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A la Société Française de Santé Publique, j
'ai vécu l'audition publique sur la levée de l'obligation du BCG                                                  

par Bernard Guennebaud

 

Rappel de la situation

Le 30septembre 2005 le CTV (Comité technique des vaccinations) et le CSHPF (Conseil supérieur d’hygiène publique de France) émettaient un avis sur le BCG et la lutte contre la tuberculose (notée TB dans ce document) en France. Cet avis recommandait que le BCG soit réalisé dès la naissance sur les enfants jugés à risque selon certains critères. Les plus notables étant le pays d’origine pour l’enfant ou l’un de ses parents, soit essentiellement l’Afrique et l’Asie sauf le Japon, régions à haute prévalence de TB. Il recommandait aussi, dès que le plan tuberculose en préparation serait en place, que l’obligation du BCG soit suspendue pour en limiter l’usage aux seuls enfants à risque (vaccination ciblée) et qu’un dépistage ciblée à la tuberculine soit réalisé « au sein des familles ou des populations les plus à risque de TB » . L’obligation de ces 2 mesures ciblées n’était pas demandée.

Ajoutons que ces comités d’experts ont pour fonction d’émettre des avis et des recommandations sur les problèmes de vaccinations pour le CTV et de santé publique pour le CSHPF*. Ces comités sont indépendants du politique et auraient émis le même avis sous tout autre gouvernement. Ces recommandations ne sont donc pas un projet gouvernemental. Le gouvernement n’est en aucune manière à l’origine de ces propositions.

*On trouve toutes les indications sur le rôle de ces comités sur le site du ministère www.sante.gouv.fr avec le chemin "accès à tous les dossiers", puis lettre C, puis "Conseil supérieur d'hygiène publique de France", puis dossiers complets.

A partir de janvier 2006 le BCG par multipuncture n’était plus disponible sur décision de Sanofi-Pasteur MSD**. Il fut remplacé par le BCG SSI* du nom du laboratoire de Copenhague entretenant la souche dite danoise 1331 praticable uniquement en intradermique. Cette technique particulièrement délicate chez le nourrisson à la peau très fine ainsi que la souche beaucoup plus réactogène avaient mis le feu aux poudres. Ce fut d’abord le très sévère avertissement de l’Académie de médecine (13/12/05), unanime pour demander l’arrêt de la vaccination généralisée dès janvier 2006, avant même l’utilisation du BCG SSI, et qui regrettait que le plan tuberculose n’ait pas été mis en place à temps. Puis ce fut le communiqué incendiaire du Conseil national de pédiatrie (16/12/05) qui réclamait l’abandon immédiat du BCG obligatoire et généralisé.

*SSI : Statens Serum Institut.

**Au cours de l’audition une juriste a demandé pourquoi le Monovax avait été supprimé. Il lui fut répondu par le modérateur que c’était un vieux problème dont on n’avait pas à parler ici. Elle insista. Ce fut le représentant de Sanofi Pasteur qui répondit que la France était le seul pays à l’utiliser (traduisez non rentable) et qu’il aurait fallu construire une autre usine (traduisez celle en cours était vétuste).

De nombreuses organisations médicales reprendront ce communiqué en allant plus loin encore, qualifiant le maintien du BCG « de stupidité » (Formation médicale continue de Tourcoing) ou incitant les médecins à faire la grève du BCG et à rédiger des certificats de « non indication au BCG » (Fédération des médecins de France, section Bretagne) etc.

Devant cette fronde médicale mettant tout particulièrement sur la sellette le Directeur général de la santé pour non préparation du plan TB, ce dernier va nommer en février une commission chargée de faire des propositions pour juin, ce qui pouvait laisser espérer l’abrogation de l’obligation pour juillet avec la parution du calendrier vaccinal 2006. Le 11 janvier il demande un avis éthique sur la vaccination et le dépistage ciblés au Comité consultatif national d’éthique (CCNE) ainsi qu’à la Halde (Haute autorité contre les discriminations et pour l’égalité).

Après avoir publié le 22 juin 2006 son avis sur le dépistage de la tuberculose et la vaccination par le BCG, le CCNE provoquera le 6 juillet une conférence de presse pour dénoncer avec fracas le caractère discriminatoire et stigmatisant des mesures préconisées par les experts (voir nos articles sur cette affaire).

Le plan TB, présenté comme l’indispensable préalable à la suppression du BCG généralisé et obligatoire, est en panne et le calendrier vaccinal réaffirme le caractère obligatoire du BCG. Pendant ce temps, les réactions extrêmement fréquentes, prolongées (jusqu’à 6 mois et au delà) et spectaculaires du BCG SSI provoquent le désarroi et la colère des mamans ainsi que le refus de nombreux médecins de faire ce vaccin pourtant exigé par les crèches et garderies. On assiste alors à la multiplication des certificats de contre-indications, des vaccinations extra-dermiques avec un stylo (sur des blogs des mamans se réjouissaient ouvertement que le médecin n’ait vacciné que le carnet de santé…), des batailles des mamans avec les responsables de crèches et les médecins de PMI. Un petit tour sur les blogs type maman bébé est édifiant…

Ces graves problèmes de santé publique et les situations parfois très difficiles auxquelles sont confrontées les familles dont les enfants sont vaccinables ou présentent des effets secondaires post vaccinaux ne sont connues que de celles-ci et de leur entourage et des milieux santé spécialisés qui tentent comme d'habitude de confiner le débat entre experts en espérant que le grand public n'en sera pas saisi. Pour l'instant et comme c'est l'habitude s'agissant de vaccination et de sujets de santé publique un peu complexe, les grands médias assurent une couverture minima voire se prêtent à des opérations de désinformation comme celle orchestrée par le CCNE à l'occasion de l'avis sus-évoqué sur la vaccination ciblée. L'action des sites Internet est donc très importante. Gestion Santé en hébergeant cet article après d'autres ayant traité du même sujet se propose de fournir une expertise fouillée sur la question tout en restant accessible à tous afin de permettre au plus grand nombre de se mobiliser en connaissance de cause sur ce très important sujet de société.

Ainsi, l’arrivée exclusive du BCG SSI a engendré une pagaille monstre et dégradé l’image de la santé publique. Une telle situation ne peut s’éterniser. Pour tenter de dénouer la crise qu’il avait lui-même contribué à engendrer en privilégiant le plan de pandémie grippale (en prévision d'une possible épidémie de H5N1) plutôt que le plan TB pourtant qualifié « d’urgence nationale » par les experts, Didier Houssin a demandé la tenue de cette audition publique. Son déroulement va démontrer l’imbroglio dans lequel nous sommes engagés depuis très longtemps et dont il faudra bien sortir coûte que coûte.

Une audition publique, c’est quoi ?

C’est donc la SFSP (Société française de santé publique) qui eut la charge d’organiser cette audition publique sur la levée de l’obligation du BCG. Elle s’est déroulée les 13 et 14 novembre à Paris, dans le « mausolée » de la Caisse nationale de l’assurance maladie, selon les termes du professeur Gentilini… Un somptueux tombeau en effet, celui du budget de notre Sécurité Sociale ! Pendant 2 jours, près de 30 intervenants se sont succédés ainsi que plusieurs débats avec la salle auxquels j’ai tenté d’apporter ma contribution.

Selon la définition donnée par François Bourdillon, qui présidait le comité d’organisation, une audition publique n’est pas seulement un défilé d’experts qui débattraient devant le public comme des équipes de foot dans un stade. C’est aussi le public qui doit être auditionné dans une « démarche participative » et une « expression citoyenne ». Dans la réalité ce seront surtout les experts, habitués à ce genre de colloques « entre-eux » (ils s’appelaient par leurs prénoms), qui interviendront le plus fréquemment, rien de particulier n’ayant été prévu pour auditionner de préférence le public non expert. J’admets que ce ne serait pas très aisé à organiser.

La commission d’audition, un peu comme les jurés d’un tribunal, est constituée de 20 personnes dont journaliste, représentants d’associations de parents d’élèves, juristes, médecins, une association africaine…et est présidée par le professeur Jean-Louis San Marco (Santé publique, Marseille) qui s’était illustré après la canicule de 2003 en l’analysant et en proposant des mesures protectrices pour l’avenir au cours d’une audition à l’Assemblée nationale. Elle devrait rendre ses recommandations vers le 15 décembre.

Les interventions(partielles) des participants sont en ligne sur www.sfsp.info en cliquant sur « diaporamas intervenants ».

Le BCG : un vaccin égoïste

Le point le plus important de la première partie fut de bien définir les propriétés reconnues du vaccin BCG. Les 2 experts chargés de cette lourde tâche étaient Nicole Guérin du CTV (Comité technique des vaccinations) et Daniel Lévy Bruhl de l’InVS (Institut de veille sanitaire www.invs.sante.fr ). Nicole Guérin utilisa un terme percutant qui eut une grande importance pour la suite : le BCG est un vaccin égoïste ne protégeant que le vacciné et n’ayant donc aucune action de protection mutuelle. Il faut savoir qu’un enfant n’est jamais contagieux pour la TB et que le BCG peut au mieux lui éviter certaines complications graves de la maladie sans pour autant lui éviter celle-ci sur le moment ou plus tard.

Ce point fut capital car chacun comprend bien que l’obligation vaccinale se nourrit d’abord du devoir de protection mutuelle. D’ailleurs l’avis du CSHPF et du CTV déjà cité précise que le BCG  «ne protège que les vaccinés et n’intervient en rien sur la chaîne de transmission de la maladie ».

L’une des conséquences de ce point essentiel est « l’impossibilité pour le BCG de modifier l’incidence de la maladie » comme l’écrit l’OMS (Relevé épidémiologique hebdomadaire (REH) 23/01/04, vol. 79, 4 (pp 25-40) et comme l’explicita Lévy Bruhl en montrant des statistiques.

Le débat révélera pourtant qu’un pédiatre ayant des responsabilités très importantes comme Mme Véronique Dufour, médecin chef adjoint des PMI et crèches de Paris, croyait que le BCG contribuait à réduire l’incidence de la maladie… J’ai pu rectifier aussitôt son affirmation en forçant un peu la prise du micro…mais sans cela…Il était très important de ne pas laisser dire des choses reconnues fausses par les experts mondiaux et nationaux alors qu’aucun de ceux présents dans la salle ne serait intervenu pour rectifier et que le public et les « jurés » n’étaient pas forcément très affûtés sur ces questions. J’ai constaté que les experts se contentent de dire les choses, ils ne se battent pas, surtout entre eux et en public. Devoir de réserve oblige…

Sauf certains qui m’ont semblé plus militants, malheureusement pas du tout dans le sans des idées que nous défendons ici, qu’experts au cours de ces journées, comme Christian Perronne qui fera semblant de s’interroger tout haut sur ces pays qui nous entourent comme la Belgique et l’Espagne qui ne font pas de BCG et qui ont des taux de tuberculose plus élevés que nous : « cela ne serait-il pas dû au fait que nous utilisons le BCG ? » Il lui fut répondu par Dennis Falzon « qu’il n’était pas possible de corréler le taux de tuberculose avec le taux de BCG ». Bien !

Pourtant il est président des Comités qui ont établi l’avis disant que le BCG « n’intervient en rien dans la chaîne de transmission ». Faire des effets de manche devant les jurés ne serait donc pas réservé qu’aux avocats !

Alors, à quoi sert le BCG ?

Il fut admis qu’il a une efficacité de 75 ou 80% contre les formes dites graves de la maladie c’est à dire les méningites tuberculeuses et les miliaires (tuberculose généralisée) et pour les enfants de moins de 15 ans. Cette efficacité fut considérée comme incontestable même si Nicole Guérin cita l’étude de Schwoebel de 1988 qui donne un intervalle de confiance de 30 à 98% pour le taux d’efficacité, ce qui est très élastique et signifie tout simplement que l’échantillon de données dont disposait l’auteur était très maigre et montre donc que ces complications sont rares. Ce point ne fut pas souligné tout comme le fait que les autres études ne donnaient pas de fourchette pour la localisation probable du taux d’efficacité.

Nicole Guérin mentionna aussi qu’il « n’existe pas de test de laboratoire corrélé avec le pouvoir protecteur du BCG ni de relation entre la concentration du vaccin en bactéries et la protection ». Explicitons les conséquences de ces 2 affirmations : pour la première cela implique que la tuberculine ne teste pas l’immunité comme on l’a fait croire en France pendant des décennies quand les médecins allaient tester cette immunité dans les écoles alors que les laboratoires ne savent toujours pas le faire…Depuis 2 ans c’est enfin acquis, du moins pouvait-on le penser…car le lendemain le professeur Alain Grimfeld chef de pédiatrie à Trousseau, directeur scientifique de l’Afssaps, s’étonnera que les tests post BCG n’aient plus lieu et réclamera qu’ils soient effectués … Il faudra que plusieurs médecins lui répondent simultanément que cela n’avait aucun sens pour qu’il paraisse surpris et un peu décontenancé… Incroyable ! Rappelons quand même que Alain Grimfeld est corédacteur de l’avis du CCNE sur le dépistage de la tuberculose et la vaccination par le BCG.

Cela révèle la grande importance des débats qui font ressortir ce que les exposés des experts et les textes réglementaires ne suffisent pas à modifier dans les esprits…

La seconde affirmation montre que le BCG pourrait être inoculé avec une concentration beaucoup plus faible pour la même efficacité. Par contre et ce ne fut pas dit, l’importance des réactions dites indésirables est directement corrélée avec la concentration du vaccin en bacilles.

Les méningites TB sont des complications de la maladie tuberculeuse et le meilleur moyen pour les éviter serait de réduire le risque de contamination de l’enfant. Or pratiquement, seuls les adultes sont contagieux pour cette maladie. L’autre moyen de les éviter est donc de chercher les adultes contagieux afin de les soigner. C’est l’objet du plan tuberculose. On a en effet constaté qu’en Suède en 1975 et en Allemagne un peu plus tard, l’interruption du BCG sans autres mesures s’était accompagné d’un accroissement du nombre de ces méningites*. C’est au nom de ce fait que les experts recommandent de ne pas supprimer le BCG tant que le plan ne sera pas en place et c’est en raison des inconvénients du BCG qu’ils recommandent son interruption immédiate ensuite. La crise actuelle engendrée par les nombreux effets indésirables du BCG SSI sert donc d’accélérateur à ce fameux plan dont la première version publiée**, qui prévoyait l’abandon du BCG, date de…1974 !

*Il faut cependant noter que le taux de TB en Suède à cette époque était le double de celui de la France aujourd’hui.

** Dans Le Concours médical d’avril 1974


Le BCG chez nos voisins

Nous sommes entourés de pays qui n’utilisent plus le BCG comme la Belgique, le Danemark, le Luxembourg, l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne ; d’autres qui le limitent à certains enfants exposés comme les Pays-Bas, la Suisse, l’Italie, la Suède. Seul le Portugal a conservé une vaccination généralisée.

Dennis Falzon (InVS, Euro tuberculose), qui présenta ces données, mentionna aussi que la Suède avait observé un taux de 4 bécégites disséminées (complication généralement mortelle) pour 100 000 enfants vaccinés à la naissance entre 1979 et 1991, pour ne plus en observer depuis. Cela laissait supposer qu’elles sont très rares et donc quasi négligeables. J’ai pu intervenir pour faire remarquer que depuis 1994 la Suède avait repoussé au delà de 6 mois le BCG SSI ciblé qu’elle pratiquait à la naissance sur les enfants à risque et ce justement pour réduire ce risque de bécégite disséminée. En 2005 elle est même allé plus loin encore dans les précautions : si elle estime devoir faire le BCG très rapidement après la naissance, une enquête est diligentée dans la famille élargie aux cousins pour y rechercher les causes d’éventuels décès d’enfants afin d’écarter le risque de déficit immunitaire congénital qui constituent une contre-indication formelle à la vaccination*.

* Site http://www.eurosurveillance.org/em/index-01.asp (mars 2006)

Depuis la salle j’ai pu citer aussi l’exemple du Canada : seul le Québec a vraiment fait usage du BCG. La TB y a pourtant régressé moins vite que dans le reste du Canada. On ne l’utilise plus que sur les enfants inuits très exposés au risque tuberculeux et pour les protéger des méningites et miliaires tuberculeuses ( miliaire : TB disséminée). Depuis 2004 « le Comité consultatif des nations inuites recommande que le BCG ne soit plus offert systématiquement aux nourrissons des Premières nations et inuites : le risque d’infection disséminée devrait être considéré lorsqu’on évalue les risques et les avantages de l’administration systématique du BCG aux nourrissons».

Il est en effet important de noter que bien que la Suède ne vaccine que 17 000 enfants par an (45 fois moins qu’en France) et que les inuits soient très peu nombreux, ces 2 pays on malgré cela observé suffisamment de complications graves du BCG pour accepter de prendre un peu plus de risque du côté des méningites TB afin de réduire celui des bécégites disséminées.

Il sera pourtant dit à plusieurs reprises que la Suède n’était pas le bon exemple à imiter…Mais en se comparant à la Suède de 1975 quand elle abandonna le BCG généralisé en raison d’une trop grande fréquence des accidents les plus graves et alors qu’elle avait un taux double de celui de la France actuelle et non à celle de 2004 ayant un taux global de tuberculose inférieur à 5 contre 9,2 pour la France. Il sera ainsi plus facile de faire cocorico ! Notre plan tuberculose en préparation pourrait se doter du moyen qui permettrait d’aller plus avant : une enquête dans la famille d’un futur bébé à risque dès que la future maman serait connue ; on éviterait ainsi à l’enfant d’être contaminé dans les premiers mois de sa vie ; il serait alors possible de repousser le BCG et de mieux gérer les déficits immunitaires ; enfin on trouverait et soignerait des tuberculeux dans ces familles, participant ainsi à une réduction de l’incidence. Comme on peut facilement le vérifier sur le site www.sfsp.info en y recherchant le descriptif du plan tuberculose qui fut présenté, ce dispositif simple et sympathique est absent alors que l’objectif principal de ce plan est justement de définir les occasions permettant de rechercher, pour les soigner, les tuberculeux dans les populations les plus à risque… La carence du plan permet de « justifier » des BCG pourtant particulièrement dangereux à la naissance…

En résumé on pourrait comparer l’action du BCG à celle d’un antibiotique contre la grippe : l’antibiotique n’a aucune action sur elle et peut seulement éviter certaines complications ; de même, mais par un autre processus, le BCG peut éviter certaines complications de la maladie tuberculeuse mais pas la maladie elle-même. Deux pays comparables, l’un avec BCG et pas l’autre, auront les mêmes chiffres globaux de tuberculose. Cependant le pays avec BCG pourra avoir moins de méningites TB que l’autre. En contrepartie il aura des bécégites disséminées tout aussi graves. On admet qu’en France le BCG évite 15 formes graves de TB par an et on estime le nombre de bécégites disséminées mortelles à 10 (avec les chiffres de la Suède, 4 pour 100 000 cela en donnerait 30). Si le pays sans BCG met simultanément en place une politique de santé publique pour mieux chercher et soigner ses malades que le pays qui se repose un peu trop sur le seul BCG, il obtiendra de meilleurs résultats que le pays avec BCG. C'est la politique de santé publique que nous défendons personnellement en accord avec les données scientifiques disponibles.

Le Droit constitutionnel et l’obligation vaccinale

On a eu un excellent cours de Droit constitutionnel par le professeur Didier Truchet. Il expliqua que ces données constitutionnelles fondamentales que sont la liberté individuelle d’une part et la protection de la santé d’autre part sont à égalité dans la hiérarchie juridique et au plus haut niveau. Au niveau constitutionnel il n’y a pas de solution toute faite au conflit entre ces 2 aspects. Si le législateur n’a pas prévu de limitation spécifique c’est la liberté qui est de droit.

Se pose alors la question : est-il nécessaire de limiter la liberté pour protéger la santé de l’autre (le tabac par exemple) ou de la collectivité (maladie contagieuse) ? La réponse devra venir du législateur avec des motifs dûment argumentés pour justifier la restriction de liberté.

Cette restriction devra être proportionnée à l’objectif poursuivi, avec les mesures nécessaires et seulement celles-ci. La justification contient aussi le risque pénal (pour un vaccin dangereux que l’on impose par exemple). Il faut une loi pour poser le principe, mettre en œuvre les mesures. Elle peut être suspendue pas décret. Dans l’urgence on peut agir sans consulter le Parlement (attaque à la variole par exemple). Le Conseil d’Etat vérifie la réalité, la nécessité, la proportion des mesures et la compétence de l’autorité. En réponse à une question il a précisé que les recommandations n’étaient pas gérées par le Droit. Ce qui signifie que les recommandations vaccinales peuvent jouir d’une bien plus grande souplesse que les obligations.

Voilà pour le Cours de Droit. Il paraîtra clair que si l’on confronte les propriétés du BCG à ces conditions juridiques il ne devrait pas être obligatoire puisqu’il ne participe en rien à la protection de l’autre et donc de la collectivité, comme d’ailleurs le vaccin antitétanique. Quand la législation française se mettra-t-elle en accord avec son propre Droit en intégrant enfin les données sur les propriétés parfaitement établies et reconnues du BCG?

La liberté vaccinale

Le Docteur Robert Cohen président d’InfoVac* et correspondant du Conseil national de pédiatrie, ardent partisan de beaucoup de vaccinations et qui pratique aussi le BCG quand il l’estime justifié, se montra un défenseur zélé de la liberté vaccinale en avançant des arguments pertinents. Il rappela avec beaucoup de force que dans le code de déontologie médical français, qu’il ne faut pas confondre avec le Droit constitutionnel, « l’individu passe avant la collectivité » et affirma que « le vaccin est un médicament comme les autres ». Il fut le seul à faire référence à la loi Kouchner, ce qui attira l’attention du président de la commission :

« Aucun acte médical ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment »

Et il commentera fermement : « Le BCG représente-t-il un traitement d’urgence dont la grande efficacité et l’excellente tolérance lui permettrait d’échapper à cette disposition ? »

Il rappellera aussi la primauté de l’être humain par rapport à la société dans la convention sur les droits de l’homme et la biomédecine :

« L’intérêt et le bien de l’être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science. »

« Le médecin est responsable de la personne qui se confie à lui. Son indépendance professionnelle doit le soustraire à toute pression ou injonction, à toute influence ou à tout sentiment qui pourrait porter préjudice au patient. »

Michel Rosenheim (Santé publique, Pitié-Salpêtrière) se demandera si la loi Kouchner s’applique bien aux vaccinations ! Toujours les mêmes bâtons dans les roues !

* InfoVac est une association regroupant un certains nombre d’experts qui répondent aux questions que les médecins posent sur les vaccinations. Exemple : un enfant vient de déclarer la varicelle et sa mère vient d’accoucher il y a 10 jours. Que faire ? Réponse : vacciner la mère le plus tôt possible en faisant avant une sérologie varicelle. Ne pas vacciner le nouveau né.

Les embrouilles

Tout ne fut pas simple au cours de cette audition et les embrouilles n’ont pas manqué pour troubler et égarer « les jurés du BCG ». Au nom du Comité d’éthique (CCNE) ( qui avait publiquement lancé la bataille contre le projet des experts en juillet au cours d’une conférence de presse), le professeur Alain Grimfeld fut sans surprise à la hauteur de l’attente : il affirma que la lettre du Directeur général de la santé du 11 janvier 2006 demandait au CCNE de donner un avis éthique sur le dépistage ciblé à la tuberculine dans les écoles. Il a alors mis en scène l’insoutenable séparation des enfants : à gauche les enfants à risque auxquels on va faire un test tuberculinique, à droite les autres…ajoutant qu’en région parisienne on peut avoir 34 enfants à risque sur 35 dans une classe. Que va t-on faire du 35ième ? Certes ! Sauf que le projet des experts prévoit ce dépistage dans les familles et non dans les écoles !!!

Au cours du débat qui suivi je suis intervenu pour le faire remarquer et poser la question : le CSHPF et le CTV ont-ils vraiment prévu ce dépistage ciblé dans les écoles alors que ce n’est pas mentionné dans leur avis et que de nombreux membres de ces comités étaient dans la salle ? Aucun ne démentira mon propos et à la pause l’un d’entre eux me remerciera de l’avoir dit.

La lettre de Didier Houssin parlait-elle de dépistage dans les écoles ? La Halde (Haute autorité contre les discriminations et pour l’égalité) avait reçu le 11 janvier un courrier de Didier Houssin lui demandant un avis éthique sur les mesures envisagées. Si la Halde, dans sa réponse, parle du dépistage ciblé, elle ne le mentionne à aucun moment dans les écoles. Comme il serait étrange que Didier Houssin ait envoyé le même jour 2 courriers différents sur le même sujet, on peut s’interroger sur l’apparition de cette mention « dans les écoles ».

On notera que le CCNE ne donne pas sur son site le texte intégral de la saisine qui a été l'occasion de l'avis qu'il a donné sur le BCG. Un peu de transparence ne nuirait nullement à l'éthique et éviterait bien des interrogations !

Ce dépistage ciblé supposé devoir se dérouler dans les écoles étant donc reconnu irrecevable -nous sommes bien entendu tous d’accord sur ce point- il ne reste plus qu’à l’étendre à toute l’école pour en gommer le caractère discriminatoire ! D’où la proposition maintes fois réitérée par Alain Grimfeld d’instituer le dépistage généralisé à la tuberculine dans les écoles et ce AVANT d’avoir supprimé le BCG tout en ayant expliqué juste auparavant dans le même avis, qu’il fausse le sens du test et rend le dépistage impossible, surtout sur des enfants. Vive la cohérence ! « Echangerait BCG contre tuberculine » pourrait-on lire dans le petit journal du troc !

Plus fort encore, dans l’avis écrit du CCNE une séance de vaccination ciblée par le BCG était même mise en scène pour la juger aussitôt « stigmatisante ! » Certes ! Sauf qu’un tel spectacle est tout simplement impossible puisque le BCG est prévu à la maternité pour les enfants à risque ou avant d’entrer à l’école pour les autres enfants, tant que l'obligation vaccinale est maintenue, et que depuis 2004 il y a au plus un BCG par personne pour toute la vie !

Au cours de la conférence de presse du CCNE le 6 juillet, son président Didier Sicard s’estimait choqué de penser qu’on pouvait ainsi chercher à imposer le BCG aux seules populations à risque afin de se préserver de « ceux qui vont nous contaminer à l’est du périphérique » (le Parisien 7/07/06).

Ces affirmations dénuées de tout fondement ont évidemment marqué les esprits comme en témoignèrent les réactions des représentants de parents d’élèves ou de juristes qui croyaient dur comme fer que c’était cela les mesures prévues, voire que le vaccin assurait une protection mutuelle alors qu’il est fondamentalement « égoïste ».

Une autre « embrouille » de bonne foi sans doute, viendra d’une juriste, le professeur Danièle Lochak (Faculté de droit de Nanterre) qui affirmera (c’est en ligne) :

« l’objectif de la vaccination et du dépistage ciblés n’est pas seulement ni même principalement de protéger les individus ainsi ciblés, mais aussi, voire surtout, de protéger l’entourage et, plus largement encore, la santé publique. Certes, il a beaucoup été dit, pendant les auditions, que le BCG serait une vaccination « égoïste » parce qu’elle protège l’enfant mais ne protège pas contre la transmission. Mais outre que l’objection ne vaut pas pour le dépistage, s’agissant du BCG il semble bien que, historiquement, la couverture vaccinale a permissinon d’éradiquer, du moins de diminuer fortement la prévalence de la maladie. Donc le BCG a aussi été instauré dans l’intérêt de la santé de la population, et pas seulement dans l’intérêt des malades potentiels. »

Que le BCG ait été instauré avec de telles intentions et espérances, oui sans doute. Mais elles n’ont pas été confirmées par les faits !

Pourtant elle a entendu comme moi des experts de très haut niveau comme Nicole Guérin dire et redire que le BCG était un vaccin égoïste ; puis Daniel Lévy Bruhl confirmer par des statistiques que le BCG n’avait aucune action sur les chiffres globaux de la TB. Elle a pu lire noir sur blanc dans l’avis du CTV et du CSHPF qu’il « ne protège que le vacciné sans action sur la transmission » alors que de nombreux membres de ces comités étaient présents et intervenaient souvent, que pendant 2 jours entiers aucun n’a contesté ces points et qu’elle a pu entendre et lire que l’OMS dit de même dans le message (référencé et en ligne) que Raviglione avait remis au président de la ligue pour la liberté des vaccinations à l’intention de cette audition (voir plus loin).

Force est de constater que cette juriste a été tellement imprégnée par la propagande martelant de telles affirmations pendant des décennies, que même de telles opportunités ne sont pas suffisantes pour faire décrocher des anciennes croyances. Il devrait pourtant paraître évident que si le BCG est égoïste en 2006 il l’était aussi en 1950. Il y a d’ailleurs bien longtemps que les experts n’attribuent plus au BCG la forte réduction de la TB en France après 1950 mais plutôt à l’action des antituberculeux qui supprimaient rapidement la contagiosité du malade et aussi, voire surtout, à l’amélioration des conditions de vie. Ils écrivent même que « l’obligation est intervenue trop tard et les taux de couvertures trop faibles pendant trop longtemps pour que la vaccination ait pu avoir un réel impact avant les années 1960. » (TB : place de la vaccination dans la maîtrise de la maladie. Inserm 2004 p.125).

Je peux aisément confirmer ce point car j’avais 7 ans quand le BCG fut rendu obligatoire et j’aurais donc dû le recevoir. Pendant toute ma scolarité on nous a fait une cuti-réaction annuelle sans jamais faire de BCG à quiconque. En 1960 un élève venant de Lille, ville pilote pour le BCG car accueillant l’Institut Pasteur où Calmette avait développé son vaccin, est arrivé dans ma classe. Quand on a su qu’il avait le BCG on l’a tous regardé comme une bête curieuse, c’était le premier qu’on voyait ! Poitiers, la ville où naquis Camille Guérin le collègue de Calmette, fut une autre ville pilote. Les enfants y étaient presque tous vaccinés et cela s’étendait au département de la Vienne. Poitiers était à 50km de chez moi mais dans un autre département ; et c’est ainsi que j’ai échappé au BCG…La TB a régressé à cette époque dans mon département tout aussi rapidement que dans la Vienne.

Quant au dépistage, personne n’a dit au cours de cette audition qu’il était « égoïste ».  Sur les enfants qui ne peuvent transmettre la maladie il ne peut servir qu’à anticiper le traitement de la maladie s’il permet de la dépister. Encore vaudrait-il mieux pour cela qu’il n’ait pas eu le BCG. Chez l’adulte qui peut devenir contagieux, un dépistage précoce suivit d’un traitement efficace peut éviter toute une chaîne de contagion. Mais le premier bénéficiaire reste le malade lui-même.(voir la dernière note de ce document)

Les médecins de terrain entrent en lice

Ces confusions ainsi engendrées polluèrent le débat pendant un jour et demi. Fort heureusement, les derniers intervenants furent des médecins de terrain qui avaient les pieds sur terre car confrontés aux maladies, aux patients, aux enfants à vacciner et aux responsabilités à prendre contrairement à tous ceux, moi compris, qui peuvent discuter indéfiniment sur ces sujets sans en avoir aucune à assumer. Cela a fait du bien et nous a ramené sur la Terre.

Le premier fut le Dr Claude Berrard de Poitiers qui conta tranquillement la réalité du praticien de cette région : « en 25 ans je n’ai vu aucun cas de TB ni aucun accident dû au BCG. Maintenant il y a le changement de technique (et de souche). A Poitiers, médecins, pédiatres, PMI ne veulent plus le faire. »

Voilà qui était clair !

Puis il y eut la vigoureuse intervention de Robert Cohen dont j’ai déjà parlé. Ce pédiatre courageux, qui se bat et sait se battre, s’est vigoureusement prononcé contre la vaccination de tous les enfants, contre la vaccination selon des critères géographiques (zone à risque), contre la vaccination selon des critères de vie en collectivité (crèches…) mais pour une vaccination sur des caractéristiques individuelles sur la base des critères du CTV par exemple. Tout cela est en ligne.

Il acheva ainsi de nous placer face à la réalité du terrain et non de se noyer dans des spéculations développées sur de fausses prémisses.

Ainsi, notre juriste Danièle Lochak s’en était prise au projet des experts, jugeant « terriblement court alors qu’elle a d’excellents juristes » l’avis favorable de la Halde qui ne voyait aucune discrimination dans les mesures proposées par les experts. Elle pensait visiblement que le BCG pourrait être rendu obligatoire pour tous ceux qui rempliraient les conditions de ciblage définis par les experts comme elle l’écrit dans son texte en ligne. Il n’en est rien bien entendu, ces conditions étant seulement des indications données aux médecins pour orienter leur décision prise au cas par cas comme l’a bien expliqué Robert Cohen. Notre juriste parle « du risque d'étiqueter ceux dont on reconnaît la vulnérabilité » et le BCG pourrait ainsi devenir un marqueur social. Tant qu’on y est, pourquoi ne pas le comparer au fer rouge pour les bagnards et les moutons ou à l’étoile jaune des Juifs sous le troisième Reich ! Pour éviter tout cela une seule solution : « maintenir la vaccination généralisée » (on pourrait aussi la supprimer totalement !). Elle ajouta même que puisque le vaccin intradermique était techniquement difficile il fallait qu’il reste généralisé afin que les médecins puissent acquérir une bonne technique et la conserver !!! Sur le dos d’un certain nombre de nourrissons ! J’avoue avoir beaucoup de mal à comprendre la logique de notre juriste. Car enfin, si elle estime ce vaccin si bon pour vouloir le garder pour tous, pourquoi deviendrait-il soudain une marque presque infamante s’il était réservé à quelques uns ?

Pourtant cette vaccination ciblée est pratiquée depuis longtemps en Suède et en Suisse, pays particulièrement scrupuleux, sans aucun problème de cette nature et l’OMS recommande cette vaccination ciblée à la naissance pour les enfants à haut risque. En France même, la Circulaire DGS n°DGS/SD5C/2005/457 du 5 octobre 2005 inscrit le ciblage des populations à risque dans les faits par la date de recommandation de la vaccination : dès les premières semaines de la vie en cas de risque élevé ; au delà de 6 mois en cas de faible risque. Mais tout cela n’était pas suffisant pour amener certains à s’interroger avant de s’emballer !

Au cours du débat qui suivi notre juriste intervint encore pour s’insurger sur l’aspect obligatoire de ces mesures ciblées. Il fallut que les personnalités au premier rang lui disent comme un seul homme « mais ce n’est pas ce qui est prévu !»

Grand Merci donc aux médecins de terrain qui nous ont permis de sortir complètement, espérons-le, de ces batailles à la Don Quichotte contre des moulins à vent!

Même l’OMS a apporté sa contribution pour tenter d’infléchir la politique française sur le BCG puisque le président de la Ligue pour la liberté des vaccinations, Jean-Marie Mora, avait obtenu un message de Mario Raviglione, directeur de Halte à la tuberculose à l’OMS, à l’intention de cette réunion, ce qui est un beau résultat quand on se présente avec une telle étiquette :

« La politique d’utilisation du BCG en France n’a pas de sens. Le BCG ne protège quasiment pas de la tuberculose pulmonaire et surtout pas chez l’adulte. Dans un pays industrialisé comme la France où on est capable de cibler les groupes à risque peu élevé, les groupes à risque et à haut risque, la vaccination BCG ne devrait se pratiquer qu’avant la sortie de la maternité d’enfants nés de mères de groupes à haut risque.

Pour ces nourrissons le BCG a un effet protecteur contre la méningite tuberculeuse et la tuberculose disséminée estimée à 80% mais il ne permet pas de prévenir la primo infection et surtout n’empêche pas la réactivation d’une infection pulmonaire latente qui constitue la principale source de propagation du bacille dans la communauté. »

La vaccination généralisée n’existe plus en France !

La dernière intervention apporta une information capitale. Mme Véronique Dufour, médecin chef adjoint des PMI et crèches de Paris, démontrera que même à Paris, où pourtant le vaccin est exigé dans toutes les crèches et garderies de la capitale sans que les contre-indications y soient acceptées, le nombre d’enfants vaccinés à chuté de 50% par rapport à 2005 : en 2005 les PMI ont effectué 13 058 vaccinations contre 5957 au 31/10/06 On peut consulter cette démonstration sur www.sfsp.info (diaporama Dr Véronique Dufour). Qu’en est-il en province où l’on respecte encore les lois de la République : un enfant ayant une contre-indication étant évidemment légalement en droit de fréquenter une crèche ?

Une anecdote d’une maman qui raconte sur un blog : elle demande un certificat de contre-indication à son médecin qui refuse de faire un faux. La directrice de la crèche lui dit qu’aucun enfant de la crèche n’a le BCG. La pédiatre de la PMI lui explique longuement qu’il ne faut pas faire ce vaccin. La directrice lui donne copie d’un certificat de contre-indication d’un autre enfant pour avoir l’adresse d’un médecin qui en fait. Elle raconte cela à son médecin qui lui fait le certificat ! Pour un peu la directrice aurait installé un distributeur automatique à l’entrée !!! Mais ce n’était sûrement pas à Paris !

Pendant le dernier débat qui suivi et constatant que sous les coups de boutoir de Robert Cohen on ne s’orientait pas dans la direction qu’il souhaitait, garder le BCG obligatoire, le professeur Michel Rosenheim fit une ultime tentative pour tenter de sauvegarder cette espèce protégée qu’est l’obligation du BCG dans notre pays. Il avança le dernier pion qui lui restait : la protection attribuée au BCG contre les mycobactéries non tuberculeuses qui peuvent être la cause de scrofules par exemple: « Vous allez échanger 300 adénites dont on guéri contre 10 méningites tuberculeuses et 300 affections à mycobactéries non tuberculeuses ». Dans la grande tradition française il affirmera un peu plus tard que les 10 bécégites disséminées qu’il avait oublié dans sa comptabilité et qu’on lui rappela, était surestimées… Rappelons que la Suède, pays particulièrement sérieux en matière de précaution vaccinale et de recensement des effets secondaires, en enregistrait 4 pour 100 000 ce qui en ferait près de 30 par an en France. Il est peu probable que nous puissions faire mieux que les suédois dans ce domaine. Ajoutons aussi que le BCG a été rendu obligatoire pour lutter contre la tuberculose, pas pour autre chose et que seule cette maladie devrait intervenir dans le débat sur l’obligation.

Là encore Robert Cohen fut remarquable d’opportunité : la vaccination généralisée n’existant plus en France cela n’a plus de sens de se baser sur elle pour brandir des évaluations dépassées par les événements. L’opposition des médecins et pédiatres refusant de pratiquer le BCG et la détermination des parents, c’est à dire la situation réelle sur le terrain, allaient-elles avoir raison des manœuvres ?

Le mot de synthèse

Il fallait bien clôturer la réunion en laissant la parole au président de la commission qui devra rendre ses recommandations vers le 15 décembre. J’avais confiance en cet humaniste qu’est Jean-Louis San Marco et il ne m’a pas déçu (notes prises à la volée):

"J'ai conscience du piège dans lequel je suis tombé ! Nous sommes confrontés à un vaccin pas terrible pour la lutte  contre la tuberculose pulmonaire de l'adulte pour laquelle il n'est pas fait.

Dans des pays comparables ayant des politiques extraordinairement diverses les chiffres sont pratiquement les mêmes.

Ce vaccin n'est ni si bon que certains le soutiennent ni si mauvais que d'autres le disent.

Nous sommes réunis parce que les laboratoires MSD et Sanofi Pasteur ont décidé d'arrêter un vaccin.

La levée de l'obligation du BCG est inéluctable. Son maintien est intenable. Le ciblage ethnique est illégal. Le ciblage géographique ? Non!

Il faut trouver autre chose, nous ne sommes pas bons. Nous avons en France des habitudes de règles brutales, généralisées. La proposition unique est inadaptée : Guyane, Paris, la Creuse. Il faut faire des propositions expérimentales pour qu'elles soient évaluées à un moment défini à l'avance.

Il faut avoir conscience de la charge émotive charriée par le BCG. Il faudra être extrêmement prudent : prendre le risque de nouveaux cas. Faire preuve d'humilité : d'autres ont des connaissances et des expériences.

Enfin, le plaisir que j'ai eu de réfléchir et débattre entre gens passionnés : 48h avec vous, l'expérience de ce qu'est selon moi la santé publique."

Des mots qui laissent la place à l’espoir de sortir enfin de cette gangue qui colle à la peau de la France et des Français et nous empêche d’avancer.

Fin de l’obligation : la liberté ? Pas sûr !

La fin de l’obligation vaccinale, on peut l’espérer pour bientôt. Mais sera-t-elle synonyme de liberté ? Pour l’entrée à l’école oui car étant obligatoire il sera impossible de refuser un enfant non vacciné par un vaccin non obligatoire. Pour les crèches et garderies ce sera plus difficile. En province comme à Poitiers où « médecins, pédiatres et PMI refusent de vacciner » l’affaire est sans doute déjà réglée. La levée de l’obligation mettra seulement fin à la comédie des contre-indications pour couvrir les directrices de crèches.

Mais pour Paris Mme Dufour a présenté la position du service : « Pas de BCG, pas de crèche ; la contre-indication ne relève pas du mode de garde collectif ». Selon les témoignages de mamans, un enfant qui a vraiment une contre-indication au BCG pour dermatose étendue « n’est pas apte à la vie en collectivité ». Cette position va-t-elle changer quand le BCG ne sera plus obligatoire ? La réponse prévisible est non ! Si Mme Dufour ne l’a pas dit explicitement à l’audition elle a donné les éléments de réponse et ils sont en ligne : elle s’est prononcée en faveur d’une vaccination ciblée pour les enfants à risque mais pas sur les critères du CTV et du CSHPF ; elle considère que tout enfant fréquentant une crèche parisienne est à risque de TB car les mamans entrent dans la crèche, parfois pour y rendre des services, et certaines pourraient contaminer les enfants ; elle a parlé d’une époque où l’entrée de toute personne étrangère au service était interdite ; ce n’est plus le cas et on ne peut envisager, a-t-elle dit, de revenir à cette mesure. Donc c’est clair !

Cela sera-t-il légal (une fois l’obligation supprimée) ? Je ne suis pas juriste mais très certainement non pour 2 raisons : le BCG ciblé ne sera pas rendu obligatoire, c’est certain car cela serait aussitôt jugé discriminatoire, on en a assez parlé ; le Conseil d’Etat a déjà rendu un décret précisant qu’il n’existe pas de textes législatifs autorisant une crèche à rendre obligatoire un vaccin que le législateur n’a pas rendu obligatoire. C’est clair !

Mais si des mamans peuvent ainsi être contaminatrices (elles doivent tousser pour cela) et puisque les experts du plan TB sont à la recherche de moyens pour trouver des tuberculeux pour les guérir et réduire la transmission, on pourrait voir là une excellente occasion : proposer au cas par cas et par établissement le « marché » suivant : toutes les mamans savent combien ce BCG sera pénible pour leur enfant et pour elles-mêmes ; leur proposer alors soit de les suivre du point de vue de la TB* (elles et leur famille) soit de faire le BCG à leur enfant. La réputation du BCG SSI est devenu telle qu’elles accepteraient j‘en suis convaincu.

On aurait ainsi un moyen efficace pour lutter vraiment contre la maladie en trouvant des mamans (et des papas) contaminées et qui auraient pu devenir contagieuses. Et s’il n’y en a pas c’est que les enfants n’étaient pas en danger dans la crèche...

Et puisque l’essentiel est de trouver les tuberculeux adultes et qu’il est souvent difficile aux services de santé de se faire accepter par les adultes (c’est pourquoi l’effort se porte surtout sur les enfants), pourquoi ne pas élargir le procédé en échangeant la vaccination de l’enfant contre le dépistage des parents et autres membres adultes de la famille, tout particulièrement lorsque la famille refusera le BCG pour leur enfant?

Ce sont des idées lancées comme ça…Mais puisque le ministère semble en manquer... Peut-être des collectivités locales pourraient-elles s'approprier ces idées de bon sens qui favoriseraient sur le terrain dans le cadre d'un dialogue constructif avec les populations concernées une politique efficace de lutte contre la tuberculose

Et les pays qui n’utilisent pas le BCG et qui ont autant de TB qu’en France et autant de groupes à risque, ils ont aussi des crèches et des écoles. Ils font comment ?

Une chose est certaine : la TB est une maladie sociale qu’il ne sera possible de vaincre qu’avec la participation active des populations.

*Quand on parle de suivi pour la TB on pense aussitôt à test tuberculinique. Cependant, un document de 90 pages du CSHPF datant de 2003 « Prévention et prise en charge de la TB en France » contient un chapitre « Diagnostic clinique et bactériologique de la TB (7S34) » qui expose de A à Z la démarche à suivre, des signes d’appels conduisant à l’examen clinique jusqu’au traitement sans jamais faire appel à ce test. Ce document, qui par ailleurs fait abondamment appel au test, a été distribué à tous les participants à l’audition.

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Créé le 1/12/06. Dernière modification le 1/12/06.