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Les besoins énergétiques du cerveau pendant l'enfance - Perspectives en matière d'évolution humaine - Implications en matière d’anthropologie de la santé du développement des tissus adipeux au cours de l’évolution, aperçus des applications en thérapeutique


Les besoins énergétiques du cerveau pendant l'enfance

Le Figaro a le premier mis en ligne un compte rendu scientifique sur une étude sur les besoins nutritionnels du cerveau par rapport au reste du corps pendant l'enfance, "L'enfance est longue car le cerveau humain est glouton". L'article commente l'étude en libre accès "Metabolic costs and evolutionary implications of human brain development".

Selon le Figaro, « En combinant diverses données d'imagerie médicale, des chercheurs américains ont retracé l'évolution, durant l'enfance, de la consommation de glucose par notre cerveau et la part de l'énergie globale disponible que celui-ci s'octroie aux dépens du reste du corps. »

On sait depuis assez longtemps que chez l'adulte la consommation énergétique du cerveau est de 20% à 25% de la consommation énergétique totale du corps pour 2% de son poids (wikipedia). Cette consommation énorme persiste  même au repos, sachant que le cerveau humain est (en tenant compte des différences de poids entre espèces), 5 fois plus gros que la moyenne des mammifères et 3 fois plus gros que la moyenne des singes. Même par rapport au chimpanzé, notre plus proche parent, ayant le plus gros cerveau parmi les singes, notre cerveau est énormément plus développé et énergétivore. Le cerveau humain consomme 280 à 420 calories par jour, là où celui d'un chimpanzé consomme de 100 à 120 calories par jour.

Les données de consommation énergétique chez l'enfant selon l'âge sont beaucoup moins bien connues que chez l'adulte, d'où l'intérêt de cette nouvelle étude qui montre que les besoins dans la petite enfance sont considérablement supérieurs à ceux de l'adulte.

Selon Le Blog Passeur de Sciences de Pierre Barthélémy, "Pourquoi l’enfance des humains est-elle si longue ?", les chercheurs pour disposer de données chez l'enfant, « ont réanalysé un jeu de données obtenues sur quelques dizaines d'enfants et de jeunes adultes des deux sexes soumis à une tomographie par émission de positons (TEP). Cette technique d'imagerie médicale permet, à l'aide d'un marqueur faiblement radioactif inséré dans des molécules de glucose, de visualiser l'activité métabolique d'un organe, et notamment du cerveau. »

Les résultats montrent que le cerveau utilise dans la petite enfance une quantité énorme de ressources énergétiques. Selon Le Figaro, les « ratios [sont] encore plus vertigineux durant l'enfance : à la naissance, le cerveau détourne à son profit de 50 à 60 % du glucose disponible et jusqu'à plus de 66 % vers 4 ou 5 ans ! »

Cette consommation semble associée à une allocation différentielle des ressources entre les périodes consacrées à la croissance pondérale générale et celles visant à la croissance spécifique du cerveau. Selon Passeur de Sciences, « c'est aussi à cinq ans que la croissance de l'enfant est la plus ralentie. Depuis sa naissance, un enfant normal grandit toujours, mais de moins en moins vite. Pour le dire autrement, il gagne de moins en moins de centimètres au fil des années, un mouvement qui va s'inverser après ses 5 ans pour atteindre un maximum lors de la poussée pubertaire. »

L'étude (lire protocole), mesure exclusivement le glucose, lequel est apporté en injection avec un marqueur, précédé d'une brève période de jeûne, afin de déterminer la quantité de glucose captée par le cerveau par rapport aux autres organes. Le glucose est ici considéré comme le carburant énergétique du cerveau. Les choses sont un peu plus complexes en pratique ainsi que par rapport à la question de l’alimentation dans les sociétés traditionnelles où notre cerveau a évolué. Avant le sevrage, le lait maternel, est riche en glucides, dont le lactose, qui se transforme en grande partie en glucose. Après le sevrage, qui dans les sociétés traditionnelles des temps préhistoriques intervenait probablement entre 3 et 4 ans, le régime des enfants devait se rapprocher de celui des adultes, notamment dans la période des 4 - 5 ans de pic de consommation évoqué dans l'étude. Dans une alimentation de type adulte l’alimentation peut devenir moins régulière pour l’enfant et il puisait alors comme l’adulte dans ses réserves et l’apport en glucose était alors plus indirect (l’organisme puise d’abord dans le stock de glycogène puis active la néoglucogenèse). Les jeunes enfants possèdent en outre, dans le cadre de la néoglucogenèse, une capacité très importante à la lipolyse des corps gras comme source de glucose, très supérieure à celle des adultes. Ces précisions apportées, cela ne change pas grand chose à la démonstration pour ce qui concerne les besoins énergétiques du cerveau dans l'enfance.

Toutefois il convient aussi de préciser que l'étude se consacre seulement aux besoins énergétiques du cerveau et non à ses besoins nutritionnels en éléments structuraux. Ainsi, ne sont pas évoqués les différentes catégories de corps gras, les protéines, les vitamines et les divers nutriments susceptibles de passer la barrière hémato-encéphalique pour participer au développement structurel du cerveau. Leur captation et leur utilisation dans la construction cérébrale pose des problèmes spécifiques et nécessite certainement des délais importants qui sont un facteur important distinct de la disponibilité en glucose.

Par rapport à ses besoins nutritionnels complexes, le cerveau humain est en particulier très dépendant pour son développement d'apports cumulés en certains corps gras, notamment l'omega 3 DHA d'origine animale (qui peut être aussi fourni par biosynthèse à partir de ses précurseurs végétaux) et d'autres nutriments comme la choline et ses dérivés. Passeport Santé, dans Une entrevue avec Stephen Cunnane apporte différents éléments qui vont dans le sens de l'importance de cet omega 3 dans le processus d'humanisation au cours de l'évolution. Ce type de contraintes pourrait également expliquer le ralentissement de la croissance corporelle entre 4 et 5 ans au profit de la complexification de la structuration du cerveau constatée à cet âge qui est un des résultats mis en avant dans cette étude.

La maturation outre les besoins énergétiques et les éléments nutritionnels structuraux complexes est aussi liée aux apprentissages divers de l’enfant, aussi bien moteurs que communicationnels, langagiers et intellectuels. Ces acquisitions étant liées à des interactions très complexes avec l'environnement il est normal qu'elles prennent beaucoup de temps.

Les simples apprentissages moteurs liés au passage de la position allongée de l’enfant, au quatre pattes, à la verticalisation, à la maîtrise de la marche puis de la course et des différentes habiletés motrices en rapport avec l’habilité manuelle humaine demandent énormément de temps. Pour la seule maîtrise de la marche, Jacques-Alain Lachant rappelle dans son livre, La marche qui soigne, que l’enfant « ne procèdera à une marche alternée [croisement des bras et des jambes] proche de celle de l’adulte que grossièrement vers l’âge de ses trois ans, donc dans sa quatrième année.
Durant cette période, l’inclinaison du bassin vers l’avant se développera avec la bipédie. En réalité, le développement et l’acquisition de la forme adulte de la marche lui prendront environ quatre années. Ce n’est que vers l’âge de sept ans que l’on peut considérer que l’enfant possède la même forme de marche bipède que l’adulte, même si sa psychomotricité et sa plasticité cérébrale sont en plein développement. (p. 29)  »

Au cours de l’évolution des hominines (pour utiliser la classification en vigueur) et de l’augmentation de la taille du cerveau s’est mis en place un ralentissement de la croissance à certaines périodes par rapport aux espèces plus anciennes avec des périodes de latence destinées à permettre le développement cérébral pour divers apprentissages complexes nécessitant des interactions élaborées avec l’environnement naturel et social. Le palier des 4 – 5 ans était par exemple sensiblement moins prononcé dans les espèces plus anciennes, déjà dotée de la marche et de la course, ayant précédées l’homme mais dont le développement cérébral était nettement plus modeste. On ignore toutefois le calendrier précis de ces évolutions.

Encore plus récemment on a découvert (lire Le Figaro santé) qu'à l'approche de l'adolescence, de 10 à 15 ans, la consommation du métabolisme basal chutait assez fortement, probablement pour une allocation des ressources en faveur de la croissance de la stature pendant cette période. Ceci explique la tendance au surpoids dans cette tranche d'âge, en tout cas dans la société contemporaine de la surabondance nutritionnelle et du manque d'exercice physique. Après cette période, le métabolisme basal recommence à augmenter jusqu'à l'âge adulte.

On voit que le processus est complexe et spécifique à l'être humain avec de profondes racines dans l'histoire de l'évolution de notre espèce. Nous avons à la fois un métabolisme basal très élevé, c'est-à-dire que nous consommons beaucoup plus d'énergie organique au repos, comparé aux espèces de singes proches, que nous devons trouver dans notre alimentation et nous avons des réserves corporelles de graisse bien supérieures à celles des autres singes, ce qui nous permet de jeuner de façon prolonger sans mettre notre santé en péril en période de disette. Nous sommes à la fois "dépensiers" dans notre bilan énergétique et "économe" de part notre capacité à stocker des graisses de précaution, qui nous protègent du froid en l'absence de fourrure et constituent des réserves potentielles de longue durée en cas de disette. On sait qu'un homme de corpulence normale peut jeuner environ 40 jours avant de prélever ses réserves de protéines musculaires et de mettre alors sa vie en danger. C'est un exploit évolutif tout à fait extraordinaire !

Différentes contraintes, la naissance relativement prématurée du nouveau né humain, les énormes besoins de développement quantitatif et qualitatif du cerveau après la naissance, la nécessité d'apports en nutriments en quantité et en complexité, le couplage des apprentissages avec l'environnement, crée des contraintes et des opportunités qui ont existé tout au long du processus d'évolution vers l'homme moderne à partir de ses ancêtres hominiens archaïques.

Perspectives en matière d'évolution humaine

Dans notre article, "L'homme meilleur coureur du monde animal" nous avons évoqué les recherches du biologiste évolutionniste Daniel Lieberman de l'Université Harvard à Cambridge, Massachusetts, qui est l'auteur d'un excellent ouvrage sur l'anthropologie de la santé, Story of the Human Body: Evolution, Health and Disease. Nous avons aussi évoqué ses travaux dans notre article Myopie et lumière solaire. Cela va nous amener à examiner les points suivants : 1) La taille du cerveau 2) Bipédie, marche et course, la main et les outils… avant le développement du cerveau 3) Taux de reproduction 4) Socialisation 5) Impact de l’acquisition de la technologie socioculturelle sur l’évolution des espèces de chasseur - cueilleur.

1)      La taille du cerveau

Les deux articles de vulgarisation du Figaro et du blog du Monde que nous avons cités, font le lien entre taille du cerveau humain et la théorie de l'évolution, mais sans développer vraiment la question. C'est l'occasion pour nous de proposer une petite synthèse sur l’évolution humaine aux lecteurs de Gestion Santé. C'est un sujet fort intéressant en lui-même et qui touche aussi à des nombreux aspects de l'anthropologie de la santé de l'homme contemporain. Nous allons nous appuyer sur le livre de Daniel Lieberman pour aller un peu plus loin sur ces questions (traductions de l'anglais par Gestion Santé, notes non reprises) :

« Comment les cerveaux sont-ils devenus plus volumineux dans le genre humain ? Il existe deux voies principales pour développer un plus gros cerveau : le faire croitre pendant plus longtemps ou le faire croître plus rapidement. Comparé aux singes nous faisons les deux. A la naissance, le cerveau d'un chimpanzé fait 130 cm3 puis il triple de volume au cours des trois années suivantes. Les cerveaux des nouveaux nés humains font 330cm3 puis ils quadruplent de volume au cours des 6 à 7 années suivantes. Ainsi nous développons nos cerveaux deux fois plus vite que les chimpanzés avant la naissance et ensuite nous les développons à la fois plus vite et plus longtemps après la naissance. Une grande partie de la taille supplémentaire provient du fait que nous avons environ deux fois plus de cellules nerveuses, appelées neurones. (p. 108) » Ces neurones sont surtout situés dans le néocortex siège des fonctions intellectuelles supérieures.

La croissance prénatale du cerveau est dans notre espèce au maximum de ce qui est possible d'obtenir et la taille considérable de la tête de l'enfant à naître rend la naissance difficile et relativement risquée chez l'être humain. Cette difficulté est accentuée par les modifications pelviennes liées à la verticalisation (lire sur cette question le passage de Anthropologie biologique: évolution et biologie humaine, ainsi que Il y a aussi des « sages-femmes » chez les singes).

On parle souvent de "foetalisation" du nouveau-né humain, compte tenu de ce que le développement du cerveau humain qui fait suite à la naissance est proportionnellement beaucoup plus important que dans les autres espèces et rend les enfants très immatures d'un point de vue neuro-moteur à la naissance et les rend de ce fait dépendants beaucoup plus longtemps que les petits des espèces de singes supérieurs. L'acquisition de la marche prend, par exemple, 2 fois plus de temps pour l'homme que pour le chimpanzé.

Daniel Lieberman revient dans son ouvrage sur la consommation énergétique comparée, dont nous avons déjà fait état et ajoute que, « En valeur absolue, votre cerveau consomme 280 à 420 calories par jour, là où celui d'un chimpanzé consomme de 100 à 120 calories par jour.  (p. 109) » Le cerveau humain a aussi des besoins en flux sanguin très élevés pour être nourri, évacuer les déchets et conserver une température normale, ce qui a nécessité une adaptation évolutive importante du système vasculaire.

2)      Bipédie, marche et course, la main et les outils… avant le développement du cerveau

Il faut toutefois bien garder à l'esprit que l'augmentation de la taille du cerveau dans l'évolution des hominines a été « à la traine » ou plutôt « à la remorque » par rapport à bien d'autres acquisitions plus urgentes et cruciales. La verticalisation qui permet la bipédie, la main libérée des fonctions locomotrices qui a permis de créer les premiers outils, la capacité à marcher efficacement puis à courir pour chasser avec de plus en plus de compétence étaient des priorités autrement décisives. Lieberman explique « que l'évolution vers des corps d'apparence humaine s'est faite en au moins deux étapes. D'abord, chez H. habilis, le cerveau a légèrement augmenté et le prognathisme de la face s'estompe. Puis chez H. erectus, on note l'évolution vers des jambes d'aspect nettement plus modernes, tout comme pour les pieds et les bras, ainsi que des dents plus petites et un cerveau modestement plus développé. Le corps de H. erectus n'était pas à 100% comme le votre, mais l'évolution de cette espèce clé marque l'origine d'un corps d'apparence largement humaine, tout comme les façons modernes dont nous mangeons, coopérons, communiquons, utilisons des outils et nous comportons de nombreuses autres façons. En substance, H. erectus a été le premier ancêtre que nous puissions caractériser comme significativement humain. (p. 72) » C'est la première espèce des hominines (elle est apparue probablement il y a 1,9 millions d'années - Lieberman considère pour cette datation H. ergaster et H. erectus comme une même espèce) a s'être dispersée largement sur la planète du fait de ses capacités adaptatives remarquables de chasseur-cueilleur.

Selon Daniel Lieberman H. erectus, a beaucoup d'aspects humains au niveau de l’aspect général et de la motricité, malgré la taille encore réduite de son cerveau, le fait que ses rejetons étaient probablement pleinement adultes dès 12 ou 13 ans et qu'il possédait comme les autres primates beaucoup moins de réserves de graisses corporelles que les chasseurs - cueilleurs plus tardifs (je fais référence aux individus en bonne santé, pas à la question de l'obésité dans nos sociétés contemporaines...). Son taux de reproduction était probablement assez lent et était plus proche de celui des chimpanzés que de celui des espèces plus proches des homo sapiens. Il devait utiliser un langage archaïque très rudimentaire, probablement fait d’imitation des sons de la nature et des animaux, de bruits divers chantés avec un recours abondant à la gestuelle et à l’imitation. Le langage au sens moderne est très récent et est seulement apparu chez homo sapiens, très probablement en plusieurs étapes à partir de – 200 000 ans (sur l’apparition du langage, lire The Singing Neanderthals: The Origins of Music, Language, Mind and Body, de Steven Mithen).

3)      Taux de reproduction

Le taux de reproduction potentiel chez les femelles des chasseurs - cueilleurs homo sapiens est d'un enfant tous les 3 ans (sevrage), soit presque 2 fois plus vite que chez les chimpanzés. Or les petits des espèces pré-humaines, à partir de H. erectus, sont beaucoup plus longs à élever, difficulté accrue par des naissances plus fréquentes. Ce paradoxe a été levé par une socialisation sans cesse croissante de l'alimentation dans les groupes humains et du fait que l'éducation des petits devient une tâche collective élargie à la famille et même à la tribu. Cela a permis de prolonger la durée de l’enfance puis d’accélérer progressivement le taux de reproduction des femelles parvenues à l’âge adulte. Dans les espèces pré-humaines la longévité augmente régulièrement avec des sujets plus âgés dont le rôle est de consolider la transmission culturelle intergénérationnelle et de participer au prendre soin des enfants.

A l’opposé, le taux lent de reproduction des chimpanzés est lié au fait que la femelle à la responsabilité exclusive de nourrir ses petits jusqu'à ce qu'ils soient autonomes. Les mâles ne participent quasiment pas à l’alimentation des petits, ni non plus les autres membres du groupe. Il en va de même dans la sous-espèce des bonobos, souvent très  idéalisée par les médias du fait qu'elle est moins agressive que les chimpanzés. La ménopause ne semble pas exister chez les femelles chimpanzés, même si la fertilité diminue nettement après 35 ans. Les femelles sauvages se reproduisent de 13 ans à 35 ans environ, ce qui donne un maximum de 5 à 6 descendants survivants après le sevrage. La longévité du chimpanzé est de 40 à 45 ans (Lire Reproduction chez le chimpanzé).

4)     Socialisation

La socialisation des pré-humains depuis H. erectus vient de la nécessité de maîtriser et de transmettre culturellement la technologie primitive, du fait de la socialisation de la chasse, du fait de la socialisation de la préparation et de la distribution de la nourriture et enfin pour des raisons de survie par la nécessité d'une allocation préférentielle des ressources alimentaires vers les femmes et les enfants, pour permettre la survie du groupe. Cette socialisation massive a du rapidement entrainer une forte diminution des hiérarchies de domination sociales comparativement à ce qu’on peut observer dans les sociétés de singe, cette hiérarchie  étant incompatible avec la complexité et la complémentarité nécessaire à la reproduction sociale du groupe par le travail social. Celle-ci nécessite une étroite collaboration et une égalité permettant la réalisation des activités communes complexes dans un climat de confiance réciproque.

Cela s'est manifesté notamment par le développement de l'affectivité entre les membres du groupe et l'inhibition de l'agressivité et du fonctionnement social classique des sociétés de singe à base de dominants et de dominés avec les privilèges sexuels qui vont avec. La nécessité de la collaboration pour l’éducation des enfants dans la durée à du favoriser la création de liens de couples relativement stable pour que la femelle puisse être soutenue par un male intéressé à la survie de sa progéniture et faisant la jonction avec le groupe pour assurer l’alimentation de la femelle et de ses petits. La sexualité s’est transformée devenant continue, les activités sexuelles étant progressivement dissociées des cycles hormonaux. La période de fécondité de la femelle devient masquée, ce qui fait qu’elle n’est pas sur-sollicitée par d’autres males que le conjoint habituel en période de fécondité, ce qui favorise la descendance des males ayant des comportements favorable à la paternité.

Il est probable que la diminution de l'agressivité s'est aussi manifestée entre les groupes proto-humains (tribus) compte tenu de leur dispersion géographique, qui rendait la compétition territoriale faible et de la nécessité pour les groupes de se mélanger suffisamment entre eux pour éviter la consanguinité.

Dès les premières espèces de chasseur - cueilleur, l'utilisation d'outils pour des tâches complexes, comme la chasse et la préparation des aliments est devenue indispensable à la survie de l'espèce. Le rôle des outils pour la chasse est bien connue, mails le rôle tout aussi important de la préparation des aliments, est moins souvent évoqué. Il s'agit du découpage et du hachage pour la viande et du broyage pour les végétaux. L’outillage permet de débiter les pièces de viande et le hachage permet la préparation et une bonne digestion d'aliments carnés et végétaux (comme les tubercules fibreux) avec la dentition relativement légère des espèces de chasseur - cueilleur. La dentition des singes dont nous avons hérité est, explique Lieberman, très mal adaptée au mâchage de la viande ou de tubercules fibreux qui prend énormément de temps et le hachage permet de réduire considérablement la durée des repas tant carnivores que végétariens, de mieux digérer et d’extraire plus de nutriments de la même quantité d’aliments. Cela a permis de libérer une quantité importante de ressources énergétiques du système digestif vers le système nerveux.

5)      Impact de l’acquisition de la technologie socioculturelle sur l’évolution des espèces de chasseur - cueilleur

D’un point de vue évolutif, les espèces animales ont leurs "outils" qui font partie de leur corps. Par exemple le castor, grand constructeur d’ouvrages en bois, utilise ses dents pour tout ce qui est abattage et découpe des arbres.

En utilisant les pierres pour découper et hacher la viande et pour faire de même avec les végétaux fibreux, l’homme a externalisé et socialisé par l'outillage son système dentaire (l’outillage et son utilisation est devenu une production sociale du groupe) et il a pu ainsi éviter d’avoir à modifier sa dentition pour acquérir une dentition de carnivore qui aurait été autrement indispensable pour dépecer et broyer la viande avant de l’avaler, ce que les dents de singes ne permettent pas de faire correctement. Cela lui a aussi permis d’éviter de se spécialiser et de rester omnivore et de pouvoir ainsi se nourrir de façon moins spécialisée que les carnivores. Il a ainsi pu utiliser un assortiment varié d’aliments végétaux en complément de la chasse et disposer de ressources alimentaires d’appoint. Tout cela ne l’a pas empêché de devenir un chasseur aussi performant que les carnivores.

On voit sur cet exemple que l’outil et la culture ne se substituent pas à l’évolution. Si sous certains aspects ils « neutralisent » l’évolution, sur d'autres points ils la libèrent. On évite l’évolution de la dentition, mais on libère et accélère l’évolution d’une bipédie performante qui permet la marche puis la course selon un autre mécanisme que nous allons évoquer.

Dans L'homme meilleur coureur du monde animal, nous avions évoqué la théorie de Timothy Taylor auteur de The Artificial Ape: How Technology Changed the Course of Human Evolution qui estime que dès l'époque de H. habilis où l’espèce est à la fois bipède et omnivore, se déplaçant beaucoup, il a fallu impérativement inventer des porte-bébés, à partir du cuir de la peau des animaux, pour se déplacer dans la savane avec les enfants en bas âge. C’est un exemple décisif de « neutralisation » d'un aspect de la pression selective de l'évolution pour libérer une autre composante de la pression sélective.

Chez les singes, les petits s'agrippent aux poils de la mère et la quadrupédie permet de limiter l'effort pour un bon accrochage, le dos étant faiblement incliné. Même en conservant la pilosité et un réflexe d’agrippement performant, il devient quasi impossible aux petits de s’accrocher efficacement si la position de la mère devient verticale. La verticalisation amène donc un risque important pour la progéniture et semble donc contre performante d’un point de vue évolutif du fait du risque d'augmentation de la mortalité infantile chez des singes par ailleurs peu fécond.

A défaut de système de transport, il faut porter les petits dans les bras pour les réchauffer et les protéger, mais aussi les pierres taillées et les ressources alimentaires de la cueillette et de la chasse non consommées sur place. Ce portage est très fatigant et couteux en énergie et immobilise les mains qui ne sont plus disponibles pour des tâches d’urgence et pour toutes celles de la vie courante, pour les mères qui portent les petits.

Timothy Taylor est convaincu que des systèmes de transport à base de pièces de cuir taillées sur des animaux chassés ou récupérés par charognage ont du servir très tôt chez H. habilis comme porte-bébés permettant de garder les nouveaux nés au contact du corps de la mère en situation de protection, tout en libérant les mains de celle-ci pour les nombreuses taches de la vie quotidienne. Il est en fait probable que des sacs de transport polyvalents ont du être créés très tôt sans qu'on puisse dire s'ils ont d'abord servi de porte-bébé. Ces sytèmes de transport ont du participer à la prise en charge collective des enfants par le groupe, en facilitant le passage de l'enfant d'un membre du groupe à l'autre.

Des systèmes de transport des enfants de ce type existent encore dans les sociétés traditionnelles et leur étude médicale montre que ce sont les systèmes qui apportent le meilleur développement neuro-moteur aux jeunes enfants avant l’acquisition de la marche. Ils évitent de poser l’enfant au sol et de le mettre en danger.

Là aussi il a fallu externaliser socialement en créant par la technique une fonction de substitution à l’agrippage pour contourner l’évolution. Cela a libéré la sélection des traits concernant la verticalisation, la marche et la course. L’homme a donc créé culturellement un système, qui se rapproche d’une poche marsupiale simplifiée, bien adaptée à la néoténie croissante des nouveaux nés et nettement plus performant que l’agrippage des singes. A partir de là on peut avoir toutes sortes d’innovations évolutives complémentaires à la précédente, comme la perte des poils pour développer un nouveau système révolutionnaire de transpiration très performant (lire "L'homme meilleur coureur du monde animal").

L'utilisation d'outils a nécessité une socialisation de l'espèce humaine, pour mémoriser et transmettre entre les générations les techniques utilisées pour la fabrication, le transport et l'utilisation variée des outils dans leurs différents contextes de chasse, de cueillette et de préparation alimentaire.

La socialisation a entraîné le développement d’une capacité préverbale à comprendre les intentions de l’autre (ce qu’on appelle la théorie de l’esprit en sciences cognitives) et le développement de l’affectivité à l’intérieur du groupe humain. La chasse et la complexification des interactions avec l’environnement, l’acquisition de connaissances botaniques relativement étendues en rapport avec la cueillette, toutes les compétences manuelles pour créer des outils et des objets primitifs et les utiliser en situation ont également contribués au développement de l’intelligence et ont poussé à une augmentation progressive de la taille du cerveau au cours de l’évolution.

Implications en matière de santé du développement des tissus adipeux au cours de l’évolution

Un aspect très peu connu de la poussée vers l'humainisation et dans le succès de cette évolution, c'est qu'à une certaine période de l'évolution, les ancêtres d'homo sapiens ont développé quantitativement et qualitativement d'importantes réserves de graisses dans différents tissus adipeux. La différence avec les autres espèces de singe est énorme. Selon cet article (en anglais), "Comparé à d'autres singes, Pontzer a découvert que les humains ont beaucoup plus de graisses corporelles — 23 à 41% comparé à seulement 14 à 15% pour les gorilles et 8 à 9% pour les chimpanzés.

Nous examinerons successivement 1) L’optimisation des réserves de graisses corporelles 2) Les Tissus adipeux blancs, bruns et beiges 3) L'activation de la graisse brune 4) La restriction calorique, le jeûne intermittent et le jeûne proprement dit 5) Le jeûne et le Plasma de Quinton :

1) L’optimisation des réserves de graisses corporelles

Nous vivons depuis quelques décennies dans la phobie des graisses, ce qui a conduit d’ailleurs à d’énormes erreurs dans les conseils alimentaires des milieux médicaux qui a poussé à consommer beaucoup trop de sucres. L’apport en graisse doit en fait s’inscrire dans une approche quantitative et qualitative raisonnée.

D’un point de vue évolutif, Daniel Lieberman souligne dans son livre que la capacité croissante à stocker les graisses alimentaires dans des structures de réserve a constitué un atout évolutif fondamental par rapport aux autres grands singes. Les anciens hominines même s’ils avaient adoptés la capacité à la marche et à la course étaient probablement proches des chimpanzés de ce point de vue et ne possédaient probablement pas encore de réserves spécifiques en corps gras comme les espèces humaines plus récentes. Les fossiles ne permettent toutefois pas de définir précisément le rythme de cette évolution. Nous citonsLieberman un peu longuement compte tenu de l’intérêt des données factuelles peu connues que contient son ouvrage sur la question. Selon Lieberman (p. 117) :

« … à un certain moment dans le passé, nos ancêtres ont développé par évolution plusieurs adaptations clés qui leur ont permis d’amasser de plus grandes quantités de graisse que les autres primates. Du fait de ces ancêtres, même les plus minces d’entre nous sont relativement corpulents comparés à d’autres primates sauvages et nos bébés sont particulièrement gros en comparaison de la progéniture des autres primates. Il existe de bonnes raisons de supposer que sans notre faculté et tendance à stocker les graisses, les humains archaïques n’auraient jamais pu évoluer pour avoir de gros cerveaux et des corps qui grandissent lentement. (…)
 Du fait que nos cerveaux ont un besoin incessant de sucre, le fait d’avoir une grande quantité de gras assure à nos cerveaux une source fiable et quasi inépuisable d’énergie. Un enfant singe à environ 3% de réserve de graisse corporelle, mais des enfants humains en bonne santé naissent avec environ 15% de graisse corporelle. En fait, le dernier trimestre de la grossesse est largement consacré à engraisser le fœtus. Au cours de ces trois derniers mois, le cerveau du fœtus triple sa masse, mais le stock de graisse corporelle est multiplié par cent ! De plus, le pourcentage de graisse corporelle augmente jusqu’à 25% au cours de l’enfance, avant de revenir à environ 10% chez l’homme adulte et 15% pour les femmes. Les graisses sont plus qu’un réservoir énergétique pour le cerveau ou pour la grossesse et l’allaitement ; elles sont aussi essentielles pour alimenter l’athlétisme d’endurance nécessaire pour être un chasseur – cueilleur. Lorsque vous marchez et courez, une grande partie de l’énergie brulée vient des graisses (…) Les cellules stockant les graisses aident également à réguler et à synthétiser des hormones telles que les ostéogènes et les graisses sous-cutanées fonctionnent comme un excellent isolant thermique et conservent la chaleur. »

2) Les tissus adipeux blancs, bruns et beiges

Le magazine Science et Vie d’octobre 2014 (p. 79-82) a justement sorti un article de synthèse qui fait le point sur le bouleversement des connaissances dans le domaine des réserves de corps gras du corps humain sur lequel nous allons nous appuyer en le complétant d’autres sources. L’article est intéressant, bien qu’il n’explicite pas les singularités évolutives des réserves de graisses dans les tissus adipeux propre à l’espèce humaine.

Les tissus adipeux fonctionnent comme un (ou des) organes spécialisés. Comme l’indique S&V « La graisse est présente dans notre corps sous forme de dépôts graisseux localisés en différents endroits : sous la peau, près du cou, autour des ganglions... où elle assure des fonctions vitales très diversifiées. »

Ces « organes graisseux » fonctionnent comme des systèmes de signalisations biologiques en rétroaction par lesquels « ils contrôlent le bon fonctionnement cardio-vasculaire, régulent la température, activent les défenses immunitaires, équilibrent le métabolisme... »

La graisse sous la peau est présente sous forme de tissu adipeux blanc, le principal tissu adipeux chez l’adulte. Chez les nouveaux nés et les jeunes enfants une grande partie des tissus adipeux se présentent sous forme de tissu adipeux brun qui participent à la thermogenèse par lipolyse des corps gras. On considère que le maintien d’un niveau relativement élevé de graisse brune est un gage de santé chez l’adulte en participant notamment à l’équilibre pondéral. On est loin de connaître encore tous les mécanismes de signalisation des tissus graisseux, puisque selon S&V, « « Le tissu adipeux produit en fait des centaines de molécules bioactives différentes, agissant comme des hormones : elles sont secrétées dans le sang et influencent les autres organes à distance », explique Johan van de Voorde, spécialiste de la physiologie à l’université de Gant (Belgique) ».

Parmi les hormones dont on a plus spécifiquement décrypté les mécanismes ces dernières années figurent l’adiponectine, qui augmente l’appétit et stimule les phénomènes de stockage des corps gras et la leptine qui a l’effet inverse. Ces hormones communiquent avec les autres organes du corps et avec les neurones de l’hypothalamus. Chez la souris, il a été montré récemment que l’adiponectine a un effet antidépresseur et stimule la neurogenèse cellulaire dans l’hypothalamus lorsque les animaux pratiquent simultanément de l’exercice physique. L’adiponectine a aussi un effet vasodilatateur, elle prévient la formation des caillots et à même un effet favorisant la formation de nouveaux vaisseaux sanguins. Tous ces effets sont en interaction complexe avec l’exercice physique, l’état psychosomatique général, la nutrition, les types de graisses corporelles ingérées, les niveaux d’hormones, les niveaux de minéraux et de vitamines, etc.

Les tissus adipeux beiges, récemment identifiés, auraient des capacités thermosensibles spécifiques de mesure de la température et fonctionnent probablement comme des activateurs ou inhibiteurs des tissus adipeux bruns.

Certains types de tissus gras spécialisés, proches des ganglions lymphatiques, jouent également un rôle très important dans la modulation de la réponse immunitaire.

3) L'activation de la graisse brune

Selon le Dr Mercola, « une des raisons pour lesquelles vous pourriez avoir des difficultés à rester mince pendant que vous vieillissez tiendrait à ce que votre taux de graisse brune tend généralement à décroître avec l'âge. (...) Une des raisons pour la propension de votre corps au gain de poids avec l’âge pourrait avoir à faire avec la baisse des niveaux de graisse brune, qui se produit naturellement tandis que vous vieillissez. La graisse brune est un type de graisse génératrice de chaleur qui brûle de l’énergie au lieu de la stocker, et cela peut avoir des implications importantes en ce qui concerne la perte de poids. »

On pensait que les graisses brunes servaient essentiellement aux bébés en l’absence du mécanisme du frisson comme système de protection thermique à cet âge. Selon wikipedia, « Les frissons thermiques sont des contractions rapides des muscles striés squelettiques (5 à 10 fois par seconde) elles n'affectent cependant pas le mouvement du corps. C'est un mécanisme de production de chaleur efficace à mise en place rapide. » On a longtemps pensé que les graisses brunes de l’adulte étaient résiduelles ou inexistantes et sans signification biologique spécifique.

Selon Mercola, « Le tissu adipeux brun se retrouve dans la région du cou, autour des vaisseaux sanguins (contribuant au réchauffement de votre sang) et « marbré » avec la graisse blanche dans le tissu adipeux viscéral. On estime maintenant que pratiquement tout le monde a des petites quantités de graisses brunes dans le corps, bien que certains groupes de personnes aient tendance à avoir plus de tissu adipeux brun que les autres. Fait intéressant, il semble que le plus de graisse brune, ou le plus de tissu adipeux brun activé, le mieux c’est, car on peut mettre en évidence des corrélations directes entre l'activation de la graisse brune et des mesures métaboliques d'une bonne santé. »

Parmi les mécanismes de stimulation de l’activation des graisses brunes figurent le froid intense et l’exercice physique. Une recherche montre que « Sur la base de modèles animaux, les chercheurs ont estimé que seulement 50 grammes de tissu adipeux brun (ce qui est inférieur à ce dont disposent la plupart des bénévoles des études) pourraient brûler environ 20 % de votre apport quotidien en calories — et plus si « encouragés » ».

De simples packs de glace laissés en place 30mn environ plusieurs fois par semaine, sur le haut du corps dans le dos et sur la poitrine à proximité des zones de tissus adipeux bruns, constitue probablement une stimulation thermique efficace (attention à ne pas poser directement la glace sur la peau quand même !). Les douches ou les bains glacés auraient le même effet. L’effet de la stimulation des graisses brunes est une diminution de la masse de graisse blanche et une régulation de la glycémie sanguine, les graisses brunes captant beaucoup de glucose quand elles sont stimulées. Il semble également que l’exercice physique stimule l’activation de la graisse brune et favoriserait également le « brunissement » des graisses de l’organisme. Il faudra toutefois des recherches supplémentaires pour mieux discerner entre simple activation et augmentation de la part de tissus adipeux brun ou beiges par différentes techniques.

Notons que les effets de thermo-stimulation favorables sur les tissus organiques concernent tant la chaleur (via le sauna à infrarouge par ex.) que le froid, et passent notamment par la libération de protéines de choc thermique qui ont un effet favorable sur l’organisme et qui seraient aussi activées par le froid.

Le Dr Mercola explique que la prise de mélatonine (une hormone peu couteuse aisément disponible en complémentation aux USA et dont on pense qu’elle augmente aussi la longévité), stimule les capacités d’activation des tissus adipeux bruns lors de la stimulation par le froid et l’exercice, par l’intermédiaire de la stimulation spécifique des tissus adipeux beiges. Les cellules des graisses brunes étant très riches en mitochondries, il est probable, pour Gestion Santé, que l’ubiquinol et le PQQ pourraient avoir un effet également favorable sur l’activation des tissus adipeux bruns.

Le jeûne intermittent (sauter certains repas) et le fait de faire des exercices physiques relativement intenses sans s’être alimenté dans les heures précédentes, outre que c’est excellent pour la santé, favoriserait aussi un fonctionnement optimisé des différents tissus adipeux.

4) La restriction calorique, le jeûne intermittent et le jeûne proprement dit

Les perspectives que nous venons de développer interrogent la notion de restriction calorique souvent invoquée comme une approche de référence pour augmenter la longévité. En effet la restriction calorique augmente la longévité dans les espèces où elle a été testée. Après des résultats incertains en 2012 il semble que ce soit également le cas chez le singe selon une étude bien conçue menée récemment chez les singes rhésus (lire LEF Magazine). On pourrait donc avoir tendance à extrapoler ces résultats à l’homme.

Mais comme nous venons de le voir en détail, les êtres humains diffèrent significativement des autres singes de par la quantité très importante des tissus adipeux chez l’être humain en bonne santé. Par ailleurs une autre spécificité d’homo sapiens est sa beaucoup plus grande longévité naturelle que celle des autres espèces de singe. Tous ceux qui connaissent des personnes ayant atteint un grand âge savent que la capacité à récupérer des accidents de santé est essentielle. On peut franchement se demander si la restriction calorique en diminuant de façon excessive le volume des tissus adipeux de réserve ne serait pas une arme à double tranchant chez l’homme en amenant la personne âgée à ponctionner ses tissus protéiques essentiels plutôt que de puiser dans ses tissus adipeux de réserve (Gestion Santé a traité sous un autre angle des risques liés à la fonte musculaire et sa prévention chez la personne âgée dans plusieurs articles).

De ce fait des stratégies se tournant vers le jeûne intermittent et le jeûne proprement dit, couplés avec une bonne hygiène de vie, une pratique sportive adaptée et une complémentation alimentaire bien conduite semble pour Gestion Santé, en l’état actuel des connaissances, la meilleure stratégie de prévention du vieillissement, à préférer à la restriction calorique. Cette stratégie serait de nature à assurer un dialogue biologique et physiologique optimisé entre les tissus adipeux et les différents organes, dont le cerveau.

Le jeûne intermittent consiste à sauter un certain nombre de repas de façon régulière ou plus épisodique. On peut sauter le petit déjeuner, mais c’est probablement la suppression du repas du soir qui est la plus bénéfique, car cela laisse une période de repos prolongé pour le système digestif et cela favorise les activités réparatrices liées au sommeil. Si vous vous exercez physiquement de façon relativement intensive certains matins, il est préférable de le faire le ventre vide et de reprendre l’alimentation seulement lors du repas suivant. Si vous avez eu un repas abondant, il est utile de s’appuyer sur le sentiment de satiété pour sauter le repas suivant. Le jeûne intermittent se marie particulièrement bien avec un exercice physique relativement soutenu et éventuellement avec les techniques de stimulations thermiques et de complémentation précédemment évoquées.

Le jeûne proprement dit consiste à arrêter de s’alimenter pendant 24 heures ou davantage. Florian notre collègue de Naturo-passion qui a beaucoup œuvré pour faire connaître les approches scientifiques et les applications du jeûne, a mis un article clair et didactique, écrit par Docteur Frédéric Hebraud, sur les différentes étapes physiologiques du jeûne. Il a également interviewé Thierry de Lestrade qui a coréalisé un documentaire qui a eu beaucoup de succès sur le jeûne et a écrit en complément un excellent ouvrage sur le sujet, Le jeûne, une nouvelle thérapie ?.

Après consommation du glucose sanguin circulant, le glucagon, une hormone sécrétée par le pancréas, « va être sécrété pour mobiliser les réserves glucidiques stockées dans le foie. C’est la phase d’ « urgence » du jeûne. Elle dure chez l’homme environ 12 à 24 heures selon les réserves accumulées et l’activité. » C’est ce jeûne court qui permet un premier soulagement au niveau du foie après un repas abondant lorsque vous sautez un ou deux repas ensuite. Dans ce premier mécanisme le glycogène stocké dans le foie et les muscles va être consommé.

Lorsque le glycogène disponible est consommé, un deuxième mécanisme se met en place, la néoglucogenèse, qui « se caractérise par la synthèse de glucose dans le foie, à partir des acides aminés issus de l’hydrolyse des protéines musculaires ou à partir des acides gras du tissus adipeux. » En ce qui concerne le prélèvement sur les cellules adipeuses à cette étape, « le glucagon va, avec l’adrénaline, favoriser l’hydrolyse des triglycérides en libérant du glycérol et des acides gras qui pourront être utilisés pour le métabolisme énergétique. » Comme son nom l’indique, dans la néoglucogenèse, on passe toujours par une synthèse hépatique de glucose pour alimenter le corps en énergie.

Il s’agit d’un mécanisme énergétiquement couteux et un autre mécanisme appelé cétogenèse très économique énergétiquement se met en place au bout de deux à quatre jours selon les cas. C’est celui-ci qui assurera l’économie énergétique du jeûne si celui-ci se prolonge. « Le cerveau et les muscles sont très avides des corps cétoniques car leur utilisation énergétique est plus rapide que celle du glucose. En effet les corps cétoniques shuntent la glycolyse cytoplasmique et entrent très rapidement dans la mitochondrie pour être transformé en acetyl-CoA et intégrer le cycle de Krebs. »

Le jeûne intermittent et le jeûne nous semblent de nature, en synergie avec d’autres approches, à favoriser un fonctionnement optimisé des tissus adipeux au cours du vieillissement et leur « dialogue » harmonieux avec le reste du corps. Cela permettrait de bénéficier des avantages de la restriction calorique sans en subir les inconvénients probables pour l’homme, sans parler de son caractère hyper contraignant.

Comme on l’a vu, pour aller jusqu’au jeune enclenchant la cétogène, qui a des bénéfices spécifiques, il faut dépasser plusieurs jours de jeûne, ce qui constitue un véritable exploit dans notre société. Il n’est pas inutile de pratiquer dans un groupe pour stimuler sa motivation et bien sûr il est indispensable d’avoir un avis et un suivi médical si on souffre d’une pathologie chronique et que l’on est sous traitement médical.

Sauf cas très spécifique et indication médicale, le jeûne ne devrait pas dépasser une semaine (d’un point de vue physiologique pur on peut toutefois « tenir » sans séquelles si la santé est bonne et le poids de départ suffisant, jusqu’à 4 semaines) ; mais c’est la répétition à intervalle régulier de ce type d’approche par le jeûne intermittent et je jeûne (avec modération) qui est vraiment bénéfique pour l’organisme et qui devrait favoriser le vieillissement en bonne santé et la longévité.

5) Le jeûne et le Plasma de Quinton

Le jeune durable ne doit normalement être accompagné que d'eau ; toutefois, pour vous hydrater, je vous conseille d'ajouter à une eau de boisson très peu minéralisée (genre Mont Roucous) du Plasma de Quinton, dont nous venons de parler dans un article récent. Vous pouvez utiliser la version dite hypertonique (concentration de l'eau de mer, le mélange est seulement filté), l'hypertonique étant beaucoup moins cher et étant destiné à être dilué, que vous trouverez chez ce fournisseur français au litre, à un prix abordable. Cela permettra au jeune d'être beaucoup plus puissamment détoxifiant et facilitera à votre corps à la gestion des électrolytes plasmatiques et le renouvellement des électrolytes cellulaires (les électrolytes sont les sels minéraux en circulation dans le plasma sanguin dont la constitution idéale pour la santé est celle du Plasma de Quinton isotonique). Cela vous permettre de faire des activités physiques plus soutenues et de pouvoir transpirer, même abondamment, sans risquer de carence en électrolytes. Cela permet de faire du sauna et d'autres activités du même type sans danger.

L'hypertonique doit, au minimum, être ramené par dillution à l'isotonie, qui est sa concentration plasmatique, avant d'être bu (2/3 d'eau pour 1/3 d'eau de mer hypertonique), ou pour des effets plus doux être ramené à l'hypotonie (3/4 d'eau pour 1/4 d'eau de mer hypertonique), sachant que l'on peut évidemment diluer encore plus le Plasma de Quinton. Un de mes amis, Florian KAPLAR de naturo-passion.com m'a indiqué que même à l'isotonie le Quinton est trop salé et risque de relalncer le processus digestif. En consultant internet, j'ai trouvé quelques arguments allant dans ce sens. De ce point de vue, même le Quinton hypotonique risque d'être un peu trop concentré. Néanmoins je pense que l'idée reste intéressante, en utilisant par ex. du Quinton au 1/8. A ce niveau je ne pense pas que la minéralité de l'eau puisse avoir un effet négatif sur le système digestif.

Sans apport de Quinton, l'organisme est contraint à une épargne relativement complexe des électrolytes pour ne pas atteindre la carence au cours du jeune, ce qui le rend plus stressant pour l'organisme et en diminue les bienfaits. Ceci dit pour des jeunes d'une semaine, faits avec une pratique sportive modérée et sans sauna, l'utilisation d'eau plate pendant le jeune ne semble pas poser de problème particulier.

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Créé le 30/12/14. Dernière modification le 30/12/14.