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VACCINATION OBLIGATOIRE par le BCG SSI Suspension ou Maintien ?
Des défaillances de l’expertise vaccinale... à la nécessité d’une «critique citoyenne »
Par Bernard Guennebaud (mathématicien)



La suppression du BCG monovax et son remplacement par la vaccination intradermique souche danoise 1331 (BCG SSI), aux effets indésirables beaucoup plus fréquents et sérieux [22] qu’avec le monovax par multipuncture, a crée une situation de crise à propos de cette vaccination. L’Académie de médecine l’avait prévue (1) dans son communiqué du 13/12/05 [21] où elle demandait la suspension immédiate de la vaccination généralisée et obligatoire en France comme l’ont déjà fait 7 de nos voisins européens qui n’ont plus aucune politique de vaccination BCG ; les autres, sauf le Portugal, se contentant d’une vaccination très limitée. La France se montre encore hésitante à franchir le pas devant les risques qui lui ont été présentés par l’expertise alors que cette vaccination continue d’être exigée pour l’entrée en collectivité.

Faire accepter une pratique vaccinale, qu’elle soit générale ou limitée, obligatoire ou pas, nécessite une certaine propagande créant un inévitable décalage avec les caractéristiques réelles de la maladie, du vaccin et de la vaccination. Pour tous ceux qui ont à réfléchir sur le problème des vaccinations et de leurs obligations, qu’ils soient médecins, juristes, sociologues, politiques… la question n’est pas de savoir si un tel décalage existe mais de s’interroger sur sa nature, son amplitude et sur ses conséquences possibles.

Quelles furent par exemple les conséquences de la célèbre affirmation lancée fin 1994 pour promouvoir la vaccination hépatite B en France : « L’hépatite B tue en un jour plus que le sida en un an ! ».

Afin de justifier et de faire accepter par la population concernée le maintien d’une vaccination BCG ciblée assez large, il était nécessaire de créer des arguments spécifiques exploitables par l’indispensable propagande devant accompagner sa pratique.

Quels sont ces arguments ? L’étude faite ici apportera des éléments de réponse qui devraient conduire du même coup à s’interroger sur la fiabilité de l’expertise vaccinale et sur la nécessité de s’intéresser aussi aux « critiques citoyennes ». Cette crise du BCG a en effet révélé certaines limites de l’expertise vaccinale, tout particulièrement quand elle fait appel à des données statistiques qu’elle interprète avec une spontanéité naïve au détriment de la méthode et de la rigueur. Les conséquences qu’elle a ainsi pensé pouvoir déduire de façon purement suggestive sont trop graves pour ne pas réagir quand on en a la possibilité. C’est la raison de cette critique citoyenne dont le rédacteur a enseigné la statistique pendant 20 ans dans une université et qui a estimé de son devoir moral de la rédiger et de la faire connaître.

(1)  Au cours de son audition au Sénat (22/02/07) Pierre Bégué, de l’Académie de médecine, décrivait ainsi les raisons du monovax et de sa suppression [6] (voir annexe 8) :

« J’étais externe en 1959, au moment de l’expérimentation du Monovax. Malgré notre entraînement à faire des piqûres, il était difficile de vacciner un nourrisson : le Monovax, malgré ses imperfections et sa qualité inférieure à celle de l’intradermique, a permis d’appliquer la loi aux nourrissons. Il n’est donc pas venu pour rien ; il n’est pas une fantaisie de l’industrie.

Inversement, malgré une AMM renouvelée régulièrement depuis les années 1970, les dossiers européens de Monovax se sont révélés insuffisants, et le laboratoire a reculé devant le prix effarant pour les refaire. Le Monovax a donc été arrêté.

Si nous avons pu maintenir, en France, la vaccination obligatoire, c’est parce que nous avions la bague. Les pédiatres ont donc dû faire face à des réclamations justifiées…pédiatres que je défends ici, l’étant moi-même. »



Sommaire

L’expérience suédoise à l’audition :

DES CONTRADICTIONS AVÉRÉES

Arrêt total de la vaccination ? Non !

Le statut vaccinal des malades enregistrés est-il connu ? Oui !

Ce nombre a-t-il été communiqué ? Non !

La Suède aurait plus de tuberculose aujourd’hui qu’en 1969 !

La BCGite disséminée : un épiphénomène ?

Le cas de l’Allemagne

Le plus probable est « oublié »

UNE MÉTHODOLOGIE SIMPLISTE

Des impératifs de l'analyse statistique

La suggestion plutôt que l’analyse statistique

Des partitions statistiques non réévaluées et contestables

Des comparaisons statistiques à la proportionnelle

Des estimations sur des nombres beaucoup trop faibles

Une très grande dispersion aléatoire

Meta-analyse

DES QUESTIONS INCONTOURNABLES page11

Des valeurs non comparables ?

La très grande difficulté du diagnostic de la tuberculose pédiatrique

Les révélations des tests in vitro

Les difficultés de la déclaration

Les effets d’une barrière statistique à 4 ans 

Un taux de 1 pour 100 000, est-ce vraisemblable ?

BCG à la naissance : pas si efficace 

Pas le même vaccin

L’effet mobilisateur de la suppression du BCG

L'exemple de l'Italie 

L’ÉTRANGE AVIS DU COMITÉ D’ÉTHIQUE (CCNE)

La tuberculose, maladie contagieuse. Pas toujours !

Allusion à « l’expérience suédoise »

Dépistage en milieu scolaire ou dans les familles ?

1974 : PLAN TUBERCULOSE ET SUPPRESSION  DU BCG SONT ENVISAGÉS !

CONCLUSION

Le BCG appartient à notre histoire nationale

L’espoir

RÉFÉRENCES

ANNEXES



Une critique citoyenne de l’expertise récente sur le BCG. Pourquoi, comment ?

Les affirmations présentées au cours de l’audition publique sur la levée de l’obligation du BCG des 13 et 14 novembre 2006 ont eut une très grande importance puisqu’elles ont largement contribué à conditionner les recommandations formulées tant par la commission d’audition (rapport du 13 décembre 2006) que par les comités d’experts (Comité technique des vaccinations et Conseil supérieur d’hygiène publique de France - CTV et CSHPF) dans leur avis du 9 mars 2007 [14]. Certaines de ces affirmations sont en contradiction avérée avec celles de la littérature, en particulier celles de l’OMS, ou s’appuient sur une méthodologie simpliste ou éludent des interrogations pourtant incontournables.

C’est ce que va faire apparaître cette « critique citoyenne », c’est à dire uniquement guidée par la rigueur de l’argumentation, l’intérêt de la citée et de ses habitants. Une telle critique sur un sujet en apparence strictement médical est-elle possible par des non médicaux ? Cette étude répondra à la question pour celui qui se donnera la peine de la lire et de l’étudier. L’expertise médicale s’appuie très souvent sur des données statistiques mais le traitement correct de ces données repose sur des méthodes reposant sur le calcul des probabilités qui n’est pas une spécialité médicale. De plus, les contradictions internes à l’expertise française et les contradictions de celle-ci avec l’expertise étrangère et mondiale, comme celle de l’OMS, peuvent être repérées et soulignées en confrontant les unes aux autres sans qu’il soit nécessaire d’appartenir au monde médical.


L’expérience suédoise

L’expérience suédoise d’arrêt de la vaccination généralisée par le BCG en Suède en avril 1975 a considérablement influencé l’expertise française dans ses recommandations puisqu’elles y font explicitement allusion. Son interprétation pèse donc très lourdement sur notre politique vaccinale immédiate et future. Cette expérience a été étudiée par Romanus qui a fait de nombreuses publications à ce sujet. Toute l’expertise nationale sur cette question s’appuie sur ses publications. La majeure partie des critiques formulées dans cette étude se rapportent à l’analyse qui a été faite de cette expérience.

Selon Romanus, pendant la période de 6 ans et 3 mois entre 1969 et mars 1975 il y eut en Suède 700 000 naissances d’enfants suivis jusqu’à l’âge de 4 ans ; seuls 7 cas de tuberculose ont été rapportés parmi eux, soit un taux très bas de 1 pour 100 000. Au cours de la période suivante de 6 ans moins 3 mois s’étendant jusqu’à fin 1980, il y eut 555 000 naissances et 45 cas de tuberculose ont été rapportés sur ces enfants également suivis jusqu’à 4 ans, soit un taux de 8,1 alors que le BCG a été très largement interrompu pendant cette période.

Ces données paraissent donc, a priori, en faveur d’une action protectrice très importante du BCG sur les jeunes enfants. Ce sont ces données qui ont puissamment interpellé les participants à l’audition sur le BCG, la commission d’audition et ces 2 rapporteurs, ainsi que les avis du CTV et du CSHPF du 30 septembre 2005 et du 9 mars 2007.

Nous allons voir qu’il existe de nombreuses interrogations à propos de cette expérience et que les conclusions auraient du être beaucoup plus réservées et prudentes comme le laisse clairement entendre ce haut responsable de l’OMS le Dr Léopold Blanc au cours de l’audition au Sénat du 22 février2007 sur le sujet [8] :

« Aucune donnée au niveau international ne permet de dire que la suppression de la vaccination a entraîné une augmentation de la tuberculose dans le monde. Il y a des pays, je voudrais le souligner, qui n'ont jamais vacciné par le BCG, comme les États-Unis, et qui ont les mêmes taux qu'en Europe. Ceci doit être très clair, et des documents extrêmement bien établis à ce sujet ont été publiés par l'OMS. »

Voici comment les données suédoises ont été présentées à l’audition le 13 novembre 2006 par un expert de l’InVS ([4] diapo 16) :

 

Couverture

vaccinale

Période de

naissance

Tous les enfants

Cas      Taux

Enfants  de parents  suédois

 Cas                  Taux

Enfants de parents étrangers

Cas                     Taux

Vaccination

Systématique

01/69 au

03/75

 7            1,0

   5                       0,8

  2                          2,6

Arrêt Total

Vaccination

04/75 au

12/80

 45        8,1 (x8

  19                 3,9 (x5)

 26                    39,4 (x15)

DES CONTRADICTIONS AVÉRÉES
  1. Arrêt total de la vaccination ? Non !

On lit donc sur ce tableau qu’il y eut arrêt total de la vaccination pendant la période d’avril 1975 à décembre 1980. Or cette affirmation est en contradiction avec l’étude publiée par Romanus telle qu’elle est rapportée dans l’expertise collective Inserm de 2004 ([1] p. 255) où on peut lire 2-4% (selon les années sans doute). De plus, page 278, Romanus présente lui-même la courbe des taux de vaccination annuel à partir de 1976 : s’ils sont faibles ils ne sont pas nuls (figure 1). Avec ces données, on peut estimer au minimum à 8000 le nombre d’enfants vaccinés parmi les 555000 (1,5%). C’est suffisant pour qu’il puisse y en avoir parmi les 45. Imaginez que ces 45 enfants aient tous eu le BCG, que pourrait-on en déduire sur son efficacité? Ou même seulement 5, c’est à dire 10%, alors que la proportion de vaccinés est de 2% sur l’ensemble…Ce ne serait pas significatif en raison de la faiblesse des nombres mais n’autoriserait à aucune conclusion.


Il devrait paraître évident que si l’on ignore le nombre d’enfants vaccinés parmi les 45 cas enregistrés, toute conclusion quant à l’efficacité du BCG devient impossible sur cette observation.

Voici les taux de vaccinations publiés par Romanus dans sa communication de 9 pages de l’expertise collective Inserm de novembre 2004 ([1] p. 276) :

 

Remarque : Le rapport de la commission d’audition a reproduit ( [2] p. 22) un tableau semblable à celui publié par l’Inserm avec cependant une différence notable pour la couverture vaccinale à l’âge de 2 ans pour la période 1975-1980 qui est affirmée <2% au lieu de 2-4% alors que les 2 tableaux sont référencés  Romanus 1995. Cet auteur indique bien cette valeur pour cette période, mais pour « la couverture vaccinale au cours de l’année de naissance » ([1] p.275) alors que le rapport de la commission indique explicitement « à l’âge de deux ans ». Ce rapport n’a fait que reproduire l’annexe 2 de l’avis du CTV et du CSHPF du 30/09/05 sur le BCG [11]. Comme il serait assez étonnant que Romanus ait pu publier la même année des valeurs différentes sur ce sujet, il y a sans doute une explication : les enfants étaient suivis pendant 4 ans ; ainsi un enfant né le 31/12/80 était suivi jusqu’au 31/12/84 ; il pouvait être vacciné en 1982, mais sa vaccination ne sera pas comptabilisée par le taux de vaccination de 1980 ; comme ce taux annuel a beaucoup varié à cette époque en Suède cela pourrait expliquer ces différences. Une chose est certaine, ce n’est pas zéro comme affirmé à l’audition. Si le rapport de la commission n’a pas repris cette affirmation visiblement fausse, il a fait sienne les conclusions sans réaliser, semble-t-il, tout comme le CTV, le CSHPF et Romanus, que dans l’ignorance du nombre de vaccinés parmi les malades il est IMPOSSIBLE de conclure.


2- Le statut vaccinal des malades enregistrés est-il connu ? Oui !

Voici ce qu’écrit Romanus ([1] p.278) :

 "En Suède, entre 1975 et 1997, 170 cas de tuberculose ont été rapportés chez des enfants nés dans ce pays; 75 étaient de parents suédois et 95 de parents étrangers (un seul ou les deux); 35 avaient été vaccinés à la naissance ou plus tard (2 Suédois et 33 d'origine étrangère); 2 ont développé une tuberculose dans les deux mois suivant la vaccination. Seize enfants avaient un ou les deux parents provenant de Finlande (3 avaient été vaccinés)."

Il paraît donc clair que les archives suédoises ont enregistré le statut vaccinal des cas notifiés et que Romanus serait en mesure de dire combien il y avait de vaccinés parmi les 45 cas déclarés.

Ce nombre a-t-il été communiqué ? Non !

Nous devons le constater, ce nombre pourtant essentiel pour évaluer la situation, n’est pas communiqué par Romanus qui a pourtant rédigé une communication de 9 pages dans l’expertise collective Inserm. Si la responsabilité première semble lui revenir, les autres experts, et en particulier nos nationaux qui l’ont accueilli en lui offrant une publication ou ont utilisé ses publications (CTV, CSHPF, commission d’audition), avaient pour responsabilité de lui réclamer ce nombre et non de valider une conclusion reposant sur une lacune aussi énorme. Si un mathématicien affirmait que le théorème de Pythagore était valable dans tous les triangles cela n’obligerait nullement les autres à s’aligner sur son affirmation sans le contester. A l’audition l’expertise a préféré « résoudre le problème », si on peut dire, en affirmant qu’il n’y avait aucun vacciné parmi les 550 000 enfants…C’est plus simple, mais malheureusement pour elle il y en eu au moins 8000…


3- La Suède aurait plus de tuberculose aujourd’hui qu’en 1969 !

La comparaison ne s’est pas limitée aux périodes de 6 ans de part et d’autre de 1975 mais aussi entre 1969-1975 d’une part, c’est à dire avant l’interruption de la vaccination généralisée des nourrissons, et aujourd’hui. Ainsi, on peut lire dans le rapport de la commission d'audition  [2] :

« La recommandation systématique de vaccination des enfants tient compte de plusieurs éléments :

 - de l’inquiétude des membres de la Commission d’audition de voir survenir en France un scénario à la suédoise. Ce pays, après avoir arrêté la vaccination puis être passé dans un deuxième temps à une vaccination ciblée sur des critères de risque, n’a toujours pas retrouvé l’incidence d’avant 1975 près de trente ans après l’arrêt de la vaccination »

Autrement dit il y aurait plus de tuberculoses en Suède aujourd’hui qu’avant 1975 ! Il est pourtant bien connu que la tuberculose a connu une régression considérable en Europe de l’Ouest depuis cette époque et cela devrait être suffisant pour conduire à s’interroger avant de publier des affirmations aussi péremptoires dans un tel rapport, sur un sujet aussi sensible et dans de telles conditions. Faut-il rappeler que le taux global de tuberculose en Suède est passé de 19,9 en 1974 à 5 en 2004, la moitié de celui de la France avec un taux de notification pourtant plus élevé. C’est sans doute cela qui conduira, 3 mois plus tard, le CTV et le CSHPF à « corriger » l’affirmations de la commission sur ce point  en limitant sa portée aux tuberculoses de l’enfant. Nous verrons plus loin que même ainsi limitée, cette affirmation soulève plusieurs problèmes.

4- La BCGite disséminée : un épiphénomène ?

On pourrait le croire vu la façon dont le problème a été traité à l’audition et dans le rapport de la commission. C’est un expert de l’InVS et d’Eurosurveillance qui a présenté le problème en Suède, toujours selon les publications de Romanus : ce pays avait observé entre 1979 et 1991 quatre cas de BCGites disséminées pour 100 000 enfants vaccinés à la naissance ; mais, ajouta-t-il, depuis cette époque elle n’en a plus observé aucun. Que comprendre ? Que cette complication gravissime est finalement très rare et qu’il n’y a pas lieu de lui accorder d’importance particulière ; attitude qui sera cavalièrement reprise par le rapport de la commission.

Mais, la Suède ne vaccinant que 15000 enfants par an, il lui faudrait plus de 50 ans de vaccinations pour une seule année en France. Ainsi, les accidents peu fréquents peuvent ne pas se produire tous les ans. Malgré ce risque considérablement atténué pour cette raison, la Suède a accordé beaucoup d’importance à ce problème qui l’a conduite à modifier de façon très significative sa stratégie vaccinale comme l’atteste cette recommandation prise en septembre 1993 et rapportée par Romanus ([1] p. 274) :

"Il est recommandé de reporter la vaccination sélective des groupes à risque à l’âge de 6 mois pour les enfants nés en Suède afin d’éviter les risques liés à la vaccination d’enfants en immunodéficience sévère mais n’ayant pas encore développé les symptômes de cette maladie."

Romanus rapporte de plus, dans un article de mars 2006 (annexe 1), que si l’on estime devoir pratiquer cette vaccination plus tôt, une enquête familiale élargie jusqu’aux cousins sera diligentée pour rechercher des causes de décès d’enfants qui pourraient être liés à un déficit congénital.

Même en France des tentatives ont été faites pour prendre ce risque en considération :

A propos des déficits immunitaires aux conséquences redoutables en cas de vaccination BCG, le conseiller médical au service des vaccinations de la mairie de Paris avait fait parvenir le 25/02/1988 une note de service adressée à la DASES (copie transmise à la SFSP):

" il y a intérêt à ne pratiquer le BCG qu'après l'âge de 15 mois (quinze) où l'immunodéficience congénitale a toutes les chances d'être connue."

On pourrait aussi citer l’exemple du Canada qui limite pratiquement le BCG aux nourrissons inuits jugés très exposés et qui estime désormais que « le risque d’infection disséminée par le BCG devrait être considéré lorsqu’on évalue les risques et les avantages », conduisant ainsi le Comité Consultatif des Nations Inuites à recommander « que le BCG ne soit plus offert systématiquement aux nourrissons des communautés des Premières nations et inuites. »

Force est de constater que des pays sérieux comme la Suède et le Canada, après avoir opté pour une vaccination ciblée à la naissance afin de protéger les enfants les plus exposés de la méningite tuberculeuse et après une expérience déjà longue, ont choisi de prendre peut-être un peu plus de risque du côté de la méningite tuberculeuse pour réduire celui de la BCGite disséminée.

Remarque : Cela devrait donner à réfléchir alors que le rapport de la commission d’audition a pratiquement escamoté ce problème qui a pourtant conduit la Suède à infléchir sa politique vaccinale en repoussant l’âge de la vaccination au delà de 6 mois alors que la commission a osé recommander qu’elle soit systématiquement proposée à tous les nourrissons dans le premier mois ! Et ce contrairement à l’avis du CTV et du CSHPF du 30/09/05 et de la circulaire de la DGS du 5/10/05 qui recommandaient de la repousser au delà de 6 mois pour les enfants à faible risque ! Il est d’ailleurs assez curieux de constater que les expertises suédoises provenant du même auteur sont acceptées sans aucune critique quand elles semblent en faveur de l’efficacité du BCG et sont écartées sans plus de discussion quand la nocivité du vaccin contraindrait à amender la politique vaccinale…

Le cas de l’Allemagne ([1] p. 180)

L’Allemagne de l’Ouest a interrompu le BCG en même temps que la Suède, contrairement à l’Allemagne de l’Est. Du 1/06/75 au 30/04/80, « à l’issue d’une surveillance active dans les deux pays » il a été notifié 57 méningites tuberculeuses en RFA chez des non vaccinés pour 2,1 millions d’enfants nés entre 1/06/75 et 31/12/78 alors qu’en RDA il n’y eut aucun cas sur 0,8 millions d’enfants.

Si cette expérience semble bien confirmer l’action du BCG sur cette complication non contagieuse de l’infection tuberculeuse, force est de constater que l'étude citée par l'Inserm n'a pas cherché à comptabiliser les accidents graves liés à un BCG systématiquement pratiqué à la naissance en Allemagne de l'Est (pratiquement 100%). Avec 2,1 millions de vaccinations à l'Ouest, et en appliquant un taux "à la suédoise" de 4 pour 100 000, l'Allemagne de l'Ouest aurait eu 84 BCGites disséminées contre 57 méningites; avec un taux de 3 ce serait encore 63 BCGites disséminées qui surviendraient. Quant à l'Allemagne de l'Est, avec 770 000 vaccinations elle a pu avoir, toujours avec le taux suédois, 31 BCGites disséminées pour éviter au plus une vingtaine de méningites tuberculeuses (selon les données de l’Allemagne de l’Ouest), sans parler de toutes les autres complications. L'expertise de l'Inserm n'a pas cherché à souligner la carence de cette étude, pas plus que le rapport de la commission d’audition qui l’a relatée.

Notons encore que la Suède avait avant 1975 une couverture vaccinale de 90% "pour l’année de naissance" et de 95% "à 2 ans" ([([1] p. 255 et 275) contre pratiquement 100% en Allemagne de l'Est à la naissance et que cela ne se joue pas à la proportionnelle : on peut penser que la Suède évitait de vacciner certains enfants en raison de leur état de santé et donc que beaucoup d'accidents graves ont du se produire parmi ceux que l'Allemagne de l'Est vaccinait sans discernement dès la naisance.

5- Le plus probable est « oublié »

A l’audition publique sur le BCG un expert de l’InVS présentera 2 hypothèses d’efficacité du BCG. L’une, qualifiée de haute (75% d’efficacité sur les tuberculoses pulmonaires de l’enfant) éviterait 800 cas par an chez l’enfant de moins de 15 ans ; l’autre, dite moyenne (efficacité réduite à 50%) éviterait 300 cas. L’expert accordera clairement sa préférence pour la moyenne.

Ces estimations correspondent à ce qui avait été présenté par le même expert dans ([1] p.183-186) en 2004. Haute et moyenne appellent irrésistiblement une hypothèse basse qui ne fut pas mentionnée. Pourtant, 3 ans auparavant, le 16 août 2001 l’InVS publiait un document de 42 pages  où le même expert écrivait ([5] p. 28) :

 « le nombre de cas évités chaque année par le BCG chez l’enfant de moins de 15 ans se situe entre moins d’une dizaine, dans l’hypothèse la plus défavorable au vaccin et à plus de 250 dans l’hypothèse la plus favorable. Cependant les données de la littérature plaident en faveur d’un pouvoir protecteur réel du BCG proche de la première hypothèse ».

Le 22 février 2007, le Dr Léopold Blanc, Coordinateur de la lutte contre la tuberculose à l'Organisation mondiale de la santé, était l’invité du député Jean-Pierre Door et de la sénatrice Marie-Christine Blandin qui avaient organisé une audition sur le sujet au Sénat. Il déclarera [6] :

« pour l'OMS, le BCG est efficace uniquement pour les formes graves de l'enfant »

confirmant ainsi très clairement l’hypothèse basse occultée au cours de l’audition BCG comme dans l’expertise Inserm, hypothèse pratiquement confirmée par l’OMS le 13 avril 2007 ([7] p. 130) :

« Le vaccin Calmette-Guérin actuellement utilisé date de plus de 85 ans et n’assure une protection acceptable que contre les formes disséminées de la maladie chez le nourrisson et une protection minime, dans le meilleur des cas, après l’enfance. »

Autrement dit l’action réelle du BCG se limite pratiquement aux méningites tuberculeuses et aux miliaires chez l’enfant de moins de 15 ans soit environ 16 cas évités par an par une vaccination généralisée. A comparer aux accidents très graves comme les BCGites disséminées et autres complications sérieuses comme les adénites suppurées.

 

II UNE MÉTHODOLOGIE SIMPLISTE

Des impératifs de l'analyse statistique

Toutes les analyses statistiques de terrain sur l'efficacité du BCG sont frappées d'une sorte de "péché originel" car elles supposent une répartition "au hasard" de la vaccination et du risque, ce qui est très loin d'être le cas. L'exemple britannique est typique à ce sujet : la vaccination n'y était pratiquée que tardivement et les enfants à risque étaient généralement contaminés, positifs au test et donc non vaccinés; le groupe des vaccinés était donc aussi celui des enfants à faible risque ([3] exposé de Watson) . Si on avait estimé l'efficacité du BCG dans ces conditions elle aurait été très largement surestimée et sans aucune valeur. Il existe d’ailleurs des études britanniques favorables à une très bonne efficacité du BCG. Elles mériteraient d’être réexaminées par rapport à cet élément.

Dans une expérience de laboratoire les animaux sont, dans un premier temps, tous à l'abri des contaminations et certains sont vaccinés. Puis, après un délai qui a son importance pour permettre au vaccin d'agir, tous sont contaminés de la même façon. En pratique ces conditions essentielles ne sont jamais satisfaites dans les populations humaines et on doit se demander si une situation "à la britannique" n'existerait pas aussi chez nous : des enfants à risque, contaminés avant d'avoir été vaccinés et qui ne le seront donc pas; ceux d’entre eux qui tomberont malades seront alors classés tuberculeux non vaccinés alors que s'ils avaient été vaccinés plus tôt certains auraient quand même fait la maladie. D'où un risque d’une estimation trop avantageuse de l'efficacité du BCG.

Efficacité encore largement améliorée (sur le papier) par le fait que dans beaucoup de nos départements on vaccine nombre d'enfants ayant un risque pratiquement nul  mais auxquels on applique, quand on analyse les données globalement comme le fait notre expertise nationale (comme à l’audition BCG ou dans [1] p. 183…), "le risque moyen" très supérieur à celui auquel ils sont soumis. Ils viennent ainsi statistiquement grossir les rangs de ceux qui ont évité la maladie par le BCG alors qu’ils n’ont pas été contaminés (annexe 11).

Pour éviter cela et avoir une analyse statistique plus juste, il faudrait réaliser des strates homogènes de populations comme le font les instituts de sondage. C’est une condition importante qui ne semble nullement respectée par notre expertise vaccinale. Si les autres conditions sont plus difficiles à satisfaire en populations humaines, elles ont leur importance et leur absence entache dans tous les cas les conclusions. C’est pourquoi il faut toujours se montrer prudent, ce qui n’est pas la caractéristique la plus répandue dans ce domaine.

Sur le plan méthodologique, l’expertise relative au BCG en Suède pêche en particulier sur les points suivants :

1- La suggestion plutôt que l’analyse statistique

Que l’appréciation de l’expérience suédoise par l’expertise vaccinale puisse reposer sur la SEULE variation de la couverture vaccinale de 95% à 2% (voir I §1) sans réaliser, semble-t-il, la nécessité ABSOLUE d’utiliser explicitement le nombre de vaccinés parmi les 45 cas enregistrés, en dit long sur le niveau technique de notre expertise médicale puisque cela fut le fait commun du CTV, du CSHPF, de la commission d’audition et de ses rapporteurs ainsi que de Victoria Romanus qui, malgré son nom très latin, travaille en Suède à l’Institut de surveillance des maladies contagieuses.

Un exemple pédagogique : supposons que pour la seconde période considérée, seuls les 45 malades aient été vaccinés, que comme à Lübeck en 1930 le vaccinateur se soit trompé en prenant dans le réfrigérateur le flacon de bacilles de Koch à la place du vaccin et que l’histoire soit ainsi présentée : d’abord vaccination généralisée à 95% avec 7 cas de tuberculose, puis chute quasi complète de la couverture vaccinale avec 1 vacciné pour 12500 et 45 cas mortels de tuberculose. Que va-t-on conclure quant à l’efficacité du BCG ? Un tel procédé serait purement suggestif, dépourvu de toute valeur mais pourrait quand même conduire des parlementaires à réclamer le rétablissement de la peine de mort pour refus de BCG !

Une méthode plus rigoureuse et moins suggestive demanderait d’utiliser par exemple le test statistique du Khi-2, soit un calcul exigeant 4 nombres : les nombres de vaccinés malades et non malades, de non vaccinés malades et non malades. Le calcul sera impossible si on ignore l’un de ces 4 nombres et, ne pouvant rien dire, on le SAURA ! Tous les étudiants en médecine étudient ce test. Le médecin praticien qui va au chevet des malades n’en a guère l’utilité mais pour les médecins de la santé publique qui analysent des données, c’est indispensable. Ils ne semblent pas maîtriser le problème mais ce sont les bébés et les familles qui en pâtissent.

2- Des partitions statistiques non réévaluées et contestables

Pour toute analyse statistique sur une population il est nécessaire de procéder à une partition de la population en correspondance avec la question que l’on veut étudier. Lorsque la population évolue le découpage doit être réactualisé. La partition utilisée pour étudier la tuberculose pédiatrique suédoise est « enfant né de parents suédois » ou « enfant né de parents étrangers, l’un au moins des deux ». Avant 1975 l’essentiel de l’immigration vers la Suède provenait d’Europe et tout particulièrement du Nord (Finlande, Norvège, Danemark…) ; l’immigration d’origine africaine ou asiatique était presque inexistante (voir annexe 2) ainsi que celle en provenance d’Europe de l’Est.

Ces conditions ont complètement changé et en 2002 l’immigration africaine et asiatique était évaluée à 3,7% (Romanus [9] texte en anglais). Or la tuberculose en Europe du Nord en 1974 ne peut être comparée à celle d’aujourd’hui en Asie du Sud-Est ou en Afrique, même du Nord. C’est pourquoi il n’est guère légitime de comparer la tuberculose chez les enfants nés d’un parent danois ou finlandais en 1974 avec ceux nés en 2002 de parents vietnamiens ou tunisiens, surtout quand ces enfants sont, de plus, nés dans leur pays d’origine. D’ailleurs Romanus l’écrit explicitement : « au cours de la période de 1989 à 2005 la population suédoise a évolué, avec un nombre et une proportion croissants d’immigrants, venant notamment de pays à forte prévalence de tuberculose » ([9] résumé en français).

Quand nos experts affirment qu’il y a plus de tuberculose aujourd’hui chez les enfants nés de parents étrangers qu’en 1974 ils comparent à 30 ans d’intervalle 2 populations totalement différentes. Ce n’est ni très scientifique ni très légitime. On peut d’ailleurs noter que Romanus ne mentionne le problème que pour les enfants nés à l’étranger (voir III 3 ou [1] p. 278) et que l’expertise française n’a pas retenu cette nuance particulièrement importante.

3- Des comparaisons statistiques à la proportionnelle.

Au cours de l’audition les valeurs observées en Suède à diverses époques ont été comparées à la proportionnelle, sans tenir compte des variations aléatoires : 8 fois…15 fois plus de cas… C’est impressionnant ! Mais non,  catégoriquement non ! Cela ne serait applicable qu’aux valeurs théoriques si elles étaient connues : si la moyenne théorique du nombre de piles en 10 jets d’une pièce est de 5, elle sera de 50 pour 100 jets. Par contre, si on peut facilement obtenir 7 piles en 10 jets nous n’en aurons jamais 70 en 100 jets ; la valeur correspondante à 7 est 56. Pour les valeurs observées on doit en effet tenir compte des variations aléatoires possibles : on peut avoir de la chance au cours d’une expérience et de la malchance pour la suivante : si une pièce de 1 euro donne 3 piles en 10 jets et qu’une pièce de 2 euros en a donné 6, va-t-on en déduire que la pièce de 2 euros a 2 fois plus de chances de tomber sur pile que celle de 1 euro alors que ces 2 valeurs sont parfaitement compatibles avec des variations aléatoires par rapport à la moyenne théorique attendue 5 ?

Les comparaisons statistiques sur ces problèmes sont faites par des médecins mais la statistique s’appuie sur le calcul des probabilités qui demanderait plutôt des compétences en mathématiques…On peut dire de la façon la plus formelle que ce procédé très répandue de comparaisons statistiques « à la proportionnelle » est le premier critère qui permet de distinguer celui qui a franchi le premier pas dans la compréhension de l’analyse statistique de données de celui qui en est resté à l’interprétation « spontanée et suggestive » commune, comme cela est malheureusement beaucoup trop fréquent. (annexe 3).

Mais peut-on faire reposer des décisions de santé publique aussi importantes sur des jugements spontanés et purement suggestifs ?

4- Des estimations sur des nombres beaucoup trop faibles

En comparant les 2 périodes 1969-1975 et 1975-1980, Romanus a pensé pouvoir calculer le taux d’efficacité du BCG et il écrit ([9] article en anglais) :

« Les cas observés de tuberculose chez les enfants après 1975 donnent une efficacité protectrice d’environ 85% pour le vaccin utilisé de 1969 à 1974. »

85% pour toutes les formes de tuberculose pédiatrique c’est déjà beaucoup trop sans doute et devrait alerter car en contradiction avec les autres études. Romanus a sans doute calculé (45-7)/45=84,44%. Mais est-ce un calcul acceptable ? Il admet sans preuve que les 37 cas en plus auraient été évités par le BCG dans la période précédente (voir le III). De plus, quand Hernan avait voulu calculer l’action du vaccin hépatite B sur le risque d’apparition d’une SEP il avait disposé de 11 vaccinés ayant eu une SEP et il lui fut beaucoup reproché ce 11 jugé trop faible, à juste titre sans doute, du moins pour une appréciation quantifiée : de faibles variations de cette valeur pourraient entraîner une variation importante du résultat.

Cette statistique de Hernan avait mobilisé en 2004 les experts au plus haut niveau, ceux de l’OMS comme ceux de l’Afssaps, pour aboutir à des communiqués critiquant très sévèrement la portée de l’étude de Hernan et tout particulièrement pour ce motif. On aurait aimé une mobilisation analogue pour limiter la portée des publications de Romanus sur ce point.

Pourquoi le 7 de Romanus serait-il assez grand alors que le 11 de Hernan fut jugé trop faible pour un calcul analogue ?

On pourrait aussi proposer une autre façon (amusante) de mettre en évidence cette sous estimation des données d'avant 1975 en calculant un taux d'efficacité record pour le BCG! Il est possible « d’améliorer » encore cette valeur de 85% en tenant compte du nombre plus faible d’enfants comme l’a fait l’expertise à l’audition : un rapport de 8,1 entre les taux des 2 périodes considérées donne déjà 87,7%. Mais on devrait aussi tenir compte de la réduction importante du risque pour les enfants nés après 1975, ce qui donnerait une efficacité de 92% ! (Voir annexe 4 )

Mais trop, c'est trop ! Et cela semble bien surtout démontrer que les données d'avant 1975 n'ont pas été obtenues dans les mêmes conditions de fiabilité et de zèle qu'ensuite, voire de définition des cas, le diagnostic de la tuberculose pédiatrique étant très problématique  et pouvant donc conduire à d'importantes variations de la définition et de son application sur le terrain.

Une très grande dispersion aléatoire

Il existe un autre aspect du problème, également lié aux nombres trop faibles utilisés : si on veut estimer la probabilité pour une pièce équilibrée de tomber sur pile en la lançant seulement 10 fois on a un risque supérieur à 34% d’annoncer une valeur ne dépassant pas 30% ou au moins égale à 70%, ce qui ne serait guère satisfaisant. Si on ne peut lancer la pièce que 10 fois il faut s’abstenir de prétendre évaluer ainsi cette probabilité.

Par rapport à cette expérience avec une pièce, le calcul du taux d’efficacité du BCG à partir de données observées est considérablement aggravé par la division que l’on doit effectuer. Cette opération introduit en effet un phénomène important de dispersion aléatoire du résultat pour la très simple raison mathématique suivante : si les fluctuations du hasard donnent un numérateur particulièrement fort et un dénominateur particulièrement faible on obtiendra un rapport très grand ou inversement si c’est le numérateur qui est faible et le dénominateur qui est grand. Il est possible d’étudier le phénomène par des calculs de probabilités et des simulations aléatoires sur machine (annexe 5).

Dans les conditions exposées dans l’annexe, conditions qui peuvent correspondre aux valeurs suédoises pour les enfants nés de parents suédois, et en acceptant une efficacité théorique de 50% pour le BCG, les fluctuations aléatoires amplifiées par la division peuvent conduire à annoncer 21 fois sur 100 des valeurs d’efficacité inférieures à 30%, 15 fois sur 100 supérieures à 70% et pouvant aller au delà de 85% ou en dessous de 5%…avec un BCG efficace à 50%.

Ce phénomène mathématique pourrait à lui seul expliquer les résultats très discordants obtenus pour l’estimation de ce fameux taux d’efficacité du BCG, même si d’autres éléments peuvent aussi intervenir. Mais celui-là ne semble pas avoir été pris en compte par ceux qui ont étudié ce problème.

La conclusion devrait être sans appel : contrairement aux affirmations de Romanus, les valeurs trop faibles observées en Suède n’autorisent pas à calculer avec une fiabilité suffisante le taux d’efficacité du BCG. C’est très vraisemblablement une incompétence notoire en statistique et calcul des probabilités qui a pu faire croire à cet expert et à nos experts nationaux qui ont repris son affirmation que le résultat serait suffisamment crédible.

Meta-analyse

Pour tenter d’évaluer l’efficacité du BCG des auteurs ont regroupé plusieurs études dans le but justement d’accroître les données disponibles et de tenter d’améliorer la fiabilité des conclusions, mais avec le risque de combiner des conditions non comparables. Ils nomment ces regroupements meta-analyse et l’audition BCG a fait état de meta-analyses attribuant au BCG une efficacité de 50% voire nettement moins. Par comparaison avec le jet d’une pièce on pourrait dire, avec la signification donnée ici à ce terme, que celui qui lance 100 fois une pièce utilise les résultats d’une meta-analyse par rapport à celui qui ne l’a lancée que 10 fois puisqu’il regroupe 10 séries de 10. S’il annonce 45% de piles alors que celui qui ne l’a lancée que 10 fois annonce 70%, on ne pourra considérer les 2 résultats au même niveau de crédibilité. Pourtant, à l’audition BCG ce distinguo fondamental en statistique - et qui est la base même de la statistique- n’a pas été évoqué et les conclusions suédoises ont été présentées dans le rapport de la commission d’audition comme jouissant de la même crédibilité que celles des meta-analyses, voire plus encore. Il est vrai que les multiples publications de Romanus ont crée un phénomène de bruit particulièrement important.

Mais si celui qui n’a lancé la pièce que 10 fois fait plus de publicité pour son résultat que celui qui a fait l’effort de la lancer 100 fois, faudrait-il pour autant accorder plus d’importance au résultat du premier ? Ce serait la responsabilité de l’expertise de ne pas se laisser influencer aussi aisément.


III - DES QUESTIONS INCONTOURNABLES

Dans cette partie vont être présentées des interrogations aussi fondamentales qu’incontournables suscitées par l’expérience suédoises. Il était de la responsabilité et de la compétence de l’expertise de les soulever. Ce ne fut pas fait. Il n’est pas possible de donner des réponses certaines aux questions présentées ici mais leur accumulation et leur importance soulignent un peu plus encore les carences et les défaillances de l’expertise.


1- Des valeurs non comparables ? La comparaison entre les 2 périodes considérées de part et d’autre de 1975 donne 7 et 45 cas de tuberculose pédiatrique. Mais ces nombres sont-ils comparables, c’est à dire ont-ils été obtenus avec la même définition ? Le test tuberculinique rendu possible après l’arrêt du BCG généralisé offrait une possibilité de définition des cas à la fois plus précoce et plus élargie alors qu’auparavant on pouvait être contraint d’attendre l’apparition de symptômes cliniques. Il serait alors très logique de trouver plus de cas et surtout plus précocement et donc avant la barrière statistique des 4 ans.

2- La très grande difficulté du diagnostic de la tuberculose pédiatrique. Voici ce qu’on peut lire dans un document OMS sur le diagnostic de la tuberculose pulmonaire chez l’enfant ([16] p. 70) :

« Le diagnostic de la TBP (tuberculose pulmonaire NDLR) est ardu chez l’enfant. Si vous pensez le contraire, c’est que vous en diagnostiquez probablement en excès. Il est aussi facile de diagnostiquer à tort que de passer à côté. Il n’existe pas de test irréfutable dans la majorité des cas infantiles. Le diagnostic est donc presque toujours présomptif.Il ne faut pas oublier d’ausculter le cœur faute de quoi il arrive de diagnostiquer par erreur la TBP alors que l’enfant présente une insuffisance cardiaque…Certains système tiennent compte de la réaction au traitement anti-TB. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il faut y avoir recours pour poser le diagnostic ! L’intradermoréaction n’indique pas en elle-même la présence ou l’extension de la maladie. Elle ne signale que l’infection.»

Les révélations des tests in vitro

Au colloque du 14/12/06 sur les tests in vitro à la Pitié-Salpétrière il a été fait mention d’enfants ayant été en contact avec des tuberculeux contagieux. D’abord testés positifs par le Quantiferon un nouveau test a été fait 15 jours plus tard, ce qui serait impossible avec le test tuberculinique. Ils étaient redevenus négatifs. On a ainsi évité de les traiter alors qu’un seul test, tuberculinique ou in vitro, aurait conduit au traitement.

La suppression du BCG généralisé pourrait conduire à prescrire 3 antituberculeux à des enfants contacts de contagieux et à test tuberculinique fortement positif, et donc de les classer statistiquement tuberculeux, sans aucune preuve réelle de la maladie, le test ne dépistant que l’infection. On pourrait ainsi avoir une flambée statistique de tuberculoses pédiatriques qu’on ne manquera pas d’attribuer à la suppression du BCG comme cela a fort bien pu se produire en Suède après 1975.

Les difficultés de la déclaration

Dans un rapport sur la tuberculose de l’enfant en Ile de France en 1997 Bénédicte Decludt fait observer ([12] page 9) que « les traitements de chimioprévention (prophylaxie autour d’un cas) n’étant pas pris en charge à 100% par la sécurité sociale, il est possible que les enfants nécessitant d’une chimioprévention aient été déclarés comme « malades » auprès de la caisse pour pouvoir bénéficier d’une prise en charge. Le médecin conseil a alors remplit une fiche de DO (déclaration obligatoire NDLR). L’insuffisance de prise en charge financière des traitements prophylactiques peut donc créer un problème d’observance du traitement préventif et indirectement une inadéquation des chiffres publiés par rapport à la situation réelle. La DO dans sa forme actuelle n’est donc pas adaptée à la surveillance de la tuberculose de l’enfant et ne permet pas de décrire correctement son épidémiologie. Dans un but de surveillance et d’amélioration des programmes de lutte contre la tuberculose, dépistage, traitement des malades et prévention, il est nécessaire de revoir les critères de déclaration chez l’enfant de moins de 15 ans.

La comparaison des données de la DO en 1992 aux prévisions estimées à partir de l’évolution de la décroissance observée entre 1972 et 1984 a mis en évidence, sous l’hypothèse du maintien de la décroissance, un excès de près de 2000 cas par rapport au nombre de cas prévu. Chez les enfants de moins de 15 ans, l’excès de cas a été estimé à 162 cas par rapport aux 265 cas attendus en 1992. Cet excès de cas pédiatriques peut être le reflet d’une réelle augmentation du nombre de cas, témoin d’une augmentation de la transmission du BK dans la population, ou bien être la conséquence de biais liés au système de surveillance : amélioration du taux de déclaration dans cette tranche d’âge ou un non-respect des critères de déclaration. »

Une enquête menée dans cette étude (page 22) a conduit à estimer la probabilité d’être réellement malade si déclaré comme étant inférieure à 50% pour les enfants de moins de 15 ans à l’époque et là où l’étude à été réalisée.

 

3- Les effets d’une barrière statistique à 4 ans :

Statistiques de la tuberculose en Suède : verticalement et successivement, nombre de cas chez les enfants de 0-4 ans ; chez les 5-14 ans ; nombre total de nouveaux cas et taux global :

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

4

2

0

1

4

6

6

23

16

9

22

12

14

11

14

15

446

493

458

428

407

464

458

569

5,0

5,6

5,2

4,8

4,6

4,6

5,1

7,3


On constate que l’année ayant le moins de cas chez les 0-4 ans (zéro en 2000) est aussi celle où il y en a le plus chez les 5-14 ans (22 cas) comme si une compensation c’était produite au delà de 4 ans, ce qui pourrait laisser supposer des cas dépistés plus tardivement par exemple. Les variations observées ne sont nullement significatives de modifications réelles.

L’année 2005 attire l’attention : l’augmentation importante (23 cas) correspond à un événement accidentel : une jardinière d’enfants arrivée en Suède en 1993 contaminera 32 enfants dans une crèche. Quatre avaient le BCG. Cet accident démontre une faille dans le système de surveillance de la tuberculose et si de telles défaillances occasionnelles peuvent être inévitables elles ne démontrent en rien l’efficacité du BCG ni par voie de conséquence son utilité.

C’est sans doute cet incident qui a permis au CTV et au CSHPF d’écrire dans leur avis du 9 mars 2007 :

« - cette décision (d’arrêt du BCG généralisé) a entraîné une augmentation globale de l'incidence de la tuberculose de l'enfant, notamment, mais pas uniquement, parmi ceux vivant dans un environnement à risque. 

La tuberculose pédiatrique n'est pas revenue à son niveau observé lors de la vaccination généralisée, y

compris chez les enfants ne vivant pas dans un environnement à risque ; »

Pour comparaison voici les données transmises par Romanus ([1] p.278) :

« Incidence de la tuberculose en Suède chez les enfants (âge 0-4 ans) en 2002 :

Nés en Suède : 0,4 pour 100 000 Nés à l’étranger : 19,2 pour 100 000 

Et aussi sur eurosurveillance, mars 2006, toujours par Romanus ([9] résumé en français) :

« L’incidence cumulée de la tuberculose dans les 30 cohortes nées en Suède après 1974 et observées jusqu’à fin 2004 a été estimée à 0,5 cas pour 100 000 personnes par an. »

Nous constatons que si Romanus a fait des efforts pour distinguer des situations bien différentes, l’expertise française n’a pas toujours retenu les données transmises.

 

4- Un taux de 1 pour 100 000, est-ce vraisemblable ?

La France avait en 1998 un taux global de 11,1 et un taux de 5,3 pour les enfants 0-4 ans [13] contre un taux de 1 pour la Suède avant 1975 avec un taux global double à l’époque, les variations de ce taux global pouvant mesurer les variations du risque de contamination. Une différence aussi énorme devrait interpeller et conduire à suspecter cet étonnant taux de tuberculose pédiatrique et à en rechercher une explication satisfaisante car il semble bien que nul part ailleurs on ne soit parvenu à des taux aussi bas de tuberculose pédiatrique que ceux notifiés en Suède avant 1975.

 

5- BCG à la naissance : pas si efficace ?

Une grande insistance se manifeste sur l’utilité du BCG à la naissance pour les nourrissons très exposés. Mais le risque de contamination et les risques importants de cette contamination démontrent seulement qu’il serait utile de pouvoir protéger les enfants exposés dès la naissance mais ne démontre pas que la vaccination les protégera. Cette confusion entre ce qu’on peut souhaiter et ce qu’on peut réaliser fut constamment entretenue. Pourtant :

Union Internationale contre la tuberculose "on a mis une confiance exagérée dans les vaccinations par le BCG qui dans certains contextes ont été efficaces pour la prévention des formes graves de tuberculose de l'enfant mais ne l'ont fait que piètrement dans les autres." (Extrait de "La tuberculose de l’enfant" 2002 INT J TUBERC LUNG DIS [15] )

Documentation OMS sur la TB de l'enfant : "Dans de nombreux pays, on administre le BCG aux nouveaux nés et pourtant on observe des TBP (tuberculoses pulmonaires NDLR) chez l'enfant. ...Le moment de la vaccination est sans doute l'un des problèmes. Là où les enfants sont souvent exposés très tôt il faut les vacciner juste après la naissance. Pourtant le système immunitaire peut être encore trop immature pour pouvoir produire une réaction efficace.

Le BCG est plus efficace sur les enfants d'âge scolaire mais, dans les collectivités où la TB est fréquente, c'est beaucoup trop tard." (Extrait de Diagnostic de la tuberculose pulmonaire chez l’enfant [16] p. 67)

Cette dernière citation montre clairement la distinction qui doit être faite entre l’efficacité immunologique et l’efficacité réelle.

Une étude française confirme la faible efficacité du vaccin :

Le rapport sur la tuberculose pédiatrique en Ile de France en 1997[12] confirme que « La majorité des enfants (85%) (notifiés avec tuberculose) avaient été vaccinés avant l’âge d’un an, comme cela avait été observé dans une étude récente qui montraient que 87% des petits franciliens étaient vaccinés avant cet âge. Les 2 cas de méningite et les 2 cas de miliaire sont survenus chez des enfants âgés de moins de 4 ans. Trois des 4 enfants avaient été vaccinés » ([12] p.25-26).



6- Pas le même vaccin

Jusqu’en 1978 la Suède a utilisé le BCG souche Gothenburg qui était produit en Suède puis au Danemark. Elle a fini par y renoncer pour opter en 1979 pour le SSI souche danoise. Si on admet que les différences observées seraient dues au vaccin utilisé, les mérites en reviendraient alors à la souche Gothenburg qu’on devrait juger comme étant beaucoup plus efficace que les autres. Cette souche n’est plus utilisée et on n’aurait pas le droit d’attribuer aux autres souches et au SSI en particulier, les mérites d’une autre…D’ailleurs Romanus a au moins l’honnêteté de le souligner en attribuant une efficacité « d’environ 85% pour le vaccin utilisé entre 1969 et 1974 ».

Des déclarations récentes ont fait état de la plus grande efficacité des premières souches par rapport aux souches actuelles, incitant à rechercher les gènes responsables de ces différences.

 

7- L’effet mobilisateur de la suppression du BCG

 Il existe bien quelques raisons de penser que la Suède,  en renonçant au BCG généralisé, à réagi comme nous en France actuellement, en se mobilisant contre la maladie : en 1974 son taux global était de 19,9; en 1981 il était descendu à 10,5, ce qui témoigne de l'effort réel accompli en quelques année; il était de 6,1 en 1991 puis de 5 en 1998, 4,7 en 2004 (source OMS ). 

Mais cet effort s'est traduit par plus de cas découverts, soignés et déclarés, ce qui est inévitable et souhaitable. Le premier mérite d’un plan tuberculose efficace dont la France a annoncé vouloir se doter sera de découvrir davantage de cas. Aussi, il n'est ni légitime ni sain de tous les attribuer a priori à la suppression du BCG.

Cette différence importante entre les résultats des études menées en Suède et dans d'autres pays pourrait trouver ainsi son explication : dans les calculs visant à évaluer l'efficacité du BCG en Suède on estime le nombre de cas "évités" par le BCG mais certains d'entre eux pourraient être non pas des cas évités mais des cas non  enregistrés. Et peut-être justement en raison des efforts soutenus consentis par ce pays pour lutter contre la tuberculose, ce qui conduit à améliorer constamment le taux de notification. La France pourrait être bientôt confrontée aux conséquences statistiques de cela et au risque de leur exploitation médiatique.

L'exemple de l'Italie (source OMS- Global tuberculosis control 1981-1998)) : en 1981 l'Italie déclarait un taux global de 5,6 pour 100 000 alors que la France était à 30,4, la Suède à 10,5, la Norvège à 11,2, les Pays Bas à 12,2...Personne n'a considéré que l'Italie était la championne du monde toutes catégories de la lutte contre la TB !!! Personne ne fut dupe de ce que cela signifiait...En1994 le taux annoncé par l'Italie fut de 10,2, ce qui exprimait seulement que ce pays avait fait des efforts pour mieux notifier ses cas...et qu’il en restait encore à faire…Et non pas que l’Italie connaissait une recrudescence considérable de TB avec 2 fois plus de cas qu’en 1981 !



IV - L’ÉTRANGE AVIS DU COMITÉ D’ÉTHIQUE (CCNE)

Cet avis du CCNE du 22 juin 2006 fut élaboré par 3 rapporteurs : une sénatrice, une infirmière et un professeur de pédiatrie d’un grand hôpital parisien ([3] dossier documentaire). Nul doute que c’est ce dernier qui a apporté le support technique aux réflexions éthiques. C’est d’ailleurs ce professeur qui a présenté l’avis du CCNE à l’audition du 14 novembre comme à celle organisée au Sénat le 22 février 2007. Sur 9 recommandations 8 sont consacrées ou font référence explicite au dépistage à la tuberculine qui a été placé au centre des réflexions de ce comité comme l’atteste l’ensemble du texte.

On serait donc en droit de s’attendre à une très bonne connaissance du sujet. Pourtant, le 14 novembre 2006 à l’audition, ce professeur de pédiatrie s’est étonné que les tests post BCG de contrôle ne soit pas fait et il fallut qu’il lui soit fermement expliqué que ces tests ne se pratiquaient plus depuis 2004 et que ce n’était pas sans raisons : ils ne permettent pas d’apprécier l’immunité antituberculeuse ; les revaccinations qu’ils servaient ainsi à justifier sont sans efficacité et ne sont plus pratiquées ni recommandées, suivant en cela les recommandations de l’OMS de 1995 (REH 11/08/95 [20]). Il paru très surpris, mais malgré cette leçon ce professeur déclarera le 22 février 2007 au cours de l’audition au Sénat ([6] p. 73) : 

« chez les enfants vaccinés il est recommandé de faire, dans les 2 à 3 mois qui suivent, un test tuberculinique par voie intradermique ».

Recommandé par qui ? Ce qui est recommandé en France depuis la circulaire du 11 octobre 2004 (annexe 6) signé du Directeur général de la santé William Dab c’est de ne plus le faire afin d’améliorer notre lutte contre la tuberculose :

« L'IDR ne doit plus être utilisée pour mettre en évidence la réaction d'hypersensibilité retardée induite par le BCG.

L’arrêt des activités liées à la revaccination et aux contrôles post-vaccinaux systématiques doit permettre aux équipes de la lutte antituberculeuse de concentrer les efforts en direction de stratégies éprouvées. »

L’avis du CCNE contient même une allusion à une séance de BCG ciblé dans une classe et à l’aspect stigmatisant qui résulterait de la séparation entre les enfants à vacciner et les autres (page 8 §1.3). Une telle séance est tout simplement IMPOSSIBLE et il semble que le principal rédacteur de l’avis l’ignorait ! A l’audition ce professeur présentera de façon très explicite une séance de dépistage ciblé dans une classe où l’on devra donc séparer les enfants à risque élevé, pour la plupart d’origine africaine ou asiatique, de ceux à faible risque qui seront le plus souvent d’origine européenne et française. Insoutenable et inacceptable. Nous en serions d’accord mais ce n’est pas prévu par les recommandations du CTV et du CSHPF du 30/09/05 sur lesquelles le Comité d’éthique était invité à plancher. Si le dépistage ciblé est effectivement prévu il doit se dérouler « dans les familles et les populations à risque », pas dans les écoles, bien évidemment ! Les membres du CTV et du CSHPF sont tout de même assez avisés pour ne pas recommander de telles mesures dans les écoles ! Cela devrait aller sans dire.

La tuberculose, maladie contagieuse. Pas toujours !

En fait la tuberculose n’existe pas…c’est une bonne nouvelle !!! C’est un terme générique désignant de multiples formes dont certaines sont contagieuses, d’autres pas, ou non contagieuses à certains âges (enfants) et pouvant le devenir à l’âge adulte après une phase non contagieuse. Les seules actions reconnues du BCG portent sur des formes non contagieuses de l’enfant, un enfant vacciné et contaminé ayant pratiquement le même risque que s’il n’avait pas été vacciné de faire plus tard une tuberculose pouvant devenir contagieuse. Il n’est donc pas fondé se s’appuyer sur le caractère contagieux de certaines formes de la maladie pour justifier une position sur le BCG alors que celui ci est pratiquement dépourvu d’action contre ces formes.

Il est aujourd’hui parfaitement reconnu par nos comités nationaux d’expertise (CTV, CSHPF) comme par les institutions mondiales (OMS, UICTMR l’Union internationale contre la tuberculose) que le BCG ne protège (au mieux) que le vacciné et n’a aucune action sur la transmission, l’OMS reconnaissant « l’impossibilité pour le BCG de modifier l’incidence de la maladie » ([10] p. 37).

Pourtant, on peut lire dans le compte rendu au Sénat ([6] p.14) :

"Pour ces dernières (les populations à risque), il n’y aurait pas grand choix ; il leur appartiendrait de bien comprendre que l’acceptation de la vaccination dans leur groupe ciblé serait dans leur intérêt, certes, mais aussi dans celui du reste de la population : vaccinons ces populations pour protéger le reste de la population. »

Ces remarques faites au nom du CCNE portaient sur les recommandations de vaccination ciblée du CTV et du CSHPF dans leur avis du 30/09/05. Il est pourtant très explicitement précisé dans cet avis que le BCG «n’intervient en rien sur la chaîne de transmission de la maladie » et que « cette vaccination n’a pas d’efficacité sur la transmission de la maladie entre adultes, qui sont, eux, la source principale de cette transmission ». En conséquence, le CTV et le CSHPF n’ont certainement jamais envisagé de recommander cette vaccination ciblée pour protéger la population non vaccinée. Cette vaccination est proposée uniquement pour tenter de protéger les jeunes enfants des conséquences les plus graves d’une contamination précoce et pratiquement rien de plus. La critique formulée par le CCNE était donc sans objet mais elle a pu contribuer à égarer les esprits.

Allusion à « l’expérience suédoise »

Le professeur représentant le CCNE déclarera au cours de son audition au sénat ([6] p. 14) :

« Des études ont en effet montré que l’arrêt de la vaccination au sein de ces populations (à risque) entraînait non seulement un accroissement d’incidence chez elles, mais également dans le reste de la population. Comment ne pas parler alors de stigmatisation ? ».

De quelles études s’agit-il ? Elles ne sont pas citées mais c’est très vraisemblablement encore une allusion à la fameuse « expérience suédoise » Selon les publications faites par Romanus, il s’en est suivi aussitôt un accroissement important de la tuberculose pédiatrique. Mais cet accroissement, qui a aussi touché les enfants nés de parents suédois, est attribué à la non vaccination de ces jeunes enfants qui pouvaient avoir été contaminés par leur entourage (à cet époque il y avait un taux global supérieur à 20 pour 100 000) mais certainement pas par les enfants nés de parents étrangers et qui n’étaient plus vaccinés : en effet, comme l’accroissement a été immédiat on ne peut incriminer la non vaccination d’enfants plus âgés, d’adolescents ou d’adultes puisque seul le statut vaccinal des jeunes enfants (moins de 6 ans) avait changé. Or ces enfants ne sont pratiquement jamais contagieux à cet âge !

Il n’est donc pas fondé de parler pour cette période 1975-1980 d’un accroissement des contaminations par défaut de vaccination. On peut seulement envisager une moindre résistance aux contaminations courantes de la part des plus jeunes.

L’expérience suédoise et l’étude qui en a été faite ne démontrent nullement ce qu’on a voulu lui faire dire au cours de cette audition au Sénat.

Dépistage en milieu scolaire ou dans les familles ?

L’avis du CCNE fait état d’un courrier du Directeur général de la santé Didier Houssin daté du 11 janvier 2006 et sollicitant l’avis du CCNE sur plusieurs questions concernant une évolution de la politique de lutte contre la tuberculose dont « le dépistage ciblé en milieu scolaire ».

La Halde déclare avoir été saisie par courrier de Didier Houssin du 11 janvier 2006 d’une demande d’avis sur 3 recommandations du CSHPF relatives à l’évolution de la politique de lutte contre la tuberculose ([3] dossiers documentaires).

Il serait douteux que Didier Houssin ait envoyé le même jour sur le même sujet 2 courriers différents. Or, il est possible de faire le double constat suivant :

  1. Il n’existe aucun avis émanant du CSHPF et du CTV recommandant le dépistage ciblé « en milieu scolaire » [14].

  2. L’avis de la Halde, qui a très vraisemblablement été sollicitée sur les mêmes points que le CCNE, parle de ce dépistage ciblé mais ne fait à AUCUN moment une quelconque allusion à un dépistage « en milieu scolaire » comme il est aisé de le vérifier.

Interrogation : qu’elle est l’origine de cette question formulée en page 1 de l’avis du CCNE : « dépistage ciblé en milieu scolaire » ?

Cette procédure étant jugée discriminatoire et inacceptable, nous serions tous d’accord sur ce point, le CCNE préconise alors de l’étendre à tous afin d’en gommer le caractère discriminatoire… Aucun pays d’Europe de l’Ouest n’a conservé cette pratique du test systématique. Le dernier à l’avoir fait, une fois à l’âge de 15 ans, est la communauté française de Belgique qui l’a abandonné en 2002 en raison de son coût, de son peu d’efficacité et du fait que l’OMS ne le recommande pas (annexe 7 : extraits de [17]). Pourtant l’avis du CCNE affirme « qu’un grand nombre de pays qui n’utilisent pas le BCG ou le limitent à certaines personnes ont en revanche une politique de dépistage très active » (page 6). Déjà, en 1974 des experts (Concours médical [18]) jugeaient le dépistage systématique « irréaliste de par son coût et de son peu d’efficacité » alors que le taux de tuberculose était supérieur à 50 [13]. Qu’en penser aujourd’hui alors que ce taux est inférieur à 9 ?

La recommandation 9 du CCNE considère « que la mise en place d’un dépistage généralisé (en particulier en milieu scolaire) représenterait un préalable indispensable à l’abandon de la vaccination généralisée ». Mais quelle serait la valeur de ce dépistage sur des enfants vaccinés quelques années auparavant ? Le CCNE le sait bien puisqu’il écrit (§2.1) « qu’il peut y avoir une confusion entre une intra-dermo réaction positive liée au BCG et une liée à une primo-infection ou à la tuberculose ». On reste confondu par autant d’incohérence. Certes, il ajoute « cette situation pourrait changer si les tests d’immunité cellulaire en cours de validation s’avèrent discriminants » mais ces tests (Quantiferon, Elispot ) qui demandent une prise de sang suivie d’une analyse en laboratoire sont très coûteux (65 euros aux USA pour le Quantiferon) et de ce fait ne seront pas utilisables pour un dépistage généralisé.

La divergence essentielle et constamment soulevée tout au long du compte rendu de l’audition au Sénat entre le CCNE et la Halde repose principalement sur 3 points : l’un se réfère au caractère contagieux de certaines formes de tuberculose pour justifier des positions sur la vaccination BCG qui est pourtant reconnue sans action sur ces formes ; le second suppose une pratique ciblée en milieu scolaire qui n’a bien évidemment pas été prévue ni même envisagée ; le troisième étant une grossière erreur d’analyse et d’interprétation de l’expérience suédoise.

A partir de ces prémisses fausses le CCNE s’est lancé dans des digressions plus pointilleuses que rigoureuses. A ce niveau là de l’expertise et compte tenu des conséquences sociales et politiques liées à ces problèmes de discrimination, c’est assez préoccupant.

V-1974 : PLAN TUBERCULOSE ET SUPPRESSION  DU BCG SONT ENVISAGÉS !

Au cours de l’audition de novembre, une personnalité a rappelé qu’en 1970 on planchait déjà au ministère sur un plan tuberculose. La nécessité d’un tel plan n’est donc pas nouvelle et le Concours médical d’avril 1974 [18] avait consacré un long article au Dr Coudreau alors Directeur du comité national de lutte contre la tuberculose et au Pr Pariente (hôpital Laënnec). A cette époque le taux de tuberculose en France était largement supérieur à 50 (60,3 en 1972, 51,2 en 1974) contre 8,9 en 2005. Les risques de contamination étaient donc beaucoup plus grands qu’aujourd’hui. Pourtant l’abandon du BCG généralisé était déjà très sérieusement envisagé. Voici quelques extraits :

Sur le plan tuberculose

« Tout d’abord tenter de connaître, dans le délai le plus bref, les cracheurs de bacilles ; renforcer ensuite les mesures qui permettent de traiter les malades ; évaluer les populations à haut risque et ensuite utiliser éventuellement le BCG. Ce qui me semble prioritaire, c’est la détection des cracheurs de bacilles et leur traitement. Je situe donc l’importance de la prévention en seconde ligne. »

Parmi les cracheurs de bacilles il y a « ceux qui ignorent qu’ils sont malades, se sentent fatigués mais ne vont pas consulter. Dans quelle mesure pouvons-nous détecter ces tuberculoses ignorées ou négligées ? Les épidémiologiste nous disent que la transmission du bacille est due essentiellement aux malades contagieux non encore diagnostiqués. »

Témoignage entendu à la télé : une infirmière de 40 ans est là car sa fille vient de mourir 5 jours après avoir été diagnostiquée d’une tuberculose transmise par sa mère; cette infirmière dit avoir été contaminée à l’hôpital, qu’elle se sentait très asthéniée, mais se disait qu’il fallait tenir, tenir… Elle n’en a pas parlé aux médecins qu’elle côtoyait tous les jours et qu’elle connaissait bien. Une campagne de santé publique pour apprendre à refuser l’acceptation de la fatigue chronique permettrait d’éviter de tels drames. En principe, le plan tuberculose présenté à l’audition de novembre 2006 le prévoit, mais pourquoi attendre ? Cela pourrait se faire depuis 50 ans.

Sur le BCG

« Quand même le BCG est doué d’une certaine efficacité, …on doit se demander si le jeu en vaut la chandelle…Efficace ou inefficace, l’efficacité du BCG en regard de celle de la chimiothérapie est tellement faible…que la question qui se pose est de savoir si l’on ne gagnerait pas beaucoup en efficacité globale en transférant les sommes dépensées pour la vaccination à la chimiothérapie contrôlée, au besoin à domicile. Cette dernière solution ne serait-elle pas plus rentable ?… Nous sommes dans une situation donnée de législation et de mentalité du public et des médecins ; nous sommes obligés de procéder par étapes ».

Sur le dépistage à la tuberculine

« l’identification des sources de contamination (doit se faire) en dehors du dépistage systématique puisque, nous l’avons vu, il est irréaliste, de par son coût et de son peu d’efficacité, de vouloir s’appuyer sur lui ».



VI- CONCLUSION

Toute décision de vaccination en santé publique doit bien sûr s’appuyer sur une expertise médicale, mais peut-on se fonder uniquement sur elle ? Telle est l’impérieuse question que le décideur doit aussi se poser. L’exemple de la problématique actuelle du BCG dans notre pays illustre bien les limites de l’expertise vaccinale. Ce n’est pas nouveau. Chacun croit que la variole a été vaincue par la seule vaccination généralisée et obligatoire. C’est faux. Après l’échec avéré des grandes campagnes de vaccination ce fut l’action combinée de la recherche active des malades, leur isolement rigoureux, la recherche active des contacts, leur surveillance avec isolement en cas de fièvre, c’est à dire avant qu’ils ne deviennent contagieux, qui fut la véritable clé du succès [19]. Une stratégie analogue pourrait être indispensable pour faire face aux maladies émergentes. Connaître et faire connaître l’exemple de la variole : un enjeu stratégique majeur.

Les normes juridiques prévoient que toute restriction de la liberté individuelle pour raison d’intérêt collectif soit limitée au juste nécessaire et pas au delà. Mais pour rester dans les clous l’expertise médicale s’empresse alors d’exagérer les risques de la maladie, d’enfler les bénéfices de la vaccination et de minimiser ses inconvénients afin de justifier la vaccination généralisée et les contraintes légales tout en paraissant rester dans les normes fixées par le juridique.

L’argument de propagande se fait alors vérité scientifique et des politiques, comme récemment en janvier 2007, s’emparent de ces affirmations pour justifier toutes les contraintes et faire accepter par le Parlement, dans le cadre de la protection de l’enfance, une Loi reconnaissant comme dérive sectaire punie de 6 mois de prison le refus de vaccinations obligatoires…

Tous nos voisins européens sauf le Portugal ont renoncé totalement à la vaccination BCG (7 pays) ou ne la pratiquent que de façon limitée, les USA n’en ont jamais fait usage et ont un taux de 5 contre 9 pour la France. On reste abasourdi que notre représentation nationale ait pu en arriver à classer dérive sectaire le refus de la vaccination par le BCG ! Une telle situation n’est plus acceptable.

Cette affaire du BCG révèle et explicite de profonds et graves problèmes récurrents mais offre en définitive une opportunité d’évolution qu’il est urgent de saisir car, si le BCG reste obligatoire, la rentrée de septembre 2007 s’accompagnera d’exigences de vaccinations qui entraîneront beaucoup de souffrances inutiles pour les enfants et leurs familles et qui coûteront fort cher aux familles et à l’Assurance maladie.

Le BCG appartient à notre histoire nationale. Nous devons regarder cette histoire en face, sa lumière et ses ombres, pour nous en libérer. Les problèmes posés par la tuberculose sont liés aujourd’hui au sida, aux conditions ayant engendré les SDF, à l’immigration venue d’Afrique, d’Asie et d’Europe de l’Est, donc en relation directe avec ces grands problèmes qui ont sifflé la fin de la récréation quand la France pensait encore qu’elle pouvait se payer le luxe de mobiliser des moyens financiers et humains considérables pour tester l’immunité antituberculeuse dans les écoles, ce qu’aucun laboratoire ne sait faire, et revacciner les négatifs alors qu’il était établi depuis fort longtemps que le premier acte n’avait pas cette signification et que le second était inutile. Nous ne pouvons plus nous permettre d’affronter ces grands problèmes avec des arguments issus de la propagande.

L’espoir

Il y a plus d’un siècle un français découvrait que la bile avait le pouvoir d’atténuer la virulence du bacille tuberculeux. Ce fut cette découverte, reprise par Calmette et Guérin, qui conduisit, après 13 ans de patientes cultures, à la création d’un bacille stabilisé dans sa virulence par l’action de la bile. Ce fut le Bacille de Calmette et Guérin, le BCG que la littérature ancienne nommait plus justement Bacille Bilié. On a voulu résoudre le problème de la tuberculose par l’introduction hasardeuse dans les organismes de ce bacille vivant alors que la bile contient de manière certaine des éléments stabilisateurs du bacille virulent. La recherche scientifique tente actuellement de recycler le bacille en y recherchant des éléments qui seraient protecteurs. Il n’y a aucune garantie dans cette direction toujours aussi hasardeuse alors que la bile en offre la certitude : l’existence même du BCG, en tant que bacille et non en tant que vaccin, en constitue la preuve la plus éclatante. La découverte de ce bacille fut donc une très grande découverte alors que son usage en tant que vaccin s’est révélé fort médiocre.

Un autre choix est toujours possible…

 

Références

[1] Tuberculose :  Place de la vaccination dans la maîtrise de la maladie Inserm nov. 2004. Ouvrage de 280 pages, en ligne par chapitre :

http://ist.inserm.fr/basisrapports/tuberculose.html

[2] http://www.sfsp.info/sfsp/index.php

On trouve sur ce site de la Société française de santé publique, en page d’accueil :

le rapport de la commission d'audition http://www.sfsp.info/sfsp/infos/documents/RapportBCGVF.pdf

dossiers thématiques : Audition publique sur la vaccination des enfants par le BCG 

[3] http://www.sfsp.info/sfsp/infos/documents/Dossiersthematiques.htm

Audition publique : interventions participants – dossiers documentaires

[4 ]http://www.sfsp.info/sfsp/agenda/documents/interventionsaudition.htm

L'impact épidémiologique des différentes options de stratégie vaccinal

[5] http://www.invs.sante.fr/publications/rap_bcg_1101/index.html

« Impact épidémiologique d’une modification de la politique de vaccination par le BCG en France » InVS

[6] http://www.assemblee-nationale.fr/12/rap-off/i3791.asp#P1069_183684

[7] http://www.who.int/wer/2007/wer8215.pdf REH du 13/04/07

[8] http://www.assemblee-nationale.fr/12/rap-off/i3791.asp

[9] Eurosurveillance – mars 2006- Romanus - résumé en français :

http://www.eurosurveillance.org/em/v11n03/1103-125.asp

Texte complet (anglais) http://www.eurosurveillance.org/em/v11n03/1103-225.asp

 [10 ] http://www.who.int/wer/2004/wer7904/fr/index.html REH du 23/01/04 Vaccin BCG

[11] Avis CSHPF http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/cshpf/a_mt_300905_vaccinbcg.pdf

[12] http://www.invs.sante.fr/publications/tuberculose2000/index.html

[13] http://www.invs.sante.fr/surveillance/tuberculose/default.htm

[14] CSHPF http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/cshpf/cs231.htm

[15] UICTMR http://www.iuatld.org/upload/ijtld_article/starke_154.pdf

[16]OMS dossier tuberculose http://whqlibdoc.who.int/publications/2005/9241546344_fre.pdf

[17] www.fares.be/documents/prog_depistage_tbc_milieu_scolaire.pdf

[18] Le Concours médical 20/04/74

[19] http://www.infovaccin.fr/l-eradication-de-la-variole.html

[20] REH du 11 août 1995

http://whqlibdoc.who.int/wer/WHO_WER_1995/WER1995_70_229-236%20(N%C2%B032).pdf

[21] http://www.academie-medecine.fr/vaccination/page2005.html

[22] http://www.ssi.dk/sw10376.asp

 

Annexe 1 : BCGite disséminée en Suède [9] :

"During the period from 1979 to 1991, four cases of serious disseminated BCG infection occurred among 101 000 neonatally vaccinated infants. Three of the infants suffered from severe combined immunodeficiency (SCID) and two of them died because of the BCG infection. These incidents were the impetus for the decision to postpone the ‘routine’ vaccination of risk groups to the age of six months or later. By that age, it was considered that any infant with severe combined immune deficiency would have been diagnosed and thus excluded from vaccination. No case of fatal neonatal disseminated BCG infection has been reported since1991."

" However, in cases of overwhelming risk of infection, it is still recommended to give vaccination soon after birth. In these cases, vaccination must be preceded by a careful assessment of family history regarding any occurrence of immune deficiencies or infant deaths in any close family members, in cousins or in siblings to the parents."



Annexe 2 : données statistiques sur la population suédoise [9] :

Population statistics
Population figures are based on data from population statistics, Statistics Sweden. The population of Sweden increased from 8.2 million inhabitants in 1975 to 9.0 million in 2004 and the number of foreign born inhabitants almost doubled
from 550 000 (6.7%) to 1.1 million (12%). The proportion of immigrants from Africa and Asia increased from 0.3% to 3.7%. The annual number of live born infants varied during the same period between 90 000 and 124 000. For cohorts born in Sweden in 1969 or later, population figures related to country of birth and to national origin of the parents were specifically requested from Statistics Sweden for calculations of the incidence figures during the first study periods from 1969 to 1993.

 

Annexe 3 : Statistique "à la proportionnelle", non !

En Suède, au cours des 2 périodes d’observation 1969-1974 et 1975-1980 on a noté 5 et 19 cas de tuberculose chez les enfants de parents suédois. L’accroissement n’est pas forcément si important qu’il y paraît et un statisticien ne dira jamais qu’il est 4 fois plus grand. Pourquoi ? En supposant que le risque soit le même dans les 2 groupes supposés comparables par ailleurs on peut alors cumuler les données, soit 24 cas pour des effectifs doublés, soit 12 cas en valeur attendue estimée pour chaque groupe. On compare alors 5 et 19 à 12 et non pas l’un par rapport à l’autre dans une relation multiplicative. Tous les statisticiens confirmeront ce point car cette méthode permet de gérer le fait qu’on aurait pu avoir de la chance dans une expérience et de la malchance dans l’autre. On peut alors tester ici par une loi de Poisson qui conduit à considérer l’écart comme significatif au seuil 5% mais pas au seuil 1%. L’écart observé est donc important mais pas totalement inexplicable par des variations aléatoires en acceptant une moyenne théorique de 12 cas : on aurait eu de la chance dans le premier groupe (probabilité 2% d’avoir au plus 5 cas) et de la malchance dans l’autre (probabilité 2,1% d’en avoir au moins 19).

 

Annexe 4 : Une efficacité record pour le BCG !

On a notifié en Suède 45 cas pour 555 000 enfants supposés sans BCG contre 7 pour 700 000 avec BCG. En acceptant de corriger à la proportionnelle*, soit 45x700 000/555 000 on obtient 56,76. Il faudrait aussi tenir compte de la réduction du nombre de contagieux : taux de 19,9 en 1974, 17,7 en 1975, 10,5 en 1981, ce qui permet de prendre un taux moyen de 14,6 pour la période 1975-1980. De même, la réduction de la TB ayant été régulière avant 1974 on peut prendre un taux moyen d'au moins 22 sinon 23 pour la période 1969-1974. Si on accepte encore de corriger à la proportionnelle par 22/14,6 on obtient 85,52 cas en données corrigées contre 7. On pourrait alors annoncer une efficacité du BCG sur toutes les formes de tuberculoses pédiatriques de 91,8%!

*Cette correction multiplicative ne serait acceptable que si 45 et 7 étaient proches des valeurs théoriques attendues, donc si on n’avait eu ni chance ni malchance et en supposant l’absence de sous ou sur estimation. Le résultat étant inacceptable on en déduit que l’un au moins de ces 2 nombres est très éloigné de sa valeur attendue. C’est très vraisemblablement le 7.

 

Annexe 5 : Taux d’efficacité du BCG

On peut supposer que dans 2 groupes équivalents, l’un avec BCG et l’autre sans, le nombre de malades observés suivent des lois de Poisson de paramètres différents, attribuant ainsi une certaine efficacité théorique bien définie au BCG. Il devient alors possible de calculer certaines probabilités et de réaliser des expériences aléatoires qui pourraient correspondre à des données observées. Choisissons d’abord 8 et 16 comme valeurs théoriques pour le nombre moyen de malades dans chaque groupe, soit 50% d’efficacité attribuée au BCG. Notons que ces valeurs théoriques sont compatibles avec les observations suédoises sur les enfants nés de parents suédois : il y a 19% de chances pour qu’une moyenne théorique de 8 donne au plus 5 cas et aussi pour qu’une moyenne théorique de 16 en donne au moins 19.

Il y a alors environ 33% de chances d’obtenir un taux d’efficacité entre 40 et 60% ; 15% de chances qu’il soit d’au moins 70% ; 21% de chances d’avoir au plus 30% ; plus de 6% de chances d’obtenir un taux négatif ou nul et 4,3% qu’il dépasse 80%. Une simulation aléatoire sur 300 expériences a donné une fois –75% et une fois 91,7%.

En remplaçant 8 et 16 par 50 et 100, qui assurent encore une efficacité théorique de 50%, on aura 75% de chances de trouver un taux d’efficacité apparent entre 40 et 60% ; 42% de chances qu’il soit entre 46,7 et 56,2% et seulement 0,3% pour dépasser 70% et 2% pour être en dessous de 30% ; 1,15 chances sur un million d’obtenir un taux négatif ou nul contre plus de 6% avec 8 et 16. On mesure ainsi l’importance des valeurs observées qui sont indubitablement trop faibles en Suède pour rendre crédible les calculs sur l’efficacité du BCG.

 

Annexe 6 : circulaire de la Direction générale de la santé (http://www.sante.gouv.fr/)

CIRCULAIRE N°DGS/SD5C/2004/373 du 11 octobre 2004, relative à la pratique de la vaccination par le vaccin antituberculeux BCG, et à la pratique des test tuberculiniques.

Date d’application : immédiate

« Il n'y a donc pas lieu de revacciner une personne ayant eu une première vaccination par le vaccin BCG, même en cas d’IDR négative, en population générale comme en milieu exposé. 

Preuve de la vaccination :

Sont considérées comme ayant satisfait à l'obligation de la vaccination par le vaccin antituberculeux BCG les personnes apportant la preuve écrite de cette vaccination.

La suppression de la revaccination rend inutile la pratique des contrôles systématiques par IDR à la tuberculine, qui étaient pratiqués dans le but de savoir s'il convenait ou non de revacciner une personne déjà vaccinée par le BCG, dans le cadre de la médecine scolaire notamment.

L'IDR ne doit plus être utilisée pour mettre en évidence la réaction d'hypersensibilité retardée induite par le BCG… L'IDR n'a donc pas lieu d'être pratiquée à titre systématique après la vaccination par le BCG.»

 

Annexe 7 : dépistage tuberculinique en Belgique [17]

« L’objectif est de disposer d’un moyen efficace pour diagnostiquer précocement toute modification dans l’évolution de l’endémie tuberculeuse. La Communauté Française de Belgique est, à l’heure actuelle (2002), la seule entité de l’Europe de l’Ouest à appliquer cette surveillance ; la Hollande l’a abandonnée il y a quelques années et la Flandre ne l’a jamais instaurée. Par ailleurs, les recommandations de l’OMS relatives au contrôle de la tuberculose en Europe qui viennent d’être publiées en 2002 et qui résultent d’un consensus de tous les pays européens n’évoquent pas le recours à cet outil épidémiologique mais préconisent que la surveillance de la tuberculose soit basée sur trois éléments : l’évolution des cas actifs de la maladie, la prévalence de la résistance aux médicaments antituberculeux et le suivi du traitement. »

A la suite de cette analyse la décision sera prise de suspendre la pratique du dépistage systématique dans la Communauté française de Belgique.


Annexe 8 : Pourquoi le monovax, pourquoi sa suppression ?

Pierre Bégué professeur et membre de l’Académie de médecine l’a expliqué au cours de son audition au Sénat le 22.02/07  [8] :

« J’étais externe en 1959, au moment de l’expérimentation du Monovax, la bague tuberculinique. Malgré notre entraînement à faire des piqûres, il était difficile de vacciner un nourrisson : le Monovax, malgré ses imperfections et sa qualité inférieure à celle de l’intradermique, a permis d’appliquer la loi aux nourrissons. Il n’est donc pas venu pour rien ; il n’est pas une fantaisie de l’industrie.

Inversement, malgré une AMM renouvelée régulièrement depuis les années 1970, les dossiers européens de Monovax se sont révélés insuffisants, et le laboratoire a reculé devant le prix effarant pour les refaire. Le Monovax a donc été arrêté.

Si nous avons pu maintenir, en France, la vaccination obligatoire, c’est parce que nous, nous avions la bague. Les pédiatres ont donc dû faire face, à des réclamations justifiées. En effet, si la vaccination est pratiquée avec des incidents secondaires dont les parents aujourd’hui font le reproche, et si la protection vaccinale n’est pas assurée, où est l’obligation, où est la loi, où est le sérieux ? C’est ce qu’ont voulu dire les pédiatres que je défends ici, l’étant moi-même. Aujourd’hui, l’Académie de médecine a pris cette option* en connaissance de cause, en insistant cependant sur la lutte antituberculeuse. »

Et plus loin : « le Monovax a été arrêté un peu tôt en pensant que nous allions prendre nos décisions très rapidement : cette anticipation nous laisse un peu embarrassés. »

*L’option prise à l’unanimité par l’Académie de médecine et exprimé dans son communiqué du 13 décembre 2005 était de demander la levée de l’obligation du BCG pour janvier 2006 : "Le BCG : difficultés de la vaccination dans un avenir proche". Voir : http://www.academie-medecine.fr/vaccination/page2005_C.html

 

Annexe 9 : BCG SSI en Finlande

La Finlande pratiquait encore une vaccination généralisée quand elle a opté pour le BCG SSI en août 2002 quelques années avant la France. Elle a donc un peu d’avance sur nous et il est intéressant de se demander ce qu’il en est advenu. Toutes les informations sur cette expérience sont relatées sur le site d’eurosurveillance :

http://www.eurosurveillance.org/em/v11n03/1103-126.asp

Retenons :

Until 2002, only one to two cases of BCG osteitis per year were notified in Finland. Six cases of BCG osteitis have been notified in children vaccinated in 2003. The increase in adverse reactions to BCG SSI is also a factor influencing the view of both the medical faculty and the public about universal neonatal BCG vaccination. As the incidence of TB has decreased, the complications are no longer considered acceptable.”

Dans le résumé en français :

« La décision a donc été prise (en 2005) de remplacer la politique de vaccination universelle du BCG par une vaccination ciblée sur les groupes à risque. »


Annexe 10 : Le BCG aux discussions du G8

En juillet 2000 l'OMS a publié un document de 3 pages "Eléments de base en vue des discussions du G8" sur le VIH, la tuberculose et le paludisme, "trois maladies infectieuses qui constituent des menaces majeures" :

"Il n'existe contre ces maladies aucun vaccin efficace permettant d'éviter l'infection chez l'enfant ou l'adulte" (OMS Bureau de l’Information Point de repère n°1 Juillet 2000).

"La confiance exagérée dans le BCG est l’une des causes de l’échec de la lutte mondiale contre la tuberculose" (Le traitement de la tuberculose Principe à l’intention des programmes nationaux OMS 1997 p. 11).

 

Annexe 11 : Calcul des cas évités par le BCG

Les calculs effectués par les experts pour évaluer le nombre de cas évités par la vaccination, et donc prévoir ce qui pourrait se passer en cas d’interruption, reposent sur l’hypothèse implicite que les contaminations et les vaccinations sont réparties de façon homogène. Quand ce n’est pas le cas les calculs ne sont pas valables. Un exemple :

Deux groupes d’enfants de même nombre, le premier fortement exposé avec 300 cas de tuberculose et des enfants non vaccinés car contaminés avant de l’être ; dans le second les enfants sont tous vaccinés mais non exposés. Donc la vaccination n’évite aucun cas et sa suppression ne changera rien. Mais si on globalise les données on aura alors une couverture vaccinale de 50%. Si on suppose le vaccin efficace à 50% on aura 25% d’immunisés et comme 300 cas parmi 75% de non immunisés donnent 400 cas parmi 100% on aura 100 cas évités  selon ce calcul (33% des cas observés) alors qu’en réalité la vaccination n’en évite aucun.



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Créé le 28/05/07. Dernière modification le 28/05/07.