition à la profession au lieu d'être à son service.

Du fait d’un black-out assez systématique dans les médias traditionnels sur la crise et le discrédit qui accompagne l’Ordre depuis 2009, peu de personnes en dehors des professions de santé sont correctement informées de la situation depuis cette date. On trouve cependant des informations intéressantes sur certains sites alternatifs, syndicaux et dans des médias infirmiers spécialisés que nous avons utilisés pour construire cet article.

Démesure et incompétence

La cotisation obligatoire et hors de prix de 75 euros imposée d’entrée de jeu par l’OI, contrairement à tous les engagements pris, alors que celui-ci devait d’abord prouver son utilité et son indépendance, a mis le feu au poudre dès 2009. Une révolte générale s’est alors organisée à partir de la base infirmière contre un ordre qui commençait par se remplir les poches de façon indécente en ponctionnant les salaires des infirmiers.

Le SNPI, un important syndicat infirmier, pourtant plutôt favorable à la création d'un Ordre, au moins sur le principe, montrait dans un article de synthèse de mars 2011 à quel point l'Ordre s'était rapidement et profondément décrédibilisé. Un des intertitres donnait le ton, "Un Ordre des infirmiers sourd, aveugle et muet", le SNPI notait que "Nos différentes enquêtes auprès de nos cotisants sont très révélatrices de ce divorce entre les professionnelles et le Bureau National de l’ONI." La cotisation à 75€ était jugée inacceptable, d'autant qu'elle revenait sur tous les engagements annoncés. A cela s'ajoutait une arrogance incompréhensible, l'OI refusant toutes les offres de médiation sur cette question.

Montrant combien l'Ordre se désintéressait de la vie sociale et professionnelle des infirmiers, le SNPI rappelait son absence d’implication sur tous les sujets de société concernant les infirmiers dans la période récente, ainsi "de son silence sur la remise en cause de la pénibilité", et de son inconsistance sur la réforme des études supérieures, la LMD (Réforme Licence-Master-Doctorat) qui comporte des enjeux majeurs pour la grille des qualifications et des rémunérations. L’OI a aussi été inaudible lors de la réquisition des infirmiers ayant accompagnée la calamiteuse campagne de vaccination contre la grippe H1N1 et totalement absent lors du mouvement IADE, un mouvement social très important et très dur des infirmiers anesthésistes en 2010.

Le SNPI faisait ensuite le bilan de la situation financière catastrophique de l'OI avec un budget pharaonique qui ne pouvait que conduire au dépôt de bilan, compte tenu du boycott des adhésions. Les ressources en personnel de l’OI étaient à la fois surdimensionnées et très mal utilisées, avec des recrutements hâtifs et incohérents : "l’ONI embauche à tout va, sans considération pour les risques personnels que prennent ces 140 salariés, embauchés à plein temps, sans que la charge de travail constatée le justifie, et surtout sans en avoir les moyens. Une telle inconscience collective, pour une structure chargée de montrer le degré de maturité de notre profession, est aussi choquante qu’inadmissible."

Rejet massif de l'ordre par la profession

Vers mars 2011, on estimait que seulement 10% des infirmiers avaient adhérés, alors même qu’on recensait, en France métropolitaine, début 2010, 515 754 infirmiers (sans compter les territoires d'Outremer). Cela donnait une idée du rejet de l’OI, du désastre financier qui s’annonçait et de l’irresponsabilité de ses dirigeants. La catastrophe ne s’est d’ailleurs pas faite attendre et en août 2011, Rue89, mettait en ligne "L'Etat sauve l'Ordre des infirmiers de la déroute financière". L’article annonçait l’accord obtenu avec la Bred pour sauver l’OI après sa cessation de paiement. Rappelant les données financières, l’article indiquait que "Faisant fi de cette impopularité, l'Ordre, qui s'est lancé en 2009 avec un budget faramineux de 38 millions d'euros annuels, a mis en place un mastodonte administratif, avec des antennes régionales et départementales, des cadres à Paris payés 7000 euros bruts... ". Malgré une cotisation ramenée à 30 euros en mars 2011 pour les salariés (les infirmiers privés continuant à payer 75€), les adhésions stagnaient toujours désespérément lors de la cessation de paiement.

Sauvetages par le pouvoir politique

A l'annonce de la faillite imminente, et suite à la démission de la présidente de l’OI, le ministre est intervenu directement auprès de la BRED. Selon Rue89 : "Le 21 juillet, Xavier Bertrand écrit directement à François Pérol, le président du directoire des Banques populaires - Caisse d'Epargne, maison mère de la Bred." Autrement dit, il lui a demandé de sauver l'OI malgré une situation financière désespérée. François Pérol est un proche de Sarkozy qui, avant de prendre la tête de la BPCE, en mars 2009, a été le secrétaire général adjoint de la présidence de la République. Un poste à partir duquel il a préparé la fusion des Caisses d'épargne et des Banques populaires, qui ont donné naissance à la BPCE. Tout cela donne une idée de la politisation atteinte par le dossier de l'OI.

Selon l’intersyndicale Résilience, qui milite contre l’OI, la dette bancaire de l’OI après restructuration serait de l’ordre de 12 millions d’euros, ce qui est énorme. Dans le cadre du redressement judiciaire faisant suite à la cessation de paiement de juillet 2011, le Tribunal de Grande instance de Paris a prononcé le lundi 12 décembre 2011 l’homologation de l'accord amiable signé par le Conseil national de l'ordre des infirmiers avec ses partenaires financiers. L’ordre ne doit conserver que 42 emplois équivalent temps plein (ceux-ci avaient culminé à 150 ETP).

L’OI aurait clôturé 2011 avec un peu plus de 80 000 adhérents à jour de cotisations, l’activité de l’OI semblant se réduire progressivement ces derniers mois au seul recouvrement des cotisations. L’équilibre financier de fonctionnement courant se situerait selon les sources entre 90 000 et 110 000 adhérents (en supposant qu’ils soient essentiellement constitués de libéraux cotisant à 75€). ActuSoins  indique que "Pour l'institution, l'objectif est atteignable, mais doit s'accompagner d'une stratégie efficace, mêlant communication et judiciarisation." Autrement dit des poursuites contre les infirmiers refusant de payer leur cotisation ! ActuSoins, citant l'OI, indiquait que celui-ci se prépare à la confrontation ouverte : "A ce jour, les relances ont privilégié une approche de communication à une approche contentieuse, bien que le droit y autorise l’Ordre. Cette deuxième approche, inévitable, sera cependant mise en œuvre ultérieurement."" Dans un article de janvier 2012, « Ordre infirmier : les relances s’intensifient » ActuSoins évoque la mise en place de cette « première approche », avec la « lettre simple qu’ont reçu en guise de vœux les infirmiers inscrits au tableau ordinal, mais qui ne se sont pas acquitté de leur cotisation 2011. Un “dernier rappel avant procédure de recouvrement” qui interroge, inquiète ou irrite sur de nombreux forums professionnels. » L’OI aura toutefois beaucoup de mal à se lancer dans une approche contentieuse, en tout cas pour les cotisations, car des poursuites pour recouvrement des cotisations seraient absolument ruineuses pour l’Ordre et même pas certaines d’être couronnées de succès. L’OI ne pourra guère aller au-delà de l’intimidation par ce moyen.

Le nouveau président de l’OI a présenté récemment la situation de l’OI dans des propos décourageants rapportés par ActuSoins, « En novembre, face au comité d’entreprise de l'organisme inquiet de la situation des salariés, Didier Borniche, président de l’Ordre le reconnaissait lui-même : "L'Ordre se trouve dans une situation dont il n'a pas les clefs et dans laquelle beaucoup de choses lui ont été imposées par les banques" » On peut imaginer l’état de désarroi moral des salariés de l'OI après une interminable et féroce vague de licenciements de plus des 2/3 des effectifs devant les perspectives qui leurs sont proposées.

Fuite en avant vers l'autoritarisme et la répression

Selon le rédacteur en chef d'ActuSoins interviewé par Rue89, "L'Ordre s'est aliéné un nombre incroyable d'infirmiers, y compris ceux qui y étaient favorables au départ. Et son budget de survie ne lui permettra même pas de prouver son utilité. Le déficit de confiance est phénoménal. " Ainsi, au lieu de se recentrer sur ses missions de service public et de prouver son utilité sociale, l'OI poursuit sa course suicidaire en avant vers le tout répressif. Il est vrai qu'avec les mauvaises fées qui se sont penchées sur son berceau, compte tenu des objectifs fixées par les banques et acceptés par les dirigeants de l’OI pour éviter la faillite et avec des dirigeants complètement discrédités, aucune autre issue n'était vraiment envisageable.

Dans l'éventail des mesures d'intimidation de la profession que peaufine l'OI, et qui sont plus sérieuses que les poursuites des cotisations non payées, celui-ci compte d'abord cibler les infirmiers libéraux, de très loin les plus nombreux a être inscrits et dont 30% n'ont pas encore adhérés et qui sont la cible financièrement la plus intéressante pour l'OI, du fait de la cotisation maintenue pour eux à 75€. ActuSoins, précise que l’OI pense pouvoir les intimider efficacement car, "La menace de déconventionnement par les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) reste … un moyen de contrainte particulièrement efficace." Pour les infirmiers salariés les perspectives sont plus limitées, mais l'OI tente diverses mesures d'intimidation via les établissements de santé, en tentant de rendre l'adhésion obligatoire à l'embauche, avec des résultats très contrastés et pour l'instant peu concluants.

Le discrédit de l'OI a réussi le prodige de placer progressivement la quasi totalité des syndicats en opposition déclarée avec lui, ce qui était loin d’être le cas à l’origine. Le taux de syndicalisation de la profession stagne autour de 5 %, trois fois moins que dans le reste de la fonction publique et les syndicats sont très divisés entre les syndicats généralistes fonctionnant par branche d’activité et les syndicats "spécialistes" représentant uniquement les infirmiers, ainsi qu’entre syndicats de salariés et syndicats de libéraux. Il est pourtant devenu très difficile pour les syndicats, même les plus complaisants, après l’affaire de la cotisation, le naufrage financier, l’absence de toute réalisation concrète tant soit peu utile aux infirmiers, de soutenir en plus les tentatives d'intimidations de l'OI à l'égard des innombrables infirmiers réfractaires qui risquent l'interdiction professionnelle pure et simple. A l'heure actuelle, selon Actusoins, "A l'exception du Syndicat National des Infirmières et infirmières Libéraux (Sniil), les syndicats de libéraux historiquement favorables à l'Ordre comme la FNI ou l'ONSIL font désormais partie de ses pourfendeurs les plus zélés et appellent clairement leurs adhérents à la "désobéissance civile"." Autrement dit, dans un paysage syndical très varié et éclaté, l'OI ne bénéficie plus que du soutien d'un seul syndicat de libéraux, tous les syndicats salariés lui étant déjà hostiles !

L'OI est désormais totalement dépendant de la droite sarkozyste. Illustrant l’énormité des interventions politiques, rappelons que c'est le ministre de la santé, Xavier Bertrand qui a d’abord imposé la révision des cotisations à 30€ pour les salariés pour calmer le jeu, puis a supervisé l’intervention bancaire pour éviter un naufrage financier que tout le monde pensait inévitable et enfin a décidé le 23 novembre 2011 de prolonger par décret de deux ans le mandat des élus ordinaux pour éviter l'organisation d'élections "compte tenu des difficultés matérielles et financières auxquelles l’ordre est confronté". Cette dernière manoeuvre retire au dirigeants de l'OI le peu de légitimité qui leur restait. Elle fragilise encore plus l'OI, notamment d'un point de vue juridique. 

Une dissolution faussement soutenue par de pseudo opposants syndicaux

La dissolution, qui serait la seule mesure salutaire, et la seule qu'attentent les infirmiers, est pour l'instant repoussée par les dirigeants de l'Ordre qui s'accrochent désespérément à l'épave de leur organisation avec le soutien actif de la droite sarkozyste. Les dirigeants espèrent probablement que si Sarkozy est reconduit aux affaires en 2012, des décrets d'application de la loi de 2006 permettront dans le cadre de diverses mesures ouvertement antisociales de mâter rapidement les infirmiers récalcitrants en multipliant les pressions économiques et disciplinaires à leur encontre.

C’est la seule solution pour sortir de l'impasse, l'OI étranglé financièrement par son plan de restructuration ne pouvant plus réellement remplir ses missions de service public, ni même tenir ses élections, alors que les dirigeants sont discrédités. Il est d'ailleurs très étonnant, mais aussi très significatif, que les syndicats n'aient pas attaqué devant le Conseil d'Etat le décret de prolongation des mandats des membres de l'Ordre.

Pour l’instant, le ministère de la santé a annoncé début janvier 2012 qu’il ne prendrait pas le décret concernant l'inscription automatique à l'Ordre national des infirmiers qu’espérait l’OI pour augmenter ses troupes et sortir de l'impasse financière. Personne ne se fait toutefois d’illusion et la mesure est seulement reportée pour éviter un affrontement ouvert avec les infirmiers avant les élections présidentielles. Un Ordre qui se survivrait à lui-même dans de telles conditions d’assujettissement politique et de discrédit moral représenterait évidemment une menace permanente pour les intérêts professionnels et sociaux des infirmiers salariés ou libéraux, pourtant déjà bien malmenés.

L'OI est un édifice branlant et vermoulu, que le moindre coup de boutoir pourrait mettre à bas. Et pourtant, le fait qu'il soit encore là et se survive à lui-même, malgré les incroyables déboires que nous venons d'évoquer, doit conduire à se demander comment cela est possible. L’interventionnisme politique de la droite a certes joué son rôle, comme nous venons de le voir, mais cette survie tient avant tout à la complaisance syndicale, dont l’opposition est largement factice, et qui cherche avant tout à canaliser le mécontentement infirmier sans lui donner de débouchés efficaces. Les syndicats, tout en s'opposant à l'OI, ne font rien pour lui porter un coup décisif. La collusion des syndicats avec le pouvoir politique, qu'il soit de droite ou de gauche est déterminante. Ici comme ailleurs, les syndicats sont liés par d'innombrables liens d'intérêts au pouvoir et viennent, genoux à terre, prier humblement, et évidemment sans succès, le ministre de la santé ou le président de la République de bien vouloir les débarrasser d'un Ordre qui importune tant les infirmiers. Les syndicats pensent probablement qu'il faut s'armer de patience et que les mêmes génuflexions effectuées devant le président Hollande seront plus efficaces et inaugureront une politique de collaboration avec le gouvernement plus fructueuse que précédemment. L’important est de ne pas laisser les infirmiers l’emporter par la lutte ouverte, mais de leur faire croire que seules les concessions sont efficaces. En outre, le fait que la question de L’Ordre Infirmier ne soit pas médiatisée et que les syndicats évitent soigneusement d’en faire un thème de la campagne électorale à l’approche de la présidentielle illustre la passivité et la collusion des syndicats avec les partis de gouvernement. Le fond du problème, dont l’Ordre Infirmier n’est qu’un exemple, c’est que les syndicats se préparent à capituler devant les féroces mesures d’austérité budgétaire que le prochain gouvernement, de droite ou de gauche, mettra inévitablement en œuvre.

Les infirmiers et infirmières qui ont été isolés et trahis dans leurs luttes sociales précédentes, même les plus déterminées, comme celle des anesthésistes, doivent s'organiser sur leurs lieux de travail, indépendamment des syndicats et en collaboration avec leurs collègues du monde de la santé, afin de préparer les luttes sociales à venir, en fonction des intérêts du monde du travail et non en restant assujettis à une mince élite de permanents syndicaux dont les intérêts épousent désormais étroitement ceux des classes dirigeantes pour discipliner la classe ouvrière au profit du capital financier.

Derniers rebondissements (2015)

Comme nous l'avions prévu, la servilité syndicale devant le pouvoir politique et l'absence de toute revendication forte et organisée avant les élections présidentielles de 2012 ont fait que Hollande n'a eu à prendre aucun engagement politique sur l'Ordre infirmier et une fois élu a pu maintenir en place un Ordre Iinfirmier parfaitement adapté à sa politique qui, comme la précédente, s'inscrit dans le contexte de l'austérité financière et de la répression des revendications sociales des professionnels de santé.

De 2012 à 2015, l'OI a trouvé progressivement de nouveaux points d'appui dans les structures conservatrices du monde infirmier, en l'absence de toute défense sérieuse des intérêts des infirmiers par leurs représentants. A l'occasion de la Loi santé de Marisole Touraine de 2015, un rebondissement inattendu est toutefois intervenu lors de l'examen du projet de loi à l'Assemblée nationale. Annie Le Houérou une députée affiliée au PS a en effet fait adopter l'amendement 517 d'origine parlementaire, devant un auditoire relativement clairsemé. Selon le site infirmiers.com, "Cette parlementaire préside depuis janvier 2013 un groupe de travail interne au groupe socialiste, républicain et citoyen (SRC) de l'Assemblée nationale consacré à l'ordre infirmier, et notamment à la question d'une éventuelle adhésion facultative." Cette "tactique" de Marisole Touraine, face au refus massif et persistant face à l'adhésion à l'Ordre, normalement obligatoire, n'avait été suivie d'aucun projet concret sur l'OI dans la Loi de santé de 2015 et Annie Le Houérou, au vu du constat catastrophique qu'elle a du faire lors de ces travaux parlementaires (non publiés...), a du vouloir forcer la main au gouvernement en proposant la suppression de l'Ordre. C'est une position cohérente, car un ordre doit nécessairement regrouper tout une profession pour être représentatif et l'idée d'une adhésion facultative, pour déminer le sujet, comme avait fait semblant de le proposer Touraine, n'avait guère de sens.

Comme d'habitude dans ce genre d'affaires, le véritable historique de l'OI est dissimulé aux citoyens qui ne comprennent rien aux prises de position contradictoires qui font suite au vote de l'amendement, d'autant que les médias font tout pour brouiller les enjeux. L'amnésie organisée accompagne toujours les politiques réactionnaires. Un article de l'Express (le seul consacré par le site à l'affaire), et qui suit au plus près la narration de l'AFP, s'intitule, tenez vous bien, "La suppression de l'Ordre des infirmiers menace-t-elle la sécurité des patients?" Il donne bien le ton écoeurant sur la façon dont l'affaire est traitée dans les médias dominant. L'Express donne quasi exclusivement la parole à une poignée de représentants des sections les plus conservatrices du monde infirmier. Ceux-ci ont publié une tribune que l'Express fait passer par la mise en page et le titrage de son article pour l'expression d'un consensus au sein de la profession infirmière :

"Fustigeant le "mépris" d'une "poignée de députés" à l'encontre de "toute une profession de santé de 618 000 infirmiers" et "l'incohérence des décideurs" politiques, les signataires affirment que la mesure pénalisera aussi les patients, en leur refusant "l'accès à une profession compétente (...) dans des conditions sécurisées et encadrées par une déontologie". 

En réalité, seule une minorité de 20% d'infirmiers adhèrent à l'ordre... et lors des élections des conseils régionaux qui ont eu lieu le 29 janvier 2015, le taux de participation a été de 22 % selon Annie Le Houérou. Autrement dit, seulement 22% des 20% d'infirmiers qui adhèrent à l'OI ont voté !!! Difficile de faire moins représentatif et de donner un meilleur argument en faveur de la dissolution.

Marisole Touraine, égale à elle-même, reprend, de son côté, le discours de droite de Xavier Bertrand pour défendre l'utilité de l'Ordre. Au Sénat la droite, aujourd'hui majoritaire grâce aux efforts inlassables du président Hollande, repoussera surement l'amendement, qui sera ensuite probablement enterré à son retour à l'Assemblée, puisqu'il n'est pas soutenu par le gouvernement.

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Créé le 11/01/12. Dernière modification le 18/04/15.