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Journal de bord de Jacques Valentin de Juin 2006

 

Faute de temps pour écrire des pages bien structurées, je laisse souvent passer sans commenter ou citer une multitude d'excellents articles sur Internet ou dans des revues, ou sans évoquer des livres que j'ai lu et sur lesquels je souhaiterais attirer l'attention ou faire quelques commentaires utiles pour le lecteur. D'où cette nouvelle rubrique "Journal de bord" que je commence à la fin de novembre 2005. La santé ne sera pas le seul sujet traité ici, mes intérêts dépassant largement ce domaine. J'espère échapper aux platitudes que l'on retrouve parfois dans la blogosphère et apporter des informations intéressantes au lecteur de passage et sur un ton plaisant si possible.

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Juin 2006 : 28/06 - Décryptage : Rapport d'information du Sénat sur la politique du médicament (1ère partie) - 26/06 - Non au mercure dentaire - 18/06 - Biphosphonates et nécroses osseuses - 16/06 - Titre de psychothérapeute - suite du dossier - 15/06 - Dépression de l'enfant : du Prozac (fluoxétine) un peu de psy et faisons comme si l'alimentation n'existait pas - 13/06 - Position du Collectif Europe et Médicament suite à l'adoption du règlement européen sur les médicaments pédiatriques - 12/06 - Alerte de PsY en mouvement sur le projet de décret sur le titre de psychothérapeute - 11/06 - Omerta générale des médias dominants sur le travail du Collectif Europe et Médicament - 10/06 - Congrès IOF : dernières recherches sur le calcium, la vitamine D et l'os - 07/06 - La directive européenne 2002/46 sur les compléments alimentaires transposée en droit Français - 05/06 - Jacques Valentin interviewé par Nutranews -

28 juin 2006 : Rapport d'information du Sénat sur la politique du médicament

Le Sénat a rendu un rapport le 8 juin 2006 sur "Les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments - Médicament : restaurer la confiance" sur lequel nous allons nous pencher ces prochains jours.

Un rapport qui fait suite à l'affaire du Vioxx

Le rapport est largement un contre-feu à une proposition de commission d'enquête de François Autain et des membres du groupe communiste républicain et citoyen. L'avant-propos du rapport reconnaît d'ailleurs le rôle initiateur du sénateur. Cette proposition de commission d'enquête initiale faisait suite au scandale du Vioxx un anti-inflammatoire retiré en catastrophe du marché après y avoir été introduit dans des circonstances discutables.

Le Sénat a finalement produit un rapport d'information selon une procédure qui lui donne nettement moins de pouvoirs d'investigation et qui est plus descriptive qu'une commission d'enquête. Néanmoins les sénateurs semblent avoir mené de nombreuses auditions d'acteurs du secteur public, privé et de la société civile.

Le rapport commence par quelques généralités bien creuses notamment sur l'affaire du Vioxx. On peut comparer le vague et l'imprécision de ces informations à celle pointues données par la revue Prescrire sur le même sujet "Comment éviter les prochaines affaires Vioxx". Le Sénat élude en particulier dans cet avant-propos la très mauvaise évaluation du rapport bénéfice risque de ce médicament faite par les agences de santé et son coût exorbitant par rapport à des alternatives thérapeutiques d'efficacité équivalentes (sur ce problème examiné de façon plus générale lire nos analyses des ouvrages de Jean-Claude Salomon ou de Philippe Pignarre).

Quelques spécificités françaises en matière de surconsommation des médicaments

Le Sénat indique ensuite "que les dépenses de médicaments augmentent inexorablement dans le monde occidental, au rythme de 8 % par an, notamment en raison du vieillissement de la population." Or c'est un quasi mensonge car les dépenses augementent pour de toutes autres raisons, qui sont la substitution de médicaments anciens par des nouveautés souvent peu efficaces vendues à des prix incroyablement élevés.

Le Sénat apporte ensuite des données chiffrées plus pertinentes sur l'incroyable surprescription des médicaments en France par rapport à des pays économiquement comparables. Après des données quantitatives générales le Sénat donne des chiffres par classe thérapeutiques pour les antibiotiques, les tranquillisants, les hypnotiques et les psychotropes en général.

On est cependant frappé par l'ancienneté des chiffres et l'absence complète de données sur l'évolution de la consommation au cours des dernières années, problème qui ne semble pas inquiéter les sénateurs, alors qu'une campagne de longue haleine et menée par exemple par la Cnam pour faire baisser la consommation des antibiotiques ! Il faut dire que même ces mesures, pourtant poursuivies sur plusieurs années avec une certaine cohérence donnent des résultats qui restent médiocres. Depuis notre article sur le sujet en 2003 "Angine et surprescription générale des antibiotiques en France" nous avons vu passer peu de travaux de synthèse sur la question. En début d'année Le Parisien du 4/06/06 titrait pourtant "La résistance aux antibiotiques n'a jamais été aussi forte" et Marc Payet citait Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 3/01/06 de l'Institut de veille sanitaire et dressait un tableau accablant de la situation sur le développement des résistances aux antibiotiques en France et ses graves conséquences, en particulier à l'hôpital. Ainsi depuis 2002 la baisse de la consommation n'est que de 13% ce qui est ridiculement faible compte tenu de l'énorme surprescription en France comparée à la plupart des aux autres pays européen (avec des prescriptions quadruple d'antibiotiques par rapport aux Pays-Bas on comprend qu'on est très très loin du compte !).

Un rapport qui oublie les problèmes de santé publique posés par la surconsommation des médicaments

Nous sommes ici sur des enjeux de santé publique majeurs qui concernent de très nombreuses classes thérapeutiques lesquelles sont à l'origine de très nombreuses hospitalisations et maladies nosocomiales dont le coût humain et économique est considérable. Par rapport à ces enjeux de santé publique fondamentaux, les rédacteurs du rapport n'ont pourtant pour conclure leur avant-propos et lancer le sujet que cette phrase vide et sans portée, à peine compréhensible : "Le problème de la surconsommation médicale doit être abordé sous l'angle de santé publique sur le bénéfice éventuel apporté, mais aussi sous l'angle économique et sur l'utilité sanitaire de la prise en charge du petit risque pour la solidarité nationale." C'est franchement pitoyable !

L'objectif visé par la mission est ensuite annoncé : "La mission d'information s'est attachée, dans un souci d'objectivité et de transparence, à étudier et approfondir le rôle des agences dans la politique du médicament, l'indépendance de l'information et de l'expertise, ainsi que l'efficacité des outils de sécurité sanitaire." L'étroitesse de l'objectif est inquiétante. L'absence de prise en compte des enjeux de santé publique qui devrait être éclairer l'analyse du fonctionnement des agences manque en particulier cruellement. On a plus l'impression d'un sujet de devoir bien sage pour des étudiants de sciences po, que d'un rapport parlementaire menant une réflexion politique au sens noble du terme !

Les agences et la politique de guichet ouvert en matière d'AMM

Le rapport commence par examiner le rôle des agences de santé dans la mise sur le marché des médicaments. La complexité de l'organisation des agences est notée et le fait que "Cette organisation n'est toutefois pas exempte de déficiences, tant en matière de transparence qu'en termes de coordination entre les différents acteurs de la politique du médicament."

Le rapport rappelle que l'AMM (autorisation de mise sur le marché) est du ressort de l'Afssaps et cerne rapidement les enjeux (sauf remarque contraire, tous les grassés des citations sont dans le texte d'origine - Les notes de bas de page ont été insérées entre crochet dans le texte) : "L'avis de la commission d'AMM est fondé sur l'évaluation du rapport bénéfice/risque du produit, c'est-à-dire de l'équilibre entre son efficacité, son innocuité et sa qualité. L'AMM n'est donc pas le résultat d'une évaluation comparative des médicaments d'une même classe thérapeutique ; elle constitue seulement une absence d'interdiction de commercialisation. Chaque année 5 % à 10 % des demandes d'AMM se soldent par un refus."

Autrement dit les sénateurs voient bien qu'on est confronté à une politique de "guichet ouvert" à l'entrée pour les nouveautés, avec très peu de refus de mise sur le marché, alors que nous le verrons par la suite, la réévaluation se fait selon des critères beaucoup plus sévères qui aboutissent souvent à une baisse du SMR voire au déremboursement des médicaments les plus anciens et les moins coûteux.

Le rapport donne ensuite un tableau brut des autorisations des médicaments de 1993 à 2004 qui faute d'explication et d'analyse quantitative et qualitative tombe un peu comme un cheveu sur la soupe.

La nouvelle Haute Autorité de santé et son rôle en matière d'évaluation

Suit un passage important sur l'organisation de l'évaluation du médicament que je donne donc intégralement compte tenu des modifications importantes intervenues récemment dans ce secteur :

"Le circuit complexe du remboursement

Pour qu'un médicament autorisé soit ensuite pris en charge par le système de protection sociale, il doit être inscrit sur une liste fixée par un arrêté du ministre chargé de la santé (article L. 5123-2 du code de la santé publique). Avant d'obtenir ce sésame, le médicament passe par une série d'étapes faisant intervenir différentes instances : la Haute Autorité de santé (HAS), le comité économique des produits de santé (CEPS) et l'union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam).

Créée par la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie et installée formellement le 1er janvier 2005, la HAS est une instance consultative et indépendante d'expertise scientifique. En matière de médicament, son rôle est d'éclairer les pouvoirs publics en matière de décision de remboursement en fonction du critère du service médical rendu au patient.

La HAS a repris notamment les missions de l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) et de la commission d'évaluation des produits et prestations (CEPP). Elle a également accueilli en son sein la commission de la transparence, rattachée auparavant à l'Afssaps." (...)

Au sein de la HAS "La commission d'évaluation des médicaments, qui intéresse le présent rapport, (...) est chargée d'évaluer les produits qui ont obtenu une AMM, lorsque le laboratoire qui les commercialise souhaite obtenir leur inscription sur la liste des médicaments remboursables.

Dans ce cadre, elle a plus spécifiquement pour missions de :

- donner un avis sur la prise en charge du médicament par la sécurité sociale et/ou son utilisation à l'hôpital ;

- contribuer au bon usage du produit en publiant une information scientifique indépendante sur sa place dans la stratégie thérapeutique et les résultats de l'évaluation de leur service médical rendu (SMR), ainsi que de l'amélioration qu'ils sont susceptibles d'apporter par rapport aux traitements déjà disponibles (amélioration du service médical rendu - ASMR). A cet égard, il convient de préciser que, désormais, l'évaluation du service rendu des produits est pratiquée par comparaison avec toute autre pratique médicale, et non plus seulement avec les autres médicaments.(...)

En outre, la HAS procède régulièrement à la réévaluation des produits déjà commercialisés afin de maintenir en cohérence la prise en charge des médicaments par la sécurité sociale et le progrès thérapeutique."

Il s'agit d'une réorganisation très importante car la création de l'HAS crée dans une certaine mesure un pôle d'expertise unifiée. Dans notre article "L'expertise santé à la française : L'AFSSAPS déclare que 840 médicaments ont un service médical rendu insuffisant", nous avions attaqué avec virulence l'indigence de la réévaluation des anciens médicaments faite par la Commission de la transparence (autrefois située à l'Afssaps et donc absorbée par la nouvelle HAS). Certaines de ces réévaluations avaient abouties en Conseil d'Etat qui avait confirmé la médiocrité des avis d'évaluation rendus (cf. notre article "Revirement de jurisprudence au Conseil d'Etat"). Ce scandale majeur de santé publique avait malheureusement été presque complètement étouffé par les médias dominants (toujours trop heureux de pouvoir rendre service aux gouvernements en place), néanmoins tout cela commençait à faire sérieusement tâche et le gouvernement a profité de la fin de mandat de la Commission de la transparence pour créer le HAS et lui faire refaire les avis des SMR les plus litigieux.

Malheureusement, le mal était largement fait et la réévaluation a surtout consisté à donner un habillage scientifique enfin présentable à certains SMR suivant un raisonnement qui, dans certains cas, ne nous convaint pas vraiment, par ex. pour ce qui est des produits pour l'insuffisance veineuse. Ces déremboursements sont très pénalisants pour des produits relativement efficaces, inoffensifs et pour lesquels il n'existe pas vraiment d'alternatives (cf. mon billet du 2/02/06). Par ailleurs l'HAS est également restée prisonnière des avis de SMR qui à l'inverse ont été surestimés par la Commission de la transparence pour beaucoup de produits. En effet l'HAS s'est contentée (si j'ai bien suivi et compris toutes les péripéties intervenues !) de réévaluer les classes de médicaments dont l'évaluation avait été contestée parce qu'ils donnaient lieu à déremboursement (les SMR dits insuffisants). Nous avions donné comme exemple de médicaments que nous considérions à l'opposé comme ayant des SMR surévalués des produits anticholestérols comme les statines et les fibrates (lire "Les statines en prévention primaire ?").

La réévaluation des médicaments et le Service Médical Rendu

Le rapport sénatorial propose un encart sur le sujet de la réévaluation des médicaments lancée en 1999 où, on s'en serait douté, aucun des problèmes que nous venons de rappeler ci-dessus ne figure.

Le rapport rappelle ensuite les différents niveau de SMR et la façon dont le SMR est lié au taux de remboursement. On peu lire que "Le SMR, comme l'ASMR, se mesure selon une échelle qui comporte cinq niveaux permettant de déterminer le taux de remboursement : I et II en cas de pathologie grave (65 % de prise en charge), III et IV (35 % de prise en charge) et V (pas de remboursement). Ainsi, si le SMR est insuffisant, le médicament ne doit pas être inscrit au titre des médicaments remboursables. Les critères d'évaluation sont de trois ordres : l'intérêt clinique, la commodité d'emploi et l'intérêt au regard de la santé publique."

La définition exacte du SMR est la suivante : Le SMR évalue le produit sur les critères suivants : efficacité, sécurité, caractère préventif, symptomatique ou curatif, gravité de l’affection et intérêt en terme de santé publique (Lire : S.M.R. & A.S.M.R. Informations sur le médicament - Attention les infos dans cette page sur les instances faisant les évaluations sont périmées). La gravité n'est donc en réalité qu'un critère parmi d'autres.

On voit déjà la confusion qui s'installe dans les esprits puisque la formulation du rapport "en cas de pathologie grave" pourrait donner à penser que tout médicament ayant une efficacité majeure ou mineure, bénéficiera d'un SMR I ou II et d'un remboursement à 65% s'il vise une pathologie réputée "grave" alors qu'un médicament très efficace pour une pathologie de moindre gravité ne pourra bénéficier au mieux que d'un taux de 35% (nous souhaitons au passage bon courage à ceux qui sont charger de dresser les listes distinguant les pathologies "graves" des "moins graves", auxquelles nous suggérons d'ajouter les "presque pas grave"). Je pense qu'il ne s'agit pas ici seulement d'une formulation flou et pas très heureuse du rédacteur mais que celle-ci résulte bien du fait que nous sommes au coeur du problème de l'évaluation des médicaments avec des confusions permanentes entre gravité de la pathologie et efficacité du médicament dont l'industrie pharmaceutique joue à plein pour faire prendre en charge des produits médiocres dans des pathologies très médiatisées et d'une confusion qu'elle contribue par ailleurs massivement à entretenir en créant ou au moins en déformant profondément la représentation des pathologies qu'elle prétend soulager (cholestérol élevé, définition de la dépression et de différents troubles de la personnalité par ex. parmi une multitude d'exemples possibles).

Quoi qu'il en soit l'évaluation du SMR et de l'ASMR est désormais entièrement entre les mains de l'HAS. Evidemment le problème se pose de savoir comment l'AMM peut être accordée de façon pertinente par l'Afssaps, sans avoir fait l'analyse préalable du SMR et de l'ASMR ! Deux tâches dévolues à l'Afssaps ne me semblent pas pouvoir être réalisées correctement sans ce préalable : 1) l'évaluation du rapport bénéfice/risque et 2) la rédaction des caractéristiques du produit (RCP) correspondant à l'usage recommandé pour les praticiens. Ce deuxième point serait à nuancer et on pourrait accepter qu'il soit de la compétence de l'Afssaps s'il est fait sur la base d'une évaluation approfondie préalable du produit par l'HAS en terme de SMR et d'ASMR.

Les discontinuités entre AMM, SMR/ AMSR et remboursement

C'est le premier hiatus, celui de la connexion entre le rôle de l'Afssaps et de l'HAS, qui n'échappe semble-t-il pas complètement aux sénateurs même s'il n'est pas formellement explicité.

Le deuxième hiatus mieux repéré résulte de la connexion entre l'HAS et le CEPS (Comité économique des produits de santé). En effet, "Une fois cette évaluation effectuée, l'avis de la HAS est transmis au CEPS pour la fixation du prix du médicament et à l'Uncam pour celle du taux de remboursement. Pour l'essentiel, ce dernier respecte le niveau de SMR défini par la commission d'évaluation des médicaments.

Concernant, en revanche, la fixation du prix par le CEPS qui doit, en principe découler du niveau d'ASMR , la Cour des comptes notait, dans son rapport au Parlement sur la sécurité sociale de septembre 2004, que « dans la pratique, les conséquences tirées du niveau d'ASMR dans la négociation du prix sont variables, voire incertaines. »

En effet, la fixation du prix par le CEPS dépend du résultat de la négociation entre cette instance et le laboratoire pharmaceutique. Toutefois, depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et l'accord Etat-industrie du 13 juin 2003, un système encadré s'applique pour les médicaments innovants (ASMR I et II) : le prix choisi par l'industrie s'applique immédiatement, sauf avis contraire du CEPS."

L'accord-cadre 2003-2006 entre le CEPS et les industriels du médicament, dont on a dit à l'époque qu'il était très favorable aux industriels, est consultable ici. Nous verrons dans la suite si les sénateurs ont des remarques à faire sur le respect des engagements pris par les industriels et s'ils ont des recommandations à faire pour le prochain accord. On pourrait par exemple confronter utilement la "Section III : Bon usage du médicament" de l'accord avec les remarques de la revue Prescrire sur les graves dérives de la communication publicitaire des industriels (p. 8/11) "L'année 2005 du médicament : La dérégulation s'accentue".

Suit un récapitulatif intéressant du circuit d'autorisation et de remboursement qui situe les différents intervenants. C'est l'occasion de présenter l'échelon européen avec l'EMEA (European Medicines Agency) et de faire un bref point sur l'harmonisation communautaire dans le domaine du médicament. Les rapporteurs pensent que le renforcement de la législation européenne en matière de médicaments a apporté des améliorations appréciables. Mais celles-ci sont selon nous relativement mineures et très formelles par rapport aux problèmes qui se posent dans la pratique pour la conduite de la politique de santé publique.

Le rôle de l'EMEA par rapport aux agences nationales

Le rapport explique ensuite la différence entre les procédures d'autorisation des médicaments (procédure centralisée via l'EMEA, par reconnaissance mutuelle ou la procédure nationale). Lire aussi la fiche de Prescrire sur le même sujet. Nous avons aussi évoqué la question de la procédure de reconnaissance mutuelle dans notre billet du 15/06 sur l'autorisation du Prozac (fluoxétine) pour les jeunes enfants. On regrettera que ne soit pas explicité le rôle que conserve l'Afssaps par rapport à celui de l'EMEA quand celle-ci a la responsabilité de l'évaluation d'un médicament dans le cadre de la procédure centralisée. S'agit-il d'un simple habillage de la décision de l'EMEA dans le système de procédure français ou d'un rôle un peu plus consistant ?

Une disposition très importante est rappelée par les rapporteurs (mon grassé) "la liste des motifs autorisant un Etat à retirer un médicament du marché a été complétée. La directive de 2001 prévoyait déjà trois cas : la non-conformité de la composition aux substances autorisées par la législation européenne, la nocivité dans les conditions normales d'emploi et le défaut d'effet thérapeutique. La directive de 2004 prévoit un quatrième motif : un rapport bénéfice-risque défavorable dans les conditions d'emploi autorisées."

Cela aurait par ex. autorisé (si les autorités de santé faisait leur travail) à refuser l'extension du Prozac pour les jeunes enfants. Notre billet précité propose d'ailleurs pour le Prozac un exemple d'argumentaire qui justifierait un retrait du marché pour rapport bénéfice-risque défavorable. La France n'a pas choisie cette voie de la rigueur.

D'autres pays peuvent cependant se montrer plus ferme, Prescrire (article précité p. 6/11) donne l'exemple de la suspension par la Finlande et l'Espagne du nimésulide malgré un avis positif de l'EMEA, cet anti-inflammatoire pouvant avoir des effets indésirables hépathiques graves. L'Afssaps a par contre suivie l'EMEA sur le même sujet (cf. communiqué). Il est vrai que dans le cas d'espèce il suffisait d'invoquer "la nocivité dans les conditions normales d'emploi" sans avoir besoin d'invoquer le rapport bénéfice - risque.

Par contre la notion de rapport bénéfice - risque ouvre probablement la voie pour les pays qui le souhaiteraient à une ambitieuse politique d'AMM fondée sur une vraie politique des autorisations fondée sur le SMR comparés des médicaments entre eux par rapport à leurs différentes cibles thérapeutiques ! Avec à la clé une réduction drastique des médicaments autorisés et de nombreux avantages en terme de santé publique. Bref tout ce que redoute les industriels de la pharmacie.

La (non) transposition de la directive européenne de 2004

Par ailleurs le rapport note "Cette réalisation ne doit pas masquer le fait que les Etats membres n'ont pas tous, loin s'en faut, achevé la transposition de ces nouvelles dispositions dans leur droit interne, et la France en premier lieu.

En effet, si les normes juridiques exposées dans le règlement 726/2004 précité sont d'application directe, certaines de ses dispositions ne pourront toutefois s'appliquer qu'après la transposition en droit interne de la directive 2004/27.

A ce jour, seule la nouvelle définition de l'AMM a été transposée par voie réglementaire, ainsi que la définition du médicament générique par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. On est loin de la transposition intégrale qui aurait due être achevée avant le 30 octobre 2005.

La mission d'information regrette ce retard, qui place une fois de plus la France dans les derniers rangs de l'Union européenne en matière de transposition des textes communautaires. Elle souhaite à cet égard l'adoption rapide, par le Parlement, du projet de loi d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament [Adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament, Assemblée nationale, n° 3062, mai 2006.] déposé à l'Assemblée nationale le 3 mai 2006."

Malgré cette autocritique pertinente le rapport oublie d'expliquer que les modalités de cette transposition outre son retard pose de sérieux problèmes que nous évoquions dans notre billet du 9/05/06 (la qualité juridique de la transposition proposée est particulièrement médiocre et pose problème)

L'EMEA sa structure et sa situation institutionnelle à clarifier vis à vis de la Commission Européenne

Le rapport évoque ensuite le problème récurent du rattachement, pour des raisons historiques, au niveau des services de la Commission Européenne de l'EMEA à la direction générale entreprises et industrie alors qu'il existe une DG santé et protection des consommateurs (lire la fiche de Prescrire). Le rapport apporte pour une fois des précisions utiles et que j'ignorais et des recommandations de bon sens en indiquant que la DG santé "est chargée des relations avec les laboratoires pharmaceutiques, au travers notamment de la fédération européenne des industries pharmaceutiques (EFPIA), et avec les associations de patients. Elle examine les sujets « santé publique » de la politique européenne du médicament ; c'est le cas, actuellement, du critère de la valeur thérapeutique ajoutée dans la décision d'AMM et du contrôle de la publicité.

Ce partage des responsabilités au sein de la Commission n'est pas toujours des plus efficace. Aussi, il conviendrait de réfléchir au rattachement de l'EMEA à la DG santé et protection des consommateurs. Ce choix, outre la simplification du système européen qu'il entraînerait, aurait l'avantage d'ancrer le fonctionnement de l'agence dans des problématiques de santé, plus que dans celles de l'industrie pharmaceutique."

Suit une description institutionnelle détaillée de l'EMEA.

Comparaison du système français avec le système belge et britannique

Le rapport s'intéresse ensuite au système d'organisation belge et britannique dans une visée comparative avec la France. Pour le système Belge le rapport indique que "Au final, si la Belgique a choisi une organisation monocéphale dans le domaine du médicament, ce qui la préserve du manque de coordination qui existe entre les différentes instances françaises, elle est confrontée aux mêmes difficultés pour ce qui concerne son indépendance vis-à-vis de l'industrie."

En ce qui concerne le cas britannique, le rapport évoque certaines opacités. Ainsi "Le PPRS contrôle les profits produits par les ventes réalisées au sein du NHS et fixe un seuil de gains (21 % actuellement) qui, en cas de dépassement de plus de 40 %, donne lieu à un retour de l'excédent dans les caisses du NHS ou à des baisses de prix pour l'année suivante. De même, un seuil inférieur de rentabilité assure à l'entreprise un minimum de retour sur ses dépenses. Les négociations individuelles avec les laboratoires sont confidentielles, ce qui a provoqué de nombreuses critiques sur le manque de transparence, notamment celles de la Chambre des Communes dans un récent rapport [The influence of the pharmaceutical industry. House of Commons, Health committee. Session 2004-2005]." A noter qu'en France des engagements similaires passés dans les accord-cadres avec les industriels n'ont fréquemment pas donné lieu à des rectifications de prix ou aux remboursements attendus. Lire par ex. le rapport de la Cours des comptes de 2001 (p. 51/67). Des engagements de prix et de volume de vente continuent à figurer dans les accord cadres français avec les entreprises (article 4 , engagements sur les prix et les volumes). Nous verrons dans la suite si le rapport a formulé des remarques sur le sujet.

Le rapport évoque ensuite le rôle du NICE (National Institute of Clinical Excellence) qui correspond à peu près à ce que pourrait devenir le HAS français : "Le NICE est un institut indépendant d'évaluation médico-économique créé en 1999, afin de produire des recommandations nationales pour améliorer la qualité des soins avec trois missions : fournir des évaluations médico-économiques sur les médicaments et traitements nouveaux ou existants ; produire des recommandations cliniques pour des maladies spécifiques et fournir des recommandations sur les procédures d'intervention utilisées dans le diagnostic ou le traitement. En avril 2005, le NICE et la health development agency, chargée de la promotion de la santé et de la prévention, ont fusionné, devenant ainsi une structure dont les compétences sont proches de celles de la HAS française."

En ce qui concerne le bilan du NICE le rapport indique qu' "Il convient néanmoins de noter que l'efficacité des recommandations du NICE pour changer les pratiques médicales est un sujet controversé. Une étude récente examinant leur impact sur les médecins suggère que leur suivi a été très varié. Il semble que les recommandations les mieux suivies soient celles soutenues par le corps médical, fondées sur des preuves scientifiques convaincantes et celles qui n'entraînent pas de dépenses supplémentaires, à moins que celles-ci ne soient couvertes par des budgets spécifiques." Ce bilan un peu aigre devrait pourtant surtout nous encourager a associer en France le corps médical aux mesures de changement dans les habitudes de prescription. Or cela sera beaucoup plus difficile en France qu'en Grande Bretagne ou les médecins sont fonctionnarisés et beaucoup moins sous la coupe multiforme des industriels, ce qui facilite évidemment énormément la mesure et l'indépendance dans la prescription. Suivent des critiques sur le système hospitalier dont on sait qu'il est sévèrement rationné en Grande Bretagne et où le rapport s'autorise notamment un diagnostic tout en nuance "les médicaments les moins chers étant systématiquement choisis au détriment de l'efficacité et de la qualité des soins". A lire avec circonspection quant on sait comment tant de nouveautés hors de prix sont poussées en France, bien trop souvent depuis l'hôpital et bien trop souvent au détriment de l'efficacité et de la sécurité des malades...

Nous poursuivrons bientôt notre lecture critique de la section suivante du rapport du Sénat.

J'espère ne pas avoir été trop long, avoir été suffisamment pédagogue et avoir su soutenu l'intérêt du lecteur tout au long de la lecture. Cette présentation détaillée du rapport est en effet l'occasion de présenter des d'éléments clés du système de soin français soumis à des évolutions récentes importantes émanant tant du niveau national qu'internatioal, en particulier européen.

(à suivre)

Mettre un lien vers ce billet :
http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#28_06_06

26 juin 2006 : Non au mercure dentaire

L'association "Non au mercure dentaire" oeuvre depuis 1998 avec courage et compétence dans le but d' "Informer le public sur les problèmes de santé occasionnés par les plombages dentaires au mercure et autres matériaux; mettre en relation et soutenir les victimes portant plainte pour empoisonnement; prendre contact avec les autorités françaises et européennes; coopérer avec les autres associations ayant le même but ; promouvoir des recherches indépendantes et une pluralité de l'expertise."

J'ai moi même adhéré épisodiquement à cette association au fil des années, sans connaître vraiment les personnalités dirigeantes, car l'association est située dans le Gard et je n'ai eu qu'une connaissance écrite de leurs activités. Je peux simplement témoigner de la qualité des informations adressées aux adhérents et du respect des règles de la vie associative (Réunion des AG, etc.).

On pourra lire pour se faire une première idée des problèmes de santé publique posés par les amalgames le Compte-rendu d’entretien du Docteur MELET Jean-Jacques à l'Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. Cela donne une bonne idée de la gravité du problème.

Le site donne différentes pages fort instructives. La page "Le débat" complète sur certains points le témoignage du regretté Dr Melet que nous venons de citer. Il y a pas mal de choses à lire pour ceux qui ne connaissent pas encore le sujet.

Malgré toutes les actions menées et certains soutiens politiques (plutôt personnels que collectifs) du côté des verts la situation reste totalement bloquée en France. Après différents rapports et actions semblant montrer une certaine évolution et la levée de l'omerta en France autour de l'année 2000, l'AFSSAPS semble avoir réussi a totalement verrouiller le dossier fin 2005, lire : "Ce qu'il faut savoir sur les amalgames dentaires". La liste des expertises, rapports, etc. de l'AFSSAPS se trouve à la page "Amalgames dentaires".

La seule évolution notable est la meilleure normalisation des amalgames en 2000 "Interdiction de certains amalgames dentaires" et des recommandations de manipulations plus prudentes faites aux dentistes. Par ailleurs il faut reconnaître que pas mal de dentistes commencent à éviter la pose de ces amalgames ou utilisent un autre matériau de restauration de la dent quand ils doivent faire une dépose. Les dentistes semblent aussi attentifs à la stabilité sur la dent des amalgames en place et font la dépose de ce qui pourrait diffuser le plus. La pose d'amalgames sous des couronnes semble désormais aussi une pratique d'un autre âge. C'est en tout cas ce que j'ai observé chez mon dentiste qui n'a pas l'air spécialement militant sur ce point mais qui semble un excellent professionnel qui applique le principe de précaution avec discernement. Maintenant quelle est la position de l'ensemble de la profession, c'est mystère et boulle de gomme...

En France, il est semble-il impossible d’obtenir des informations quantifiées du nombre d’obturations réalisées à l’aide d’amalgames. Selon l'AFSSAPS (in "Le mercure des amalgames dentaires", 2005, p. 14/103) "En France, il est difficile d’obtenir des informations parfaitement quantifiées quant au nombre d’obturations réalisées à l’aide d’amalgames." Cette langue de bois donne bien le ton du travail de l'AFSSAPS puisqu'en fait de données parfaitement quantifiées les seules données disponibles proviennent des déclarations de soins pour obturation faites sur les feuilles de sécu. Mais celles-ci ne précisent pas le produit utilisé pour l'obturation ! L'AFSSAPS estime donc de façon totalement arbitraire que "70 % des dents postérieures sont restaurées à l'amalgame" et ne dispose apparemment d'aucun autre indicateur lui permettant d'effectuer un recoupement sur la pertinence de ce pourcentage. Je suppose que dans la belle Europe du commerce sans frontière et sans contrainte, les fabricants ne sont astreints à aucune déclaration de vente de leurs amalgames en France. Cela m'a tout de même sidéré que l'on puisse ainsi faire circuler et poser en bouche, pratiquement sans contrainte ni déclaration, tant au niveau des grossistes que des dentistes des produits médicaux hautement toxiques pour l'environnement et la santé.

Un autre problème est l'hétérogénéité matériologique qui semble très forte des amalgames. Dans sa section "Question - réponse" l'AFSSAPS veut nous rassurer en disant que "Les amalgames actuellement commercialisés sont dits "non gamma 2" et présentent des caractéristiques plus intéressantes que les "gamma 2" dans le domaine de la résistance à la corrosion et de la résistance mécanique." C'est beau comme une pub de fabricant d'amalgame, mais comment a-t-on évalué scientifiquement cette amélioration ? Mystère... La lecture du rapport 2005 précité (p. 11 et suivantes "Composition des amalgames") semble indiquer que les fabricants ont des marges de composition très importantes sur la répartition en % de différents matériaux (Argent - Etain - Cuivre - Mercure), d'autant qu' "Il est possible pour les fabricants de procéder à des adjonctions d’éléments tels que l’indium, le platine, le palladium, le zirconium, le fluor.."excusez du peu...

La variété de composition minérale des amalgames outre qu'elle met en évicence l'absence quasi totale de normalisation, de contrôle de toxicité et d'encadrement des pratiques matériologiques est par ailleurs à l'origine de micro-courants entre les dents soignés avec des amalagames qui favorisent massivement les relargages des minéraux sur la longue période. Et bien sur les couronnes aggravent encore le phénomène.

Tous les rapports sur lesquels s'appuient l'AFSSAPS sont parsemés de perles que les rédacteurs s'efforcent d'isoler de diluer et dont ils se gardent de tirer les conséquences, alors que mises ensemble toutes ces données scientifiques forment un tout cohérent et qui fait froid dans le dos. Mais ainsi va "l'expertise à la française". Exemples de perles "Académie Nationale de médecine 2003" (p. 7/12) "Certains auteurs se sont plus spécialement intéressés à la teneur en mercure de l'air de la cavité buccale en raison de la volatilité relativement importante du mercure à la température corporelle, et de son excellent taux de pénétration pulmonaire (˜ 100%)" ou (p. 8/12) le passage qui dédouane le mercure dans la résistance aux antibiotiques laisse fuiter une information clé sur la stabilité des amalgames : "Leur conclusion fut que la quantité de mercure retrouvée dans les selles (13 fois plus élevée dans le groupe des porteurs d'amalgames que dans le groupe témoin)." ou (p. 10/12) sur le sujet de l'incinération post mortem des porteurs d'amalgames "On estime qu’une crémation peut libérer en moyenne jusqu’à 3,5 grammes de mercure et la Suède évalue les rejets de mercure liés à cette pratique courante dans ce pays, à 280 kilos par an, soit le tiers du total de ses émissions ! En France, on peut estimer ce rejet à environ 200 kilos par an pour 100000 crémations."

Sur ce dernier sujet et comme l'explique un rapport sur le sujet du Sénat rendu en 2001 "Les effets des métaux lourds sur l'environnement et la santé" qui se penche sur cette question délicate de l'incinération et du rejet de mercure on appréciera le passage dont le ton est inhabituellement désabusé et ironique "A notre connaissance, aucune étude de ce type n'a été effectuée en France. Pour un motif simple : les crématoriums respectent la réglementation. Et puisque la réglementation ne prévoit rien sur ce sujet. Alors... inutile de s'alarmer." La réglementation a-t-elle évoluée depuis ? Je ne saurais le dire, mais si cela a été le cas nos incinérateurs ont été mis aux normes avec une extraordinaire discrétion...

Pour l'instant et conséquence du blocage complet en France sur les amalgames on attend plutôt le salut de l'étranger.

Selon l'AFSSAPS à la question "Les amalgames dentaires sont-ils interdits dans certains pays ?", il faudrait répondre "Les amalgames dentaires sont disponibles et employés dans tous les pays du monde. Leur utilisation ne fait l'objet d'aucune interdiction formelle. Cependant, l'Allemagne, le Danemark, la Norvège et la Suède ont pris des dispositions qui limitent leur utilisation. Les recommandations sont globalement les mêmes, les contre-indications d'usage concernent les femmes enceintes ou qui allaitent, les enfants et les patients souffrant de troubles rénaux. Par ailleurs, l'encouragement à la réduction de l'utilisation des amalgames en Norvège et leur déremboursement en Suède sont surtout motivés par la protection de l'environnement."

En ce qui concerne la réalité de la situation en Suède : Les raisons environnementales ne sont qu'un des aspects. La volonté d'interdiction résulte de problèmes de santé directement liés à la présence des amalgames. Le texte de l'AFSSAPS précité ne reflète pas honnêtement la position officielle suédoise qu'on peut lire ici en anglais [mes traductions] : (p. 25/33) "L'exposition la plus basse, en terme de sécrétion urinaire de mercure, qui a permis de mettre en évidence un effet toxique est tombée de 30.50 µg/l à 10.25 µg/l. En accord avec ces données, la marge de sécurité que l'on pensait exister par rapport à l'exposition au mercure des amalgames n'existe plus".

Autrement dit au vu des études sur le relargage mercuriel spontané constaté sur les amalgames, ceux-ci ne sont pas compatibles avec les données de sécurité récentes sur les limites de toxicité des apports en mercure. Les suédois ont utilisé plus d'études que les français pour se prononcer et les ont interprété de façon différentes. Il est vrai que leur experts sont de très haut niveau international et qu'ils peuvent réaliser leur expertise sans avoir le regard fixé avec épouvante sur les conséquences économiques éventuelles de leur préconisations. Une situation assez différente de celle qui prévaut en France.

Au final les experts ont notamment tenu compte de ce que : (idem) "En référence au fait que le mercure est une toxine multipotente avec des effets sur plusieurs niveaux de la dynamique biochimique de la cellule, l'amalgame doit être considéré comme un matériau impropre à la restauration dentaire. Ceci est d'autant plus valide que des alternatives complètement adéquates et moins toxiques sont disponibles."

Les suédois ne veulent plus d'amalgames au mercure c'est pourquoi le soin est déremboursé et non interdit comme il l'auraient souhaité faute d'avoir pu obtenir une interdiction européenne, suite à l'obstruction de pays comme la France. Mais avec le déremboursement et les consignes de non utilisation données aux dentistes, le résultat et le même qu'une interdiction. De plus la Suède semble vouloir faire un pas supplémentaire en avant en 2007 vers l'interdiction totale. Ces précisions permettront j'espère au lecteur de se faire une idée sur la confiance qu'il faut avoir dans les déclarations de l'AFSSAPS. La Suède et d'autres pays exerce par ailleurs une pression constante au niveau de la Commission européenne et du Parlement Européen. Il est probable que la question va redevenir d'actualité sous peu.

En attendant vous pouvez soutenir au niveau français "Non au mercure dentaire" par un don ou une adhésion.

Mettre un lien vers ce billet :
http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#26_06_06

18 juin 2006 : Biphosphonates et nécroses osseuses

Les biphosphonates (ou diphosphonates) sont des inhibiteurs de la résorption osseuse. Ils bloquent l'activité des ostéoclastes et limitent ainsi la destruction de l'os. La construction de l'os est elle du ressort des ostéoblastes. Le remodelage osseux, est lié au fonctionnement coordonné et efficace des ostéoclastes et des ostéoblastes. En renouvelant l'os en permanence, ce remodelage permet à l'os de rester solide et résistant dans la durée. En bloquant les ostéoblastes par les biphosphonates on génére deux problèmes liés. Le premier problème concerne la qualité de l'os. Au bout d'un certain temps d'utilisation, on constate que le tissu osseux est en moyenne fait d'un matériau plus ancien et de moins bonne qualité qu'un tissu osseux normal. Le second problème, conséquence du premier, est que l'os devient plus fragile et cassant du fait de la baisse de qualité du tissu osseux. Dans ces condition l'efficacité de ces médicaments et les indications de leur prescription fait débat de longue date. Le bon sens plaide pour des indications bien circonscrites et strictement limitées et pour la recherche d'alternatives notamment par la nutrition et la supplémentation nutritionnelle (lire par ex. notre billet du 10/06). Malheureusement ces approches "alternatives" sont très mal vues par la médecine actuelle. Et on assiste aux dérives habituelles des indications et des prescriptions sous la pression constante de l'industrie pharmaceutique.

Le 26/02/06 nous proposions un billet sur le "Bulletins d'information médicale indépendants : le BIP - Le BIP et le strontium" et le 3/03/06 sur "le Strontium et la santé de l'os".

Ayant la santé de l'os en tête en écrivant ses billets, nous avions noté, à l'occasion de la lecture du BIP d'octobre 2005 dans les brèves de pharmacovigilance de cette revue celle portant sur les "Biphosphonates et nécrose de la mâchoire" (p. 5/5). Les molécules qui étaient citées Zometa® et l'Aredia® sont réservés à l'utilisation en intraveineuse dans des cas de métastases osseuses entraînant une ostéolyse (perte rapide de tissu osseux). Le développement des métastases dans l'os à tendance à activer la destruction osseuse. La structure du tissu osseux devient plus fragile et fine, et il y a augmentation du risque de fractures. Lorsque ce processus est très actif au niveau des os, il peut arriver qu'on constate un excès de calcium dans le sang, c'est l'hypercalcémie qui peut provoquer des symptômes divers de gravité variable. En cas de métastatse osseuse on a donc tendance à donner des biphosphonates pour bloquer la destruction de l'os et la propagation de la tumeur (lire cet article de Pierre Fargeot). Suite à ce type de traitement des problèmes ont été observé chez certains patients traités à l'occasion de soins dentaires. Cela a amené l'agence canadienne de santé à lancer une mise en garde de sécurité fin 2004 (selon Pharmacorama).

La question en suspens suite à la découverte de cet effet secondaire grave est de savoir quelle est la fréquence de ces effets secondaires et de savoir également si le problème pourrait concerner les personnes soignées avec d'autres gammes de biphosphonates pour l'ostéoporose, car nous serions alors confrontés à un problème de santé publique d'une tout autre ampleur que le traitement des seuls patients atteints de métastases osseuses ! J'avais gardé ce court texte dans un coin de ma mémoire et il vient d'être réactivé.

En effet, le site du Dr. Mercola (notre présentation) vient de mettre en ligne une page sur cette importante question. Mercola cite l'article "Drug for Bones Is Newly Linked to Jaw Disease" [Un médicament pour les os fait apparaître un lien nouvellement découvert avec une maladie de la machoire] de Gina Kolata du New York Times.

En ce qui concerne les personnes soignées pour cancer, les personnes concernées par la nécrose de la machoire semblent déjà plus nombreuses qu'on aurait pu l'imaginer (ma traduction) "On estime que parmi les 500,000 patients cancéreux américains qui ont pris ces médicaments parce que leur maladie affecte leurs os de 1 à 10 % pourraient développer le problème." On voit l'incertitude des données et l'importance de la fourchette haute possible de l'estimation. Précisons aussi que selon un des meilleurs spécialistes du sujet, le Dr. Sook-Bin Woo, de l'école de médecine dentaire de Havard, la fourchette la plus probable serait en réalité de 6 à 10% !

Pour l'ostéoporose, on n'a pour l'instant aucune donnée fiable sur le risque. Cela vient probablement de ce que le risque est à priori nettement plus faible. Nénamoins des cas de nécroses de patients traités pour ostéoporose ont été également formellement identifiés et comme les personnes qui prennent des biphosphonates sont beaucoup plus nombreuses que celles qui en prennent pour un cancer on risque d'être confronté à un vrai problème de santé publique.

Les hôpitaux spécialisés en chirurgie de la machoire reçoivent désormais de très nombreux patients concernés par des nécroses de la mâchoire qui commencement souvent à l'occasion d'une extraction dentaire qui ne cicatrise pas et dégénère. La pathologie s'annonce comme un chemin de croix pour la plupart des personnes concernés. Il n'existe pas encore de traitement de référence et les opérations chirugicales outre qu'elles peuvent être très invalidantes donnent des résultats médiocres. La nécrose a tendance a redémarrer faute de tissu sain disponible. Il semble que cela soit un effet du blocage des ostéoclastes par les biphosphonates qui bloquent le remodelage osseux de la machoire. Le problème au niveau de l'extraction dentaire semble donc toucher de très larges sections du tissu osseux. Dans la stratégie de soin des nécroses, le retrait des biphosphonates se révèle quasiment sans efficacité à court et moyen terme, car la demi-vie de ces produits est très longue. On s'oriente aussi vers des antibiothérapies de longue durée qui pourraient devenir les traitements de référence de première intention.

Selon l'article "L'ostéonécrose et autres effets indésirables du traitement par les biphosphonates", les cas rencontrés sont très nombreux dans tous les pays et les articles publiés sur la question s'accumulent. En conclusion et reprenant des remarques faites par les auteurs de différents articles de référence sur la question les auteurs évoquent "une véritable future épidémie" ou une "bombe à retardement". Pas vraiment rassurant...

Il est tentant de mettre en parallèle cette abondance de cas et de publications avec la discrétion de l'AFSSAPS. Alors que l'agence canadienne réagit dès la fin de 2004 et que l'on trouve dès cette époque des informations pertinentes émanant de centres régionaux de pharmacovigilance (Nice par ex.), il faudra attendre juillet 2005 pour lire de la part de l'AFSSAPS une Lettre aux prescripteurs sur la question. La lecture montre que l'AFSSAPS assure le service minimum dans le cadre d'une harmonisation internationale portant sur les effets indésirables de certains bisphosphonates dont elle n'est visiblement pas eu l'initiative.

On trouve à peu près les mêmes informations dans le bulletin "Vigilances" d'Octobre 2005. L'AFSSAPS indique que "Dans ce contexte, il est recommandé de pratiquer un examen dentaire avec des soins dentaires préventifs avant l'instauration d'un traitement par biphosphonates chez des patients présentant des facteurs de risque associés (par exemple : cancer, chimiothérapie, corticoïdes ou mauvaise hygiène buccale), et d'éviter dans la mesure du possible toute intervention dentaire invasive au cours du traitement. Pour les patients qui développent une ostéonécrose de la mâchoire au cours d'un traitement par biphosphonates, une chirurgie dentaire peut aggraver cette atteinte."

Ces deux publications évoquent pour introduire le sujet que "De rares cas d'ostéonécrose (principalement de la mâchoire) ont été rapportés chez les patients traités par des bisphosphonates." On ne peut pas dire que cette mise en garde corresponde à l'état des connaissances scientifiques de juillet 2005 où l'on sait déjà que les cas signalés sont relativement nombreux dans tous les pays. Les deux documents de l'AFSSAPS évoquent seulement le Zometa® et l'Aredia® dans le cadre de traitements anticancéreux alors que l'on sait déjà à cette date avec certitude que d'autres classes de produits sont concernées dans une moindre proportion.

Mais pour décoder les intentions de l'AFSSAPS, il faut faire une véritable exégèse du texte, comme si on lisait un communiqué diplomatique alambiqué, alors que ce type de publication devrait donner, chaque fois que c'est possible, aux praticiens débordés des consignes claires et sans ambiguïté facilement transposable dans leur pratique médicale. Or on parle d'abord de médicaments de cancérologie, ce qui donne à penser que le risque est limité aux patients traités par ces produits. Pourtant on donne ensuite le conseil de contrôles dentaires préventifs avant traitement par les biphosphonates, ce qui donne cette fois à penser que toutes les classes de produits sont concernés, et il semble donc s'agir d'une recommandation qui vise cette fois une population beaucoup plus large que les patients cancéreux (on parle en effet de patients présentant des "facteurs de risques associés" et plus seulement du cancer) et on peut alors en déduire que les biphosphonates concernés ne se réduisent pas au Zometa et de l'Aredia puisque dans le cas des personnes non cancéreuses les biphosphonates seront d'une classe thérapeutique différente. Mais aucune donnée de pharmacovigilance pour ces autres produits n'est donnée par l'AFSSAPS alors que celles-ci existent bien à l'époque au niveau international. Ainsi cette information clé "tous les biophosphonates sont concernés" , qui peut être inférée du texte, n'est pas donnée explicitement ! Par ailleurs les patients apprécieront l'allusion franchement injurieuse de l'AFSSA à la "mauvaise hygiène dentaire" alors que les personnes concernées sont en réalité toutes celles qui ont de mauvaises dents et / ou de mauvaises gencives, soit en pratique une bonne partie des personnes âgées, qui constituent le public cible visé par les biphosphonates pour l'ostéoporose... Mais faute de critères précis en matière de santé dentaire, le prescripteur sera bien en peine d'en déduire une stratégie thérapeutique claire...

Selon l'article déjà cité "L'ostéonécrose et autres effets indésirables du traitement par les biphosphonates", "le processus d'ostéonécrose semble être cohérent avec une insuffisance vasculaire localisée. La résorption et le remodelage osseux jouent un rôle essentiel dans le maintien de l'homéostasie. Lorsque les ostéoclastes sont actifs, ils relarguent dans la matrice environnante des cytokines et des facteurs de croissance essentiels à la régulation de la formation osseuse. Ainsi l'inhibition de la formation d'os « neuf » pourrait affecter la qualité de l'os durant la croissance et la cicatrisation de fractures. Ainsi l'inhibition du remodelage osseux, par de fortes doses de biphosphonates, pourrait prédisposer les patients à cette complication quand l'os subi des demandes supplémentaires pour maintenir son intégrité (par exemple après une extraction dentaire)."Par ailleurs le texte explique que les biphosphonates pourraient avoir des profils de toxicité assez différents selon le type de molécule utilisée.

Tout cela n'est pas neuf. Le Dr Mercola dans la page que nous évoquions au début de ce billet rappelle qu'il mettait en garde contre les biphosphonates dès 1998 en disant du Fosamax [ma traduction] "qu'il s'agit d'un poison métabolique qui en réalité tue les ostéoclastes. Ce sont les cellules qui enlève l'os de façon à ce que les ostéblastes puisse le reconstruire. Il est bien clair que si vous tuez ces cellules votre os va devenir plus dense. Ce que les études ne montrent pas c'est que quatre ans plus tard l'os devient plus fragile même s'il est plus dense."

Parmi les conseils alternatifs, le Dr Mercola conseille " La progestérone qui est la seule substance que je connaisse qui est susceptible d'augmenter vraiment la solidité et la densité osseuse. Elle fait cela en servant de promoteur de croissance pour les ostéoblastes, les cellules qui construisent l'os. Bien sur, il serait avisé d'avoir les autres éléments essentiels disponibles tels que des niveaux adéquats de calcium, de zinc, de magnésium, de vitamine D et de cuivre, en complément d'exercice physique et en évitant les apports nuisibles pour l'os comme les sodas et le sucre."

Selon l'article récent du New York Times cité au début "La Food and Drug Administration est consciente du problème a déclaré Laura Alvey, une porte-parole, et à a demandé que toutes les notices des bisphosphonates révèle le lien avec l'ostéonecrose de la machoire."

Cette déclaration conforte on le voit tout à fait notre analyse précédente. Aux USA on semble beaucoup plus parler du problème parmi les professionnels qu'en France et de nombreux consommateurs américains semblent aussi commencer à être sensibilisés à la question et à manifester une légitime inquiétude. Et il commence à y avoir des articles dans les médias grand public. Comme d'habitude pour ce qui concerne la France, l'AFSSAPS va suivre la FDA avec retard, se gardant de toute initiative qui pourrait porter atteinte aux intérêts de l'industrie pharmaceutique.

Notre pays aurait pourtant dans ce domaine tout à fait les moyens d'une véritable politique de santé publique si des personnalités courageuses et aux idées claires étaient au commande de la santé publique. Les données disponibles auraient pu par exemple inciter à mener en concertation avec les dentistes des études de suivi des populations à risque. On aurait pu, si elles avaient été menées, disposer dans des délais raisonnables d'estimation fiables des risques par type de produits et conditions de prescription. On pourrait aussi lancer, avec des équipes pluridisciplinaires, des suivis de fractures et des complications survenues ailleurs qu'à la machoire chez les personnes traitées par les bisphosphonates.

Evidemment tout cela exige d'affronter courageusement les inquiétudes légitime du public, de revoir rapidement des conditions de prescription démesurément étendues de certains médicaments en réévaluant un bénéfice - risque de toute façon très médiocre dès l'origine, et donc peut être envisager de retirer du marché ces médicaments qui pourraient être réservés à des indications très ressérées en cancérologie. Mais cela suppose de prendre des mesures difficiles en reconnaissant dans le même temps, ce qui est souvent le plus difficile que beaucoup des décisions prises précédemment n'étaient pas dans l'intérêt du public...

Bref une politique de courage et de vérité tout simplement inimaginable dans notre pays où la corruption morale des élites du monde politique et de la haute administration est devenue la norme de toutes les procédures de décision.

Mettre un lien vers ce billet :
http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#18_06_06

16 juin 2006 : Titre de psychothérapeute - suite du dossier

Suite de notre billet du 12 de ce mois sur le même sujet. On sait que PsY en mouvement avait rendez-vous au cabinet du ministre de la santé pour connaître le contenu du décret sur le titre de psychothérapeute. Il semble se confirmer qu'après un projet de version très consensuelle du décret (quand même présentée par le ministre lui-même !) on en soit revenu, suite à des négociations et interventions particulièrement opaques, à une version très "antipsychothérapeutes" lesquels se verraient imposer des dispositions particulières et discriminatoires par rapport aux "psy" d'autres origines (psychologues, médecins qu'ils soient ou non psychiatres, psychanalystes) rendant très difficile l'accès au titre pour une majorité d'entre eux. Voici le communiqué de PsY en mouvement.

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Des soupirs au pire ...Compte rendu du 15 juin de la réunion au Ministère concernant la rédaction du décret relatif à l'Article 52 --- Posté le 15/06/2006

Une délégation de PsY en mouvement, composée de son président Bruno Dal-Palu, et deux vice-présidents Georges Didier et le Dr Jacques Fradin, a été reçu ce 15 juin 2006 à 11 heures par le Professeur Brunelle, Conseiller du Ministre de la santé, laquelle voulait le rencontrer de manière bilatérale d’une part pour lui exprimer nos réserves sur la réunion de l’après-midi multilatérale avec les organismes de psychanalyse (voir résumé ci-dessous), et d’autre part pour connaître la nouvelle version de décret.

Nous sommes sortis conscients que sur le plan technique le “dossier était plié”, que la balle était maintenant du côté des politiques. Très désabusés, nous avons eu le sentiment que pour des raisons juridiques de la lecture de l’Article 52, de peur d’être invalidé par le Conseil d’état, la version finale va vers une texte qui sera la plus éloignée de l’esprit du métier de psychothérapeute. Notamment il confirmera l’OPA, législative, en donnant le Titre de psychothérapeute aux médecins, aux psychologues, sans formation spécifique à psychopathologie et aux psychanalystes, en exigeant pour les psychothérapeutes que l’accès à leur Titre se fasse après une formation de niveau Master à l’Université. Voilà, ce que nous avons pu percevoir de ce que sera la version définitive du Décret. Ce n’est pas acceptable, pas seulement parce que nous ne voudrions pas de M.M. Douste Blazy, Accoyer, et aux autres élus-médecins dans notre mouvement, mais parce que le public ne pourra plus s’y retrouvé, entre les psychothérapeutes qui auront le titre mais pas la compétence, et ceux qui auront la compétence mais pas le titre. Par ailleurs, nous avons montré que dans ce cas la psychanalyse serait condamné, car le point de passage pour avoir le titre à moindre frais sera de faire une association de psychanalyse et de donner le double titre “psychanalyste-psychothérapeute”, qui sera alors l’équivalent de psy-charlatan.

Pour éviter cette dérive vers le pire, nous avons réitéré notre proposition d’amendement au texte du Ministre, qui permet d’établir un consensus entre les quatre composantes du “Champ psy”, par ailleurs nous avons expérimenté comme il nous l’avais demandé, en vraie grandeur, la faisabilité en réalisant un Registre national des psychothérapeutes, qui est cohérente avec ce texte, et nous avons déjà eu plus de 1200 inscrits en quelques semaines, sur notre site : www.psy-en-mouvement.com. Le Conseiller du Ministre nous a aimablement fait comprendre que nous arguments avaient leurs pertinences, mais qu’il fallait convaincre les politiques. Dans ce cas, notre organisation ne va pas rester sans réagir, et va organiser la riposte de la dernière chance...

Bien cordialement
Bruno DAL-PALU.

Ps : D’après nos informations, voici ci-dessous un résumé de la réunion de l’après-midi au ministère.

La réunion qui s'est tenue au ministère a commencé à 14h30 et s'est terminée à 16h30.
Elle a réuni outre les associations de psychanalyse suivantes :
- Fedepsy -Jean Richard Freymann
- Ecole Psychanalytique des Forums du Champ Lacanien - Luis Izcovitch (président)
- SPRF Société de recherche et de formation psychanalytique, scission du Quatrième groupe.- Dr Peran
- Ecole Freudienne - Robert Samacher et Jean-Michel Hervieu
- SIUEERP-A. Abelhauser
- Association de psychothérapie analytique (jungiens)
- Société Française de Psychanalyse Adlerienne- Dr Serge Kutek
- Société Psychanalytique de Paris
- Quatrième Groupe
- Association Freudienne Internationale
- Cercle freudien- Danièle Lévy
- École freudienne - Lilia Mahjoub
- Espace analytique - Jacques Sédat.

et les psychothérapeutes Ginger & Meignan.

Mr Brunelle a annoncé que cette rencontre était "celle des associations représentées" et que "le ministère souhaitait savoir si elles souhaitaient définir des critères concernant la profession de psychanalyste". D'après les informations disponibles publiquement à l'heure qu'il est, il semble que la réponse unanime des principales associations ait été : " pas de critère" . Il n'a pas été question de remise des annuaires des dites associations.

Concernant la rédaction du décret relatif à l'Article 52 : rien ne semble avoir été modifié - en l'état des informations disponibles.

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Gestion Santé : On comprend le désappointement de PsY en mouvement après tout le travail effectué. Il paraît tout de même très difficile d'un point de vue juridique de ne pas imposer les mêmes contraintes de formation aux psychanalystes qu'aux psychothérapeutes. Dans ce cas le décret risque, à mon avis, d'être cassé en Conseil d'Etat. Comme on dit le pire n'est jamais sûr et j'espère que le bon sens va reprendre le dessus au ministère de la santé. Il paraît quand même difficile que le ministre de la santé, après avoir personnellement présenté une version modérée du texte à tous les intervenants, se dédisent en validant un projet largement à l'opposé de ses propositions initiales.

A suivre....

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#16_06_06

15 juin 2006 : Dépression de l'enfant : du Prozac (fluoxétine) un peu de psy et faisons comme si l'alimentation n'existait pas

Du prozac pour les enfants : les digues cèdent sous la pression des labos...

Ces temps ci nous passons beaucoup de temps sur Gestion Santé à parler des médicaments pédiatriques. C'est dans ce contexte que j'ai vu passer des articles sur l'autorisation de la fluoxétine (la molécule active du Prozac) par l'agence européenne du médicament (l'EMEA). Selon Le Monde du 7/06/05 (article de Cécile Prieur), "Le 25 avril 2005, à la suite d'une polémique sur l'innocuité, chez l'enfant et l'adolescent, des antidépresseurs, soupçonnés de favoriser le passage à l'acte suicidaire, l'EMEA avait rappelé que ces médicaments sont déconseillés pour les moins de 18 ans et qu'ils ne doivent être qu'"exceptionnellement prescrits"."

Cela avait conduit en médecine hospitalière, d'après les échos que j'ai pu en avoir, à calmer le jeu, à revenir au principe de précaution, car les effets à long terme sur le développement du système nerveux des enfants de toute une gamme de médicaments agissant sur l'humeur semblent particulièrement mal connus. Cela ne peut que favoriser une approche pluridisciplinaire de la prise en charge des enfants allant dans le sens d'une utilisation plus tardive des médicaments.

Il faut savoir que ces médicaments (toute la classe des SSRI et des SNRI) étaient souvent prescrits chez l'enfant, et que l'EMEA a rappelé en 2005 qu'ils n'avaient pas d'autorisation pour cette cette population... On peut lire l'avis du 25/04/05 de l'EMEA (en anglais) qui reprend les conclusions d'une des branches de l'EMEA, le CHMP (Comité des médicaments à usage humain). Cet avis indiquait [ma traduction] "que des comportements suicidaires (tentative de suicides et pensées suicidaires), et d'hostilité (surtout des agressions, des comportements d'opposition et de la colère) étaient observés plus fréquemment dans les essais cliniques effectués sur les enfants et les adolescents traités avec ces antidépresseurs par rapport à ceux traités par placebo."

L'agence recommendait "l'inclusion d'avertissements majeurs [strong] dans l'ensemble de l'Union Européenne à destination des médecins et des parents sur ces risques. Les médecins et les parents seront aussi informés qu'ils ne doivent pas être utilisés chez les enfants et les adolescents à l'exception de leurs indications approuvées." Suivait le rappel d'indications de prescription très spécifiques (et distinctes de celle des adultes) de certains de ces produits pour les enfants.

On notera, détail révélateur, que le document que nous citons précise [Lire la section "Questions - Réponses" du même document] que ce n'est pas l'EMEA qui s'est autosaisie du problème mais la Commission Européenne qui a saisi l'EMEA ! Un bon indicateur d'autonomie et de pugnacité de l'agence européenne dans la défense de la santé publique...

On notera aussi (point 3 des Questions - Réponses) que le CHMP a procédé pour donner son avis 2005 a un examen complet de l'ensemble des études disponibles, de la littérature scientifique, des données épidémiologiques (études d'observation) et pris l'avis d'un collège d'experts spécialistes du sujet. Ce point n'est pas négligeable lorsque l'on apprend ce qui se passe un an plus tard où à la suite d'une étude express initiée par l'Angleterre, sur des données probablement quasiment identiques on s'apprête à autoriser la fluoxétine. En effet comme le rappelle Le Monde (précité), "A la demande du Royaume-Uni, l'EMEA s'est cependant vu soumettre, il y a quelques mois, une demande d'extension de l'autorisation du Prozac pour les enfants et les adolescents. La France ayant soulevé des objections en termes de sécurité, un arbitrage scientifique a été déclenché pour réévaluer le médicament à la lumière de nouvelles données cliniques."

Suite à l'arbitrage réalisé, "'L'Agence européenne des médicaments (EMEA) s'est déclarée favorable, mardi 6 juin, à l'utilisation de l'antidépresseur Prozac (fluoxétine) chez les enfants âgés de 8 ans et plus en cas d'épisodes dépressifs majeurs. Le comité scientifique de l'EMEA a considéré, le 1er juin, que "le bénéfice de l'utilisation de Prozac dans cette indication l'emporte sur les risques potentiels". Cette décision s'appliquera à tous les pays de l'Union et devrait entrer en vigueur en France à la fin de l'année." (Le Monde, précité).

Soulignons comme l'indique Le Monde que la France s'est montrée pour une fois moins laxiste que ses partenaires puisque c'est elle qui est à l'origine d'un arbitrage "sur la base d'incertitudes [unresolved concerns] portant sur la sécurité et l'efficacité" (Communiqué de presse EMEA du 6/06/06). En effet l'AFSSAPS française a initié depuis 2003, un resserrement des conditions de prescription des médicaments de cette catégorie (Communiqué de presse de l'AFSSAPS du 6/06/06). En fait la France a exercé son droit de refus dans le cadre de la procédure de reconnaissance mutuelle. C'est le refus de reconnaissance mutuelle par la France qui a déclenché l'arbitrage de l'EMEA. Il existe en effet deux procédures principales de reconnaissance des médicaments, la procédure centralisée la plus protectrice pour le consommateur et la reconnaissance mutuelle qui l'est moins puisqu'elle ne ne concerne pas l'EMEA si aucun Etat ne refuse la reconnaissance du médicament en invoquant des problèmes majeurs de sécurité et d'efficacité. Une description plus précise du champ d'application de la procédure européenne centralisée applicable depuis 2004 a été faite par la revue Prescrire.

En attendant allons plus avant dans l'examen de la sécurité et de l'efficacité de la fluoxétine, informations que vous ne trouverez ni dans l'article du Monde ni dans celui de Libération consacré au même sujet, ni bien sûr, dans le communiqué de l'AFSSAPS qui se contente de prendre acte de la décision...

Remarquons ainsi que le communiqué de presse de l'EMEA précité contient une précision particulièrement inquiétante "La signification des observations faites dans les études animales sur le développement sexuel, le comportement émotionnel et la toxicité testiculaire feront l'objet d'investigations complémentaires. Le MAH mettra aussi en place un système [sic] pour obtenir des données de sécurité sur les enfants traités, en particulier en ce qui concerne le développement sexuel".

En ce qui concerne les effets psychologiques on apprend dans le Sommaire des caractéristiques du produit que d'autres troubles psychologiques s'ajoutent aux troubles de l'humeur précités cités en 2005 (agressivité et risque suicidaires) "Dans les essais pédiatriques, la manie et l'hypomanie ont été fréquemment [commonly] rapportées (...). Aussi une surveillance régulière de l'apparition d'une manie/hypomanie est recommandée. La prise de fluoxetine devrait être interrompue pour tout patient entrant dans une phase maniaque" [L'hypomanie inaugure souvent le dérèglement de l'humeur, et annonce une aggravation maniaque ou une inversion dépressive de l'humeur]. Cet effet est noté chez 2,6 % des enfants traités versus 0% dans le groupe placebo. Cet intéressant résultat (et nous ne faisons pas une liste exhaustive des effets secondaires) ne figure pas dans le communiqué de presse de l'EMEA mais seulement dans le sommaire détaillé des caractéristiques du produit...

Par ailleurs, selon le même document, en ce qui concerne les enfants et les adolecents "La sécurité de la fluoxetine n'a pas été évaluée de façon systématique pour un traitement chronique de plus de 19 semaines." En fait cette durée ne concerne pas toutes les études (la plupart s'étant arrêté à 9 semaines, comme le précise d'ailleurs le le Sommaire des caractéristiques du produit). Des 19 semaines des effets secondaires préoccupant sont repérables comme une croissance plus faible de la taille et du poids qu'attendus (en sus des effets psychologiques susdécrits). La totalité des études (trois) prises en compte pour autoriser le produit porte sur 750 enfants (y compris donc les groupes placebo qui doivent faire environ 50% de l'effectif). Et ces 750 enfants regroupent les enfants proprement dits et les adolescents. Néanmoins le traitement est autorisé à partir de 8 ans... L'analyse des études n'est pas disponible par tranche d'âge. Vu la faiblesse de l'effectif et l'efficacité limitée du traitement, que nous allons examiner, il est probable qu'aucune donnée scientifique ne justifie la date de 8 ans pour initier le traitement plutôt que celle de 10 ou 12 ans, par exemple... D'autant que seulement deux études sur trois seulement permettent d'évaluer l'efficacité du traitement (lire ci-dessous) sans qu'on sache combien d'enfants elles ont étudiées.

Pour l'efficacité le Sommaire des caractéristiques du produit indique que pour les enfants "L'efficacité dans les essais de la fluoxetine pourrait dépendre de l'inclusion d'une population sélectionnée de patients (qui ne se serait pas rétablie spontanément dans une période de 3 à 5 semaines et dont la dépression persisterait malgré une attention soutenue ["considerable attention" (sic)]. Il n'existe que des données limitées sur la sécurité et l'efficacité à plus de 9 semaines. D'une façon générale, l'efficacité de la fluoxetine était modeste." [Nous donnons la suite du texte en anglais car une partie du vocabulaire statistique est trop technique pour nos modestes capacités de traducteur] "Response rates (the primary endpoint, defined as a 30% decrease in the CDRS-R score) demonstrated a statistically significant difference in one of the two pivotal studies (58% for fluoxetine versus 32% for placebo, P=0.013 and 65% for fluoxetine versus 54% for placebo, P=0.093). In these two studies the mean absolute changes in CDRS-R from baseline to endpoint were 20 for fluoxetine versus 11 for placebo, P=0.002 and 22 for fluoxetine versus 15 for placebo, P<0.001." [CDRS-R = Childhood Depression Rating Scale-Revised]

On voit que l'on passe de trois études à deux études "pivots" seulement, et que seule une de ces études est statistiquement démonstrative. Les enfants bénéficiaient-ils de la psychothérapie conseillée dans ce type de trouble et que recouvre exactement la "considerable attention" ?

Par ailleurs dans les essais cliniques de qualité portant sur la dépression de l'enfant on utilise outre le CDRS-R, deux autres tests, le Children's Depression Inventory (CDI) et le Clinical Global Impression (CGI). Le CGI a été mesuré mais le résultat n'est pas donné (pourquoi ?) et le CDI n'a semble-t-il pas été mesuré (pourquoi ?). Par ailleurs la décision de l'EMEA d'initier le traitement pour les "épisodes dépressifs modérés à sévères, si la dépression ne répond pas à une thérapie psychologique après 4 à 6 sessions." ne semble pas résulter d'une transposition évidente des études précités qui évoquent l'absence de rétablissement à 5 semaines sans qu'on connaisse le traitement d'accompagnement mis en place dans l'intervalle. Le délai de 4 à 6 sessions semble donc arbitraire et il aurait sans doute été préférable de préciser une durée de prise en charge sans amélioration.

Le communiqué de l'EMEA évoque une utilisation pour des "épisodes dépressifs modérés à sévères" et la fiche détaillée évoque elle des épisodes dépressifs majeurs pour les enfants et les adolescents, tandis que les études de validation ont inclus des MDD [major depressive disorder] "modérées ou sévères" ["patients met criteria for moderate to severe MDD" (sic)]. Apparemment dans le vocabulaire psychiatrique moderne tout cela rentre dans la même catégorie de "l'épisode dépressif majeur". Difficile de s'y retrouver et de savoir si le groupe présentait vraiment un type de dépression relativement homogène. Il faudrait qu'un spécialiste indépendant reprenne la ventilation du CDRS-R des études lors des différentes mesures de cet indicateur au cours du traitement. Des mots pompeux et des batteries de test peuvent masquer sous une illusion de scientificité une hétérogénéité importante de la population traitée.

On espère qu'en France le traitement ne pourra être initié qu'en milieu hospitalier, à défaut de quoi nous risquons d'aller vers un désastre de santé publique. Il est extrèmement inquiétant en tout cas d'apprendre que l'AFSSAPS puisse déclarer simultanément dans le même communiqué que "Dans la ligne des positions qu'elle a exprimées depuis 2003, l'Afssaps rappelle que le traitement de première intention de la dépression chez l'enfant et l'adolescent est la psychothérapie. Un traitement médicamenteux ne peut être envisagé qu'en association avec une psychothérapie et doit être accompagné d'une surveillance étroite du patient." et plus loin que "l'Afssaps a mis en place un groupe de travail sur les conditions d'utilisation réelle des antidépresseurs chez l'enfant et l'adolescent, dont les résultats seront prochainement communiqués." (Communiqué de presse de l'AFSSAPS du 6/06/06). Bref l'opacité semble à son comble...

Voilà en tout cas , cher lecteur, dans quelles conditions lamentables, avec les critères d'efficacité et de sécurité que nous venons d'examiner et dans la semaine qui a suivi le vote d'un nouveau règlement européen sensé assurer un niveau de protection exceptionnel pour les médicaments de nos enfants, est approuvée l'extension des indications de la fluoxétine aux enfants à partir de 8 ans. Chapeau mesdames messieurs de l'EMEA, nous sommes pleinement rassurés !

Et la nutrition et la supplémentation ?

On sait que à Gestion Santé nous plaidons pour une utilisation raisonnée de na nutrition et de la supplémentation nutritionnelle pour les troubles psychiatriques, en coordination avec d'autres approches bien entendu (psychologiques et sociales notamment), afin de limiter l'utilisation de médicaments ayant souvent de lourds effets secondaires. Nous ne nous satisfaisons donc pas du tout de ne voir évoquer que les médicaments ou la psychothérapie pour la prise en charge de l'enfant dépressif. L'enfant comme l'adulte est un être multidimensionnel et les conditions sociales, psychologiques, la nutrition, les loisirs, tout cela joue un rôle important sur la santé de l'enfant comme de l'adulte. En ce qui concerne la nutrition et la supplémentation nous avons déjà exposé nos idées sur la question, par exemple dans un billet du 15/02/06 en évoquant longuement le TDAH (trouble de déficit de l'attention avec hyperactivité) chez l'enfant.

Pratiquement au même moment ou nous découvrions l'extension de la prescription de la fluoxétine, nous prenions connaissance d'une étude parue dansAm J Psychiatry, Omega-3 treatment of childhood depression: a controlled, double-blind pilot study [Traitement de la dépression infantile des enfants par les omega-3 : une étude contrôlée en double aveugle]. Voici la traduction du résumé de l'étude :

OBJECTIF: Les désordres dépressifs majeurs chez les enfants pourraient être plus fréquents que l'on ne le pensait précédemment, et les thérapeutiques ne sont pas clairement identifiées. Du fait du succès d'une précédente étude étudiant l'effet des acides gras omega-3 dans des troubles dépressifs majeurs de l'adulte, les auteurs ont planifié une étude pilote sur les troubles dépressifs majeurs de l'enfant. METHODE : Les enfants entrant dans l'étude étaient d'un âge compris entre 6 et 12 ans. Des tests de mesure furent établis au démarrage et à 2, 4, 8, 12, et 16 semaines en utilisant le Children's Depression Rating Scale (CDRS), le Children's Depression Inventory (CDI), et le Clinical Global Impression (CGI). Les enfants ont été répartis au hasard entre un groupe recevant des acides gras omega-3 ou un placebo en traitement pharmacologique en monothérapie. 28 patients furent répartis et 20 ont été évalués pendant au moins un mois. RESULTATS: L'analyse de la variance a montré des effets hautement significatifs des omega-3 sur les symptômes en utilisant les CDRS, CDI, et CGI. CONCLUSIONS: Les acides gras Omega-3 pourraient avoir des effets thérapeutiques bénéfiques sur la dépression des enfants.

Certes l'étude est limitée en nombre d'enfants, mais le protocole de suivi est plus rigoureux en ce qui concerne les outils d'évaluation et l'effet thérapeutique plus net que pour la fluoxétine. Cette étude conforte aussi de nombreuses études épidémiologiques et thérapeutiques menées sur les omega-3 et la dépression.

Contrairement à la fluoxétine les effets secondaires consistent en des bénéfices positifs majeurs sur le développement du système nerveux de l'enfant qui est très lié aux apports en omega-3. Ce traitement pourrait être lié à d'autres approches de supplémentation agissant de façon synergique et sans aucun risque pour l'enfant.

Pourtant, malgré que l'on connaisse l'importance des omega-3 depuis longtemps, aucune étude sérieuse n'a été entreprise jusqu'à récemment du fait de cabales diverses et de la difficulté à financer de telles études sur des produits non brevetables : 1) d'une part les firmes ne s'y intéressent pas et au contraire tentent de les empêcher, 2) les spécialistes concernés sont souvent rémunérés à prix d'or pour tester les produits de big pharma, et ne sont donc pas "disponibles" pour les mener 3) il est très difficile de trouver des financements publics indépendants pour de telles études...

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#15_06_06

13 juin 2006 : Position du Collectif Europe et Médicament suite à l'adoption du règlement européen sur les médicaments pédiatriques

Ayant remarqué que le site du Collectif Europe et Médicament (Medicines in Europe Forum) hébergé par la revue Prescrire n'avait pas encore été mis à jour suite au vote du règlement (lire notre billet du 11 juin ci-dessous, ainsi que celui du 23/04/06), nous avons sollicité le CEM pour connaître sa position à l'issue du vote.

Pierre Chirac, de la revue Prescrire, nous a aimablement envoyé le communiqué du Collectif Europe et Médicament que nous reproduisons ci-dessous :

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Médicaments pédiatriques : on aurait pu mieux faire

Le Collectif Europe et Médicament salue l'adoption d'un Règlement européen destiné en principe à améliorer l'étude des médicaments chez les enfants, mais regrette ses importantes lacunes.

La proposition de Règlement européen sur les médicaments pédiatriques avancée par la Commission européenne en 2004 était centrée sur les intérêts des industriels, avant ceux des enfants. Les industriels y voient en effet surtout la possibilité de prolonger de 6 mois le monopole de commercialisation des médicaments pour lesquels ils financeront des études chez les enfants.

Malgré la forte pression exercée par les firmes pharmaceutiques et leurs alliés, le texte a été amélioré en première lecture au Parlement européen, grâce notamment à l'intervention du Collectif Europe et Médicament. Le Collectif Europe et Médicament regrette cependant que certains des amendements votés en première en lecture par le Parlement, en matière notamment d'identification des besoins des enfants, de transparence des procédures, de raccourcissement des délais, et de plus grande attention portée à la pharmacovigilance, n'aient pas été finalement retenus dans le Règlement adopté aujourd'hui par le Parlement et le Conseil européens.

Au total, ce Règlement ne va pas au bout de la logique de l'intérêt des enfants, comme le montre par exemple le fait qu'incitations et récompenses pour les firmes restent déconnectées du progrès thérapeutique apporté aux enfants, et du coût réel des recherches mises en œuvre.


Le Collectif Europe et Médicament
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Commentaire de Gestion Santé : On voit que, après le vote en 2e lecture du parlement, les points négatifs restent nombreux tant sur le fond et les principes tels que l'identification préalable des besoins des enfants pour piloter utilement la recherche les concernant, que sur la mise en oeuvre des actions qui fait la part belle au privé et enfin pour ce qui est du contrôle de la sécurité des produits, la pharmacovigilance restant insuffisante... Il semblerait ainsi que certains amendements proposés par le CEM pour la deuxième lecture n'ait pas été retenus.

Comme souvent le positionnement ultralibéral de la Commission Européenne initiatrice des directives (les projets de règlement) est confortée par le Conseil de l’Union européenne, en l'occurence les ministres de la santé des Etats concernés, qui exercent le pouvoir législatif en codécision avec le Parlement Européen, cela bien qu'ils représentent les exécutifs nationaux (Cf. graphique de la procédure de codécision). Il est en effet rare qu'un ministre "éclairé" (il en existe) de tel ou tel pays présent réussisse à infléchir les positions de ses collègues et les amène à se dissocier de l'agenda ultralibéral de la Commission.

Face à ce torrent ultralibéral, qui défigure tous les projets initiés par la Commission, le Parlement actuellement contrôlé depuis 1999 par le PPE-DE, alliance de partis conservateurs (ce qui ne les rend pas toujours très sensible aux actions de défense de l'intérêt général), reste néanmoins quasiment le seul lieu ou les citoyens peuvent espérer contruire une action à direction de leurs représentants élus et contrer, dans une certaine mesure, le poids des multinationales avec des succès souvent mitigés mais quand même bien réels. Le résultat sera d'autant plus marqué que les citoyens seront informés des enjeux et sauront se mobiliser et s'organiser pour faire valoir leur point de vue aux élus européens.

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#13_06_06

12 juin 2006 : Alerte de PsY en mouvement sur le projet de décret sur le titre de psychothérapeute

Les lecteurs anciens et fidèles de Gestion Santé savent que nous suivons attentivement (Rubrique Actualité psychothérapie) depuis fin 2003 les projets de législation concernant le titre et la pratique de la psychothérapie en France. Nos positions sont celles d'un libre exercice par des professionnels bien formés via des filières publiques ET privées permettant de mettre à disposition du public un large éventail de techniques psychothérapeutiques. Tout le contraire du projet initial du gouvernement qui avait été à l'origine de notre long article de novembre 2003 sur cette question. Suite à une large mobilisation des acteurs concernés, la loi votée le 30 juillet 2004 avait été heureusement, sinon acceptable, du moins avait renoncé aux dispositions liberticides du projet initial.

Depuis 2004 nous nous contentons de suivre le travail des professionnels concernés notamment via PsY en mouvement mené par Bruno Dal-Palu, dont j'apprécie la fermeté sur le fond et les principes, et le pragmatisme et la ténacité dans la conduite des négociations avec les autorités compétentes pour la finalisation d'un décret d'application de la loi, décret dont la rédaction définitive est l'enjeu du moment. Nous avons traité de l'avancé de ces discussions souvent très difficiles dans nos billets du 7/12/05 et du 13/04/06.

Psy en mouvement pensait être sur le point de conclure les négociations avec les autres partenaires et d'aboutir à un texte de décret satisfaisant. On pourra lire à ce sujet la news optimiste du 07/04/2006 de PsY en mouvement qui suggérait seulement quelques ultimes aménagements au ministre (lire aussi la news du 19/04/06).

Mais apparemment tout est apparemment à nouveau remis en question suite à l'intervention de différents groupes de pression qui ont amplement démontré depuis 2003 leur capacité de nuisance (lire sur Psy en mouvement la news du 12/06/06). Extraits :

Après un combat acharné des psys, unis contre l'Amendement Accoyer qui a abouti à l'Article 52, sur l'usage du Titre de psychothérapeute, voici qu'au cours de la négociation, organisée par le Ministère de la Santé, pour rédiger dans la concertation le Décret d'application, cette frêle construction craque de toutes parts sous les coups de boutoirs de certains groupes de pression.
(...) Dès lors, qu' existe un texte de Décret qui respecte la pratique de la psychothérapie en France, la pluralité des approches et des formations et obtenant un certain consensus de la part d'une majorité d'organisations, il convient maintenant qu'il soit présenté pour avis au Conseil d'Etat afin qu'il statue sur sa légitimité réglementaire et qu'on en finisse sur ces tergiversations.

Toutefois des informations nous montrent que des forces étroitement corporatistes oeuvrent pour abattre cette construction et cherchent à revenir à l'esprit "toqué" de l'amendement Accoyer.

C'est pourquoi nous avons demandé à être reçu, à nouveau par le Conseiller du Ministre, le Professeur Brunelle, qui a accepté.

(...) Nous avons aussi demandé à être également invité l'après-midi [du 15 juin], par le même conseiller, au cours de la réunion qui regroupe les organismes de psychanalystes, pour évoquer les problèmes de l'article 2. Notre organisation ayant attiré l'attention du Ministre sur les dangers de cette disposition et aussi, parce que nous comptons un bon nombre de psychanalystes parmi nous, nous revendiquons aussi notre place, dans ce débat. (...)

Quel est l'objet de la réunion du 15 juin avec les psychanalystes évoquée à la fin ? Elle a pour origine la question d'exigences de formations différentes entre psychanalystes et psychothérapeutes, les premiers pouvant se contenter d'attester de leur adhésion à une société de psychanalyse tandis que les psychothérapeutes devraient satisfaire à un niveau universitaire de formation en psychopathologie.

Il semble que le ministère ne souhaite pas, en l'état actuel des négociations, retenir les propositions aussi simples qu'élégantes de PsY en mouvement qui proposait de modifier le projet de texte de décret à sa Section 1 - article 2 en rajoutant "Pour les psychanalystes, l'attestation de l'inscription à un annuaire d'association de psychanalystes ainsi que l’attestation de formation à la psychopathologique clinique visée à l’article 6." Cette disposition hamonisait les dispositions applicables aux psychanalystes et aux psychothérapeutes. En effet comme la délégation de PsY en mouvement le signalait lors de la réunion de présentation du décret du 7/04/06 "Notre délégation a aussi exprimé au Ministre sa crainte, d’un déplacement de symptôme, si le Titre était obtenu de droit aux psychanalystes seulement inscrits sur un annuaire d’association, car dans ce cas, nous risquerions d’assister à une inévitable prolifération d’associations de psychanalyse, pouvant abriter nombres de charlatans qui chercheraient à avoir la double compétence professionnelle par ce bais à moindre frais, avec en prime comme effet pervers de discréditer la psychanalyse. Or, à cette remarque nous n’avons eu pour toute réponse qu’un silence pesant du Ministre, alors que notre argument fut pourtant repris plusieurs fois par nos collègues."

Au lieu de retenir cette solution très simple d'une modification mineure du décret, le ministère semble vouloir définir des critères de reconnaissance par l'Etat des associations psychanalytiques (plutôt que de demander une attentation de formation à la psychopathologie) et que cela constituerait l'objet de la réunion du 15/06. Elisabeth Roudinesco, dont on sait que ses positions se sont beaucoup rapprochées de celles des psychothérapeutes, s'est fort inquiétée de cette initiative et des conditions dans laquelle elle se déroule. La lettre de ER donne une idée de l'impasse dans lequel le ministère risque de s'engager en voulant définir des critères de reconnaissance par l'Etat de certaines associations de psychanalystes...

Et cela n'est probablement qu'un des aspects de la remise en cause du décret, dont on ne peut exclure qu'il soit attaqué sur d'autres aspects qui faisaient pourtant consensus et avaient apaisé les inquiétudes de tous les protagonistes de bonne foi impliqués dans les négociations en cours avec le ministère de la santé.

A suivre...

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#12_06_06

11 juin 2006 : Omerta générale des médias dominants sur le travail du Collectif Europe et Médicament

Nous avons traité en détail et à plusieurs reprises depuis 2003 de l'excellent travail du Collectif Europe et Médicament (Medicines in Europe Forum pour les anglophones) qui mène notamment des actions de sensibilisation utiles et efficaces auprès des parlementaires européens amenés à examiner depuis quelques années de nombreux textes actualisant le droit européen du médicament. On pourra notamment lire notre présentation du Collectif Europe et Médicament qui est hébergé par la revue Prescrire pour sa partie française. Le 23/04/06 nous faisions une longue mise au point de l'action du Collectif et en particulier celle concernant la directive sur les médicaments pédiatriques. Le 9/05/06 un autre long billet de Gestion Santé portait sur les vives inquiétudes soulevées par le projet de transposition en droit français de la très importante directive 2004/27CE sur le médicament.

Au tout début du mois de juin j'ai pu lire que l'adoption définitive du réglement avait eu lieu le 1er juin 2006. La directive devient un règlement une fois adoptée, et c'est la Commission Européenne qui est à l'origine des propositions de règlement qui sont soumises au parlement européen. Pour un historique du projet on pourra se rapporter à nos billets précités et au site de Prescrire ou aller sur le site www.euractiv.com.

Compte tenu du travail considérable mené par le Collectif Europe et Médicament, je m'attendais à ce que quelques titres de la grande presse sollicitent le Collectif pour un avis sur les points positifs et négatifs qu'ils retenaient du vote du parlement européen. Le silence a été en réalité total et les médias se sont contentés de prudentes généralités et de titrages optimistes comme celui du Figaro "Bientôt de vrais médicaments adaptés aux enfants". Il est frappant aussi qu'un site comme euractiv.com (d'après ma recherche avec google dans la profondeur du site) qui se définit comme "le principal portail Internet entièrement consacré aux affaires européennes" ne dise pas un mot des positions du Collectif, alors que la revue Prescrire met en ligne des dizaines de pages d'analyses d'une grande qualité à ce sujet et que euractiv met en bas de la page concernant les médicaments pédiatriques de nombreux liens qui donnent l'impression (visiblement tout à fait fictive) d'une prise en compte ouverte des différents points de vue politiques et institutionnels sur ce projet de réglement. La devise de euractiv.com est "Efficacité et transparence des acteurs européens". Visiblement certains acteurs sont tellement transparents qu'ils en deviennent invisibles ! Tout cela pour plus d'efficacité sans doute...

Décidément dès qu'on s'intéresse dans le détail et le concret au travail de l'Europe et à la couverture médiatique qui en est fait, on ressort écoeuré du résultat !

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#11_06_06

10 juin 2006 : Congrès IOF : dernières recherches sur le calcium, la vitamine D et l'os

Le site www.sciencedaily.com rend compte de la dernière conférence de l'IOF World Congress on Osteoporosis organisé par l'IOF qui s'est penchée sur de multiples questions, dont l'intérêt des apports en nutriments pour la solidité osseuse. L'IOF semble un temple de Big Pharma et sciencedaily est un site qui traite de façon assez conventionnelle de la nutrition et des suppléments nutritionnels. Le repérage de l'évolution du discours dans ce type d'instances est donc intéressant à suivre. Il est déjà instructif en terme d'évolution des mentalités de noter que l'IOF ait sorti une synthèse des résultats du congré portant sur la nutrition et la supplémentation à destination des agences de presse que l'on trouve à l'identique sur plusieurs site Internet traitant de la santé.

Voyons maintenant les quelques études commentées par sciencedaily. Selon une étude de Dr. Reina Armamento-Villareal sur une 3 groupes de femmes, le groupe calcium alimentaire et le groupe calcium alimentaire plus des suppléments de calcium donne de meilleurs résultats sur la densité osseuse que le groupe qui prend seulement des suppléments [sic]. Malgré mes recherches l'étude détaillée ne semble disponible nulle part, donc impossible d'avoir des détails sur la durée de l'étude ou sur la nutrition exacte donnée aux femmes prenant "seulement un supplément" (supplements alone) de calcium ni de savoir quel type de supplément a été utilisé. Impossible de savoir également si les femmes alimentation + supplément font mieux que celles en alimentation seule, le seul élément de l'étude qu'il aurait été intéressant de connaître...

Les formes de calcium de l'alimentation étant plus variées et comportant évidemment divers cofacteurs utiles il n'est pas étonnant qu'ellse soient mieux utilisées que le calcium apporté seul. D'autant que les formes chimiques proposées par l'industrie pharmaceutique sont souvent peu assimilables. Il est vrai que la recherche des formes les plus assimilables de calcium ne présente aucun intérêt pour les gros industriels de la pharmacie, ces produits n'étant pour la plupart pas brevetable. En l'état l'évocation des recherches de cette chercheuse est donc relativement vide de sens. Elle nous invite en tout cas à toujours regarder de très près la forme de calcium apportée dans tel ou tel étude de supplémentation.

Ceci d'autant plus que dans le domaine de la supplémentation nutritionnelle, on propose désormais des suppléments de calcium très intéressants. Le meilleur produit actuel semblant être le "microcrystalline hydroxyapatite complex" (MCHC) un extrait d'os préservant la matrice crystalline du calcium et apportant de très nombreux cofacteurs contenus dans la structure osseuse. Nutranews a brièvement rendu compte de ce produit dans cet article (bas de page). AOR un site de de vente de suppléments canadien qui a une bonne revue d'information évoque aussi régulièrement ce produit. Il est vrai qu'il ne s'agit pas de calcium isolé mais de calcium avec des nombreux cofacteurs et que cela ne conviendrait donc guère à l'idéologie monocausale dominante en médecine. Cela dérange aussi l'idéologie dominante en médecine selon laquelle l'alimentation c'est bien, la supplémentation c'est inutile ou cela ne donne au mieux que des résultats médiocres. Mais en réalité la supplémentation encourage une alimentation équilibrée et essaie de développer des produits innovants magnifiant les propriétés les plus intéressantes des aliments.

Pour en revenir au congrès, des recherches menées au Pays-Bas et en Belgique (par Dr. Steven Boonen et d'autres auteurs) montrent que la supplémentation en vitamine D nécessite des apports suffisants en calcium pour être efficace pour lutter contre l'ostéoporose. Il s'agit ici en fait des résultats d'un passage en revue par les auteurs des publications scientifiques portant sur le sujet. C'est donc plus une confirmation qu'une découverte. D'ailleurs il est probable que l'on pourrait en continuant dans cette direction de recherche montrer l'importance de nombreux autres nutriments.

Une autre étude plus surprenante et novatrice est celle du Dr. Olivier Bruyere qui "montre que la plupart des femmes post ménopausée vivant en Europe seraient déficiente en vitamine D, les mettant a risque élevé de perte osseuse et de fracture (...). Les experts suggèrent que les besoins du corps sont au minimum de 50 à 80 nanamoles de vitamine D par litre de serum sanguin pour une santé optimum de l'os.

Bruyere et ses collègues ont analysé les niveaux de vitamine D de 8,532 européennes post ménopausées. Parmi ces femmes, presque 80% avaient des taux circulant de vitamine D en dessous de la limite supérieure de variation acceptable [(levels below the high end of the acceptable range): Je suppose que ça veut dire que 80% avait des taux inférieurs à 80nmol/l ]. A peu près un tiers avaient des taux inférieurs à 50 nanamoles par litre, suggérant qu'elles avaient un risque sérieux de fractures liées à l'ostéoporose.

Bruyere dit que ces découvertes étaient retrouvées indépendamment du lieu d'habitation des femmes, que ce soit dans les pays ou le soleil est abondant ou ailleurs. Ceci est remarquable parce que la vitamine D est produite dans la peau par une réaction qui nécessite la lumière du soleil. "C'est l'un des résultats intéressants de notre étude" déclare Bruyere. "Nous avons testé des femmes en France, Belgique, Danemark, Italie, Hollande, Hongrie, Espagne, en Grande Bretagne et en Allemagne, mais les résultats étaient indépendant de la latitude. Sur cette base, nous pouvons faire l'hypothèse que les niveaux de vitamine D pourraient être faibles partout dans le monde."

Les chercheurs ont observé des niveaux identiques de déficience en vitamine D chez les femmes âgées de moins de 70 ans. Bruyere suggère que ces découvertes complémentaires indiquent que l'âge a peu d'influence sur le degré de déficience. "Même les femmes post-ménopausées les plus jeunes devraient prendre une forme de supplémentation en vitamine D" dit-il. "Les suppléments ne devraient pas être réservés seulement aux personnes les plus âgées". (ma traduction de l'anglais, avec mon commentaire inséré entre [ ] )

Ces résultats sont très intéressants et confirment les pires pronostics sur la déficience générale en vitamine D dans la population générale. Le Dr Mercola (présentation par Gestion Santé) qui plaide depuis plusieurs années pour des apports élevés en vitamine D citait en 2002 le Dr. Michael Hollick un des meilleurs chercheurs mondiaux sur la vitamine D qui estime que les valeurs optimales de vitamine D sont de 115-128 nmol/l. 50nmol/l est la limite inférieure à partir de laquelle la carence franche apparaît. Il faut donc comprendre l'intervalle de 50 à 80nmol/l comme une limite inférieure de sécurité. Si Bruyere avait pris ces valeurs récentes de référence, c'est près de 100% de son échantillon qui aurait été en déficit ! Rappelons que en dehors de la santé de l'os, la vitamine D joue un rôle important en protégeant de nombreuses formes de cancer, est un facteur de protection contre l'hypertension, la sclérose multiple, la dépression, l'arthrite rhumatoïde, le diabète (Dr. Mercola). Bien entendu cette protection est d'autant plus importante que la vitamine D est à un niveau optimum dès l'enfance et tout au long de la vie. Ce n'est certainement pas à 70 ans ou même au début de la ménaupose qu'il faut s'en inquiéter !

Enfin une dernière étude citée évoque l'importance d'un apport suffisant de protéines pour protéger les femmes ménauposées des fractures. Une des découvertes importantes de l'étude est que ces protéines peuvent être d'origine végétales ce qui est une bonne nouvelle pour les végétariens qui doivent toutefois surveiller la teneur de leurs apports protéinés, le régime végétarien mal conçu étant très facilement déficient en protéines. Un apport relativement important de protéines protège des fractures de la hanche, mais le compte rendu ne dit pas si c'est via la solidité de l'os ou via des chutes moins fréquentes ou moins graves liées au maintien de la masse musculaire.

En complément on pourra lire sur Gestion Santé :

sur la vitamine D :

billet du 29/12/05 : Une étude systématique prône 1000 UI de vitamine D par jour pour lutter contre certains cancers

Sur la leucine (acide aminé) et la protection de la masse musculaire :

billet du 30/12/05 : La L-Leucine et la fonte musculaire

billet du 28/01/06 : Le Monde évoque la supplémentation en Leucine pour ralentir la fonte musculaire liée au vieillissement

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#10_06_06

7 juin 2006 : La directive européenne 2002/46 sur les compléments alimentaires transposée en droit Français

Fin mai un ami de l'ADSNB (merci G.F.) m'a informé que la directive européenne 2002/46 sur les compléments alimentaires avait été, enfin!!!, transposée en droit français, via le Décret n°2006-352 du 20 mars 2006.

Apparemment la DGCCRF (Cf. notre page "A la DGCCRF, la chasse aux compléments alimentaires est ouverte") après moulte tentatives, via diverses moutures du décret, pour défigurer le sens du texte de la directive, aurait finalement jeté l'éponge et aurait produit une transposition satisfaisante tenant même compte de la jurisprudence de la Cours de Justice Européenne (Cf notre page "bilan du recours auprès de la Cour Européenne de Justice contre la directive 2002/46").

On attend les décrets (ou les arrêtés) fixant listes et dosages. Une grande vigilance devra être portée à ce point compte tenu des dosages ridiculement faibles qui ont circulé dans divers projets ou recommandations des agences de santé françaises. Normalement ces dosages ne sont pas de la compétence française mais du ressort d'une autorité scientifique européenne.

Du coup, les compléments nutritionnels devraient baisser de prix, la TVA devenant la même que pour les aliments soit 5.5% (au lieu de 19,60 % !).

Donc plutôt des bonnes nouvelles. Avec des restrictions importantes qui continuent à entraver les libertés des citoyens européens. Parmi les restrictions ou menaces qui subsistent et sans viser à l'exaustivité on peut évoquer le fait que :

- le principe d'une liste positive subsiste (au lieu du système déclaratif américain beaucoup plus libéral),

- le comité scientifique lambda de l'Union Européenne chargé de fixer des dosages de sécurité et la liste des produits autorisés n'est pas assez transparent, indépendant ni ouvert aux consommateurs,

- il faut être très vigilant sur l'intégration effective de la jurisprudence de la CEJ dans les pratiques de la commission européenne à l'égard des compléments et sur la transposition de la jurisprudence de la CEJ dans les législations nationales (la transposition a souvent été faite avant le jugement européen dans beaucoup de pays de l'Union),

- il subsiste un risque lié au flou de la frontière entre médicament et compléments qui pourrait permettre à certains exécutifs nationaux mals intentionnés de reclassifier des compléments en médicaments (cf. notre billet du 11/06/06, point 4),

A suivre...

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#07_06_06

5 juin 2006 : Jacques Valentin interviewé par Nutranews pour présenter "Gestion Santé" aux lecteurs de cette revue

La revue Nutranews, que nous avions présenté aux lecteurs de "Gestion Santé" dès septembre 2001 s'agissant d'une revue de référence sur les compléments nutritionnels, nous a fait l'honneur de nous solliciter pour une interview afin de présenter "Gestion Santé" à ses lecteurs. Cela fut fait en un temps record au mois de mai par questions écrites. Cela aura permis de publier l'interview dans le n° de juin de Nutranews. Merci aux amis qui ont relu le texte avant envoi.

Cela aura été l'occasion de faire une présentation originale de "Gestion Santé" et de faire notamment le point sur l'importance de la nutrition et de la supplémentation par rapport au reste des disciplines médicales.

Ce référencement est très important pour nous car Nutranews est un site très visité (la version papier du magazine fait aussi l'objet d'une importante diffusion) et que c'est un référencement prestigieux. Par exemple Thierry Souccar, un journaliste qui fait autorité dans le domaine de la supplémentation a été interviewé à l'occasion du lancement de son nouveau site La Nutrition.fr au mois de mai 2006. C'est très flatteur pour nous de suivre en juin après cet auteur reconnu (lire par ex. "Santé, mensonges et propagande").

Les liens mis par Nutranews font déjà leur effet et nous avons plus de visites que d'habitude avec plus de 400 pages vues les 2 et 3 juin par exemple.

Merci à Nutranews et bienvenu aux nouveaux lecteurs de "Gestion Santé".

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http://gestionsante.free.fr/journal_de_bord_0606.htm#05_06_06

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Créé le 05/06/06. Dernière modification le 28/06/06.