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Journal de bord d'Avril 2008

 

Faute de temps pour écrire des pages longues, structurées et relativement exhaustives sur tel ou tel sujet, je laissais souvent passer sans les commenter ou les citer une multitude d'excellents articles sur Internet ou dans des revues, sans parler de livres que j'ai lu et sur lesquels je souhaiterais attirer l'attention ou faire quelques commentaires utiles pour le lecteur de ce site. D'où cette nouvelle rubrique "Journal de bord" que j'ai lancé à la fin novembre 2005. La santé sera comme d'habitude le principal sujet traité ici, mais pas le seul, mes intérêts dépassant souvent ce domaine. Comme pour les autres dossiers traités ailleurs sur le site j'espère pouvoir apporter des informations intéressantes et souvent difficilement accessibles au non spécialiste et tout cela sur un ton plaisant si possible ! Bonne lecture...

Journal de bord de Jacques Valentin Archives : - 12/16 - 04/16- 07/14 - 05/14 - 04/14 - 01/14 - 12/13 - 11/13 - 10/13 - 09/13 - 08/13 - 07/13 - 05/13 - 12/12 au 0313 - 08/12 - 06/12 - 04/12 - 03/12 - 02/12 - 01/12 - 11/11 - 10/11 - 09/11 - 08 et 06/11 - 02/11 - 12/10 - 10/10 - 09/10 - 05/10 - 03 et 04/10 - 02/10 - 01/10 - 12/09 - 11/09 - 04/09 - 01/09 - 10/08 - 08/08 - 04/08 - 11/07 - 09/07 - 05 et 06/07 - 04/07 - 03/07 - 02/07 - 01/07 - 12/06 - 11/06 - 10/06 - 09/06 - 08/06 -07/06 - 06/06 - 05/06 - 04/06 - 03/06 -02/06 - 01/06 - 12/05 - 11/05 -

Avril 2008 (et le Journal des 30 derniers jours) : - 26/04 - Enjeux écologiques du plombage au mercure - Sites sur la dentisterie de Mme Estelle Vereeck - 16/04 - Déficit en vitamine C dans la population générale - 15/04 - Les sites de Bernard Guennebaud - 14/04 - Au choix : Selon le coeur des médias dominants "Les vitamines ne servent à rien et sont même dangereuse pour la santé" ou selon les revues scientifiques : "Importante chute du risque de plusieurs cancers de l'enfant chez les mères s'étant complémentées avant et pendant la grossesse" - 13/04 - Histoire de la radiologie : La tragédie des enfants irradiés pour traiter la teigne - 02/04 - Du nouveau sur l'EPO (érythropoïétine ) en cancérologie : à éviter dans la plupart des cas !

26 Avril 2008 : Enjeux écologiques du plombage au mercure - Sites et articles sur la dentisterie de Mme Estelle Vereeck

"Non au mercure dentaire" et la page de Gestion Santé sur cette association

Il y a quelques semaines, j'ai découvert par hasard via un site et une association que j'avais référencé, "Non au mercure dentaire" (ma page, leur site), qu'il y avait eu un appel européen, «L'Appel du Luxembourg» pour l'interdiction des Amalgames dentaires au Mercure.

Lorsque j'avais écrit une page sur la question, je m'étais rendu compte, un peu par hasard qu'il s'agissait également d'un enjeu écologique majeur. En effet en parcourant un Rapport de l'Académie de médecine de 2003 j'avais trouvé, au détour d'un paragraphe, que (je me permet de citer quelques extraits de ma page sur le mercure dentaire) "(p. 10/12) sur le sujet de l'incinération post mortem des porteurs d'amalgames "On estime qu'une crémation peut libérer en moyenne jusqu'à 3,5 grammes de mercure et la Suède évalue les rejets de mercure liés à cette pratique courante dans ce pays, à 280 kilos par an, soit le tiers du total de ses émissions ! En France, on peut estimer ce rejet à environ 200 kilos par an pour 100000 crémations.""

J'avais poursuivi mes recherches et trouvé que, "Sur ce dernier sujet et comme l'explique un rapport sur le sujet du Sénat rendu en 2001 " Les effets des métaux lourds sur l'environnement et la santé " qui se penche sur cette question délicate de l'incinération et du rejet de mercure on appréciera le passage dont le ton est inhabituellement désabusé et ironique "A notre connaissance, aucune étude de ce type n'a été effectuée en France. Pour un motif simple : les crématoriums respectent la réglementation. Et puisque la réglementation ne prévoit rien sur ce sujet. Alors... inutile de s'alarmer." La réglementation a-t-elle évoluée depuis ? Je ne saurais le dire, mais si cela a été le cas nos incinérateurs ont été mis aux normes avec une extraordinaire discrétion... En tout cas, à lui seul le problème de l'incinération des défunts suffirait à justifier l'interdiction du mercure des amalgames."

Sites et articles sur la dentisterie de Mme Estelle Vereeck

Je n'avais pas trouvé plus d'informations à l'époque mais j'avais gardé en souvenir l'idée que le mercure dentaire pouvait constituer un problème écologique majeur. Tout récemment une lectrice amenée par un de ses amis sur Gestion Santé m'a signalé une page de son site sur la dentisterie qui est par ailleurs une mine d'information. Il s'agit de Mme Estelle Vereeck, docteur en chirurgie-dentaire, dont on peut lire les excellents articles à http://dentholistique.romandie.com et surtout à http://www.holodent.com. On peut retrouver ses cinq livres et d'autres informations intéressantes sur le site de son éditeur les Editions Luigi Castelli.

Elle a également publié plusieurs articles intéressants sur Agoravox (on trouve certains des mêmes articles sur Naturavox, un clone éditorialement indépendant d'Agoravox dont le contenu est, comme son nom l'indique, plus centré sur l'écologie). Agoravox est un site média citoyen de contributeurs variés qui va probablement devenir une fondation. Agoravox permet de se faire connaître d'un plus large public que via l'audiance d'un site personnel. Néanmoins, un des très graves défauts d'Agoravox (qui m'a toujours découragé d'y participer), ce sont les réponses aux articles (gérées façon blog), qui sont infestées de réponses fielleuses ou superficielles dont la lecture est franchement décourageante et qui noient les réactions intéressantes de certains lecteurs. On sent aussi le poids très lourd du politiquement correct à la française, façon police de la pensée, auxquels semblent s'adonner assidûment certains lecteurs désoeuvrés. Bref cela demande à l'auteur de suivre avec attention les réactions à son article, si celui-ci ne traite pas des platitudes convenues du jour, pour faire des réponses et des mises au point, s'il veut éviter que sa contribution soit dénaturée par les commentaires. Mme Vereeck fait ce travail de suivi avec soin et la lecture de ses réactions est informative et pertinente, bien qu'elle soit souvent obligée de répéter dix fois la même chose !

Les articles de Mme Vereeck traitent de beaucoup d'autres sujets intéressants que le mercure dentaire et ses conséquences environementales, mais c'est sur ce sujet que nous allons plus particulièrement nous pencher aujourd'hui.

Sa page "Enjeux écologiques du plombage au mercure" m'a déjà permis de répondre à différentes questions restées pour moi en suspens. Elle pose d'abord clairement le problème :

"Parallèlement au problème toxicologique, le plombage pose un problème écologique à l'échelon collectif, car le mercure représente une menace pour l'environnement, contaminant l'air, les nappes phréatiques et la chaîne alimentaire où il s'accumule (dans la chair des poissons en particulier) . Les aspects écologiques du plombage au mercure sont généralement peu abordés, alors que le danger est pourtant majeur."

Elle s'intéresse à différents aspects du problème, notamment la récupération des déchets de dentisterie. Je m'étais moi-même inquiété de la question auprès d'un ami dentiste qui m'avait récemment donné à peu près les mêmes réponses mais moins précises que celles de Mme Vereeck :

"Depuis le premier avril 2001, les cabinets dentaires ont l'obligation de s'équiper de récupérateurs d'amalgame dans le but de filtrer les déchets mercuriels et éviter leur déversement dans les canalisations, évaluée à dix tonnes par an et leur sédimentation, évaluée à une vingtaine de tonnes. À ce jour on ignore dans quelles proportions la réglementation est respectée." [Remarque de G.S. : Ces dispositions font suite à la Décision 2000/532/CE de la Commission Européenne du 3 mai 2000 sur la liste des déchets dangereux]

Le retard est absolument vertigieux puisqu'il s'agit de techniques simples de récupérations qui auraient pu être mises en oeuvre depuis des décennies ! Et encore, il semble exister un flou quant à l'adoption systématique des ces mesures par les dentistes alors qu'il s'agit d'un problème majeur de santé publique et d'écologie qui devrait faire l'objet d'un suivi précis et attentif de l'administration. Ces seules données donnent une idée de la place réelle, incroyablement secondaire, de la santé publique et de l'écologie dans une société capitaliste avancée comme la France !

Mme Vereeck a aussi des données sur le stock en bouche du mercure qui atteint le chiffre énorme de 100 tonnes (il s'agit évidemment d'une évaluation sommaire). Et, bien sûr ceux-ci "sont appelées à se répandre dans la nature. Et ceci de deux manières: par décomposition naturelle après le décès et par crémation. La crémation, procédé qui tend à se populariser, volatilise dans l'atmosphère des quantités importantes de mercure. La Suède évalue les rejets de mercure liés aux crémations à 280 kilos/an, soit près du tiers du total des émissions de mercure dans ce pays*[*Evaluation de la Swedish Environment Authority citée dans la revue Resurgam- vol. 43, juillet 2000]. En Grande Bretagne, un des pays d'Europe où le procédé d'incinération est le plus répandu, les crématoriums sont responsables de 16% des émissions de mercure. Si rien n'est fait, les crématoriums seront en 2020 les principaux pourvoyeurs d'émissions mercurielles. En France, on ne dispose d'aucunes données, pour la simple raison que la réglementation française ne prévoit rien à ce sujet. Ainsi les 15 tonnes de mercure posées chaque année dans la bouche des français sont appelées tôt ou tard à polluer sols, nappes phréatiques et atmosphère sans que rien ne soit fait, ou si peu, pour contrôler cette contamination." [G.S. : mon souligné]

Dans une autre déclinaison du même sujet, "L'éco-conscience doit-elle inclure les matériaux que nous avons en bouche ?" Mme Vereeck donne également les quantités de mercure mise en bouche annuellement dans l'Union Européenne (ou en Europe ?) : 125 tonnes. On imagine à partir de ces chiffres le "tonnage embarqué" dans la bouche des européens (probablement plus de 1000 tonnes si on transpose les données française !) ou au niveau mondial !

La pollution humaine au mercure : enjeux environnementaux

La pollution humaine au mercure à plusieurs dimensions qui sont rappelées dans cette section de la page de Wikipedia sur la chimie du mercure (mais attention comme d'habitude au politiquement correct de Wikipedia car cette page "oublie" le mercure des cabinets dentaire qui fait l'objet d'une récupération satisfaisante seulement dans quelques pays économiquement avancés - par ailleurs la page évoquant la toxicité des amalgames dentaires sert aussi les fadaises conformistes habituelles sur la question). Le problème de la crémation et de ses problèmes environementaux est également abordée dans une autre page de Wikipedia qui fait un inventaire assez effarant des produits toxiques que la crémation met potentiellement en circulation en dehors du mercure. [G.S. : paragraphe mis à jour le 30/04/08]

De nombreux crématoriums français ne semblent pas disposer de filtre à particules permettant de traiter efficacement les vapeurs de mercure. Rappelons qu'en 2001 (rapport sénatorial) les crématoriums français n'étaient assujettis à aucune obligation légale en ce qui concerne le mercure et les dioxines (contrairement à plusieurs autres pays européen dont les normes sont parfois très strictes) ! Je crois que ces normes n'ont pas évolué depuis et que la France attend passivement qu'une éventuelle législation lui soit imposée par l'Europe ou via une convention internationale. C'est ainsi qu'une page de la Ville de Gap sur un projet de crématorium indique en bas de page : "Coût de l'investissement compris entre 1 300 000 euros HT et 1 500 000 euros HT (la différence tient à la décision concernant le choix du système de filtration des fumées dont on attend les prochaines normes européennes)." [G.S. : Comme nous le verrons plus loin, il n'y a en fait, pour l'instant, pas de législation européenne prévue dans ce domaine !]

Il est probable que le coût des crématoriums ayant des normes de filtrage élevées comparables aux incinérateurs conventionnels vont être très coûteux, ce qui va poser des problèmes d'implantation importants, et peut-être les réserver aux plus grosses agglomérations, afin de ne pas trop éloigner le lieu du décès de celui de la crémation.

De nombreux petits crématoriums devront probablement fermer si l'on décide enfin de mettre en place une politique de santé publique qui ne fasse pas courir de risques exhorbitants aux populations. Il est paradoxal que l'on se batte pour quelques pour cents d'amélioration des émissions des incinérateurs traditionnels et que l'on occulte la question des crématoriums. Ceci explique pourquoi les crématoriums risquent d'être dans peu d'années la principale cause de dispersion du mercure dans l'environnement en Europe si l'on ne prend pas rapidement des mesures très strictes.

En tout cas le problème des amalgames dentaires au mercure doit être traité par deux mesures coordonnées. L'interdiction de leur utilisation qui va diminuer progressivement leur mise en bouche et diminuer lentement le stock en bouche dans la population générale et des mesures simultanées très strictes en ce qui concerne les crématoriums qui doivent respecter les meilleurs normes de filtration disponibles.

Si des mesures étaient appliquées avec toute l'amplitude nécessaire, les cimetières traditionnels où les personnes ne sont pas incinérées resteraient la seule source significative de diffusion des déchets mercuriels des défunts. Des systèmes de gestion des cimetières sont probablement aussi envisageables pour éviter la contamination des sous sols par le mercure.

Action ou inaction européenne ?

J'évoquais au début de cette page « L'Appel du Luxembourg » pour l'interdiction des Amalgames dentaires au Mercure. Cette initiative fait suite à une reprise de l'activité au niveau de la Commission de l'Union Européenne initiée en 2005, via la "Stratégie communautaire sur le mercure" qui visait à une réduction générale puis à un abandon de l'utilisation du mercure sous toutes ses formes. En réalité, comme l'indique l'AKUT pour ce qui concerne les amalgames, la Commission s'est tournée vers des comités dont l'expertise est particulièrement suspecte puisque selon l'AKUT, "Le pré-rapport du SCENIHR a été cosigné par 4 experts "maison" (comités SCENIHR et SCHER) et par 4 représentants européens de la profession dentaire. Aucun épidémiologiste ou toxicologue, ni toxicochimiste indépendants, spécialisés dans l'évaluation des conséquences des expositions aux métaux traces toxiques tels que le mercure, ne figure parmi les membres du groupe de travail, ce qui est contraire à toute expertise indépendante. La bibliographie a été très sélective  : l es études contraires à la thèse des experts "officiels" ont été ignorées, tandis que celles publiées dans des journaux dentaires bien pensants représentent quasiment la moitié des articles qu'ils ont sélectionnés (soit 90 sur 199) . Cette expertise n'est à l'évidence pas contradictoire  : ainsi les contributions des scientifiques européens qui argumentent sur la réelle toxicité du mercure n'ont pas été prises en compte, ce qui n'est pas surprenant ! Cette parodie d'expertise ne correspond pas à l'état des connaissances , qui progressent rapidement grâce aux avancées récentes de la chimie et de la biologie moléculaire."

On a l'impression que la Commission Européenne a organisé à dessin la confusion entre la dimension médicale (utilité et dangers matériologiques des amalgames au mercure) et le danger environnemental lié aux centaines de tonnes de mercure stockés dans la bouche des européens. Pourtant la "Stratégie communautaire sur le mercure" de 2005 qui a lancé le programme de réduction du mercure reconnaissait certains faits importants (mais de façon malheureusement partielle) dans l'exposé de la problématique et des dangers du mercure stocké dans les dents :

"La principale source d’exposition au mercure pour la majorité de la population des pays développés réside dans l’inhalation de la vapeur de mercure provenant des amalgames dentaires. (p. 3/13)" [G.S. : J'ai été étonné de cet aveu inattendu, qu'on retrouvait aussi dans un recoin du rapport de l'Académie de médecine de 2003 précité, car cette toxicité des vapeurs mercurielles est également souvent présentée comme un faux problème par les médecins et les dentistes, les amalgames étant soit disant parfaitement stables.] Dans les objectifs de la Commission on lisait qu'il fallait "déterminer le devenir à long terme des excédents de mercure et des «réservoirs» de mercure de la société (produits encore en usage ou stockés contenant du mercure); (p. 4/13)" ce qui concernait potentiellement le mercure en bouche des porteurs d'amalgame. Malheureusement la section sur la Gestion des excédents et réservoir [de mercure] (p. 8/13) ne cite pas le stock de mercure en bouche ni ne donne le tonnage. Néanmoins on lit aussi plus loin que "Certains États membres considèrent les amalgames dentaires comme une source importante d’émission de mercure, notamment par l’intermédiaire de la chirurgie dentaire et de la crémation. Le traitement des déchets d’amalgames dentaires est régi par la législation communautaire relative aux déchets. (p. 5/13)" C'est ainsi que dans le cadre des actions énumérées on trouve : "Action 4. La Commission dressera en 2005 un bilan de la mise en oeuvre par les États membres des règles communautaires relatives au traitement des déchets d’amalgames dentaires et prendra ensuite les mesures qui s’imposent pour en assurer une application correcte. (p. 5/13)" Il s'agit ici de vérifier l'efficacité de la Décision 2000/532/CE de la Commission du 3 mai 2000 classant les amalgames comme déchets dangereux à récupérer et traiter spécifiquement au cabinet du dentiste. Ces dispositions sont très utiles mais ces déchets liés en général à des déposes pour réfection des amalgames dentaires ne concernent qu'un tout petit volume des amalgames en bouche de la population générale et ne concernent en rien les amalgames portés par les défunts.

Or ceux-ci ne font l'objet d'aucun projet d'action de la Commission Européenne. En effet, les choses se gâtent lorsqu'on lit que "Les émissions des fours crématoires ne sont pas régies par le droit communautaire, mais sont réglementées dans plusieurs États membres et font l’objet d’une recommandation OSPAR. Les rapports à établir sur les émissions par les parties à cette recommandation, qui doivent être remis pour la première fois avant le 30 septembre 2005, donneront une idée de son efficacité et de l’opportunité de prendre de nouvelles mesures. Une surveillance analogue est préconisée dans les autres États membres où se pratique la crémation."

Décryptage pour les lecteurs de Gestion Santé de ce jargon européen incompréhensible sans recherches complémentaires approfondies : Par "fours crématoires" [sic] il faut entendre ici au vu du contexte exclusivement les crématoriums dont la Commission indique ainsi qu'il ne font l'objet d'absolument aucune mesure réglementaire Européenne.

Pour ce qui concerne les incinérateurs de déchets ménagers, et leurs rejets de toxiques dont le mercure, on pourra se reporter à cette bonne synthèse de la préfecture d'Auvergne qui montre que les incinérateurs de déchets ménagers sont bien couverts par la directive européenne du 4 décembre 2000 relative à l’incinération des déchets, transposées en droit français par l’arrêté ministériel du 20 septembre 2002.

L'OSPAR est une convention internationale de l'Atlantique du nord-est (et qui ne concerne donc qu'une partie des pays de l'UE) qui propose depuis 2003 des bonnes pratiques de crémation (en filtrant en particulier les vapeurs de mercure libérées lors de la crémation) et un suivi des émissions des crématorium à ses adhérents. C'est pourquoi le document de la Commission préconise d'étendre cette surveillance des émissions des crématoriums aux membres non adhérents de l'OSPAR.

Le texte de la Commission Européenne constitue donc une démission sur le volet mercuriel des amalgames dentaires puisqu'elle se défausse sur l'OSPAR de la question de la mise au norme des crématoriums, qui est ainsi renvoyé au calandes grecques, et qu'elle étudie surtout la question de la pose des amalgames au mercure sur le plan médical (où le problème est pourri de conflits d'expertises et de controverses interminables) au lieu de poser le problème en termes écologiques comme le fait tout le reste de la Stratégie communautaire sur le mercure. C'est donc un refus et un sabordage délibéré par la Commission Européenne des deux volets d'actions coordonnées évoquées précédemment qui supposent une mise en place simultanée de l'interdiction de la pose en bouche des amalgames au mercure et une réglementation très sévère sur les rejets des fumées des crématoriums.

Recommandations et suivis OSPAR

Ces recommandations très intéressantes (Recommandation OSPAR 2003/4) émanent donc de de l'OSPAR ; "La Convention OSPAR de 1992 est l'instrument actuel qui oriente la coopération internationale sur la protection du milieu marin de l'Atlantique du nord-est. Il a uni et mis à jour la Convention d'Oslo de 1972 sur les opérations d'immersion de rejets en mer et la Convention de Paris de 1974 sur la pollution marine d'origine tellurique."

Cette recommandation a été ratifiée par la France. La recommandation définit les meilleurs protocoles de filtage disponibles pour les crématoriums et les signataires s'engagent à les adopter. Par ailleurs les contractants se sont engagés à fournir un premier rapport en 2005 puis en 2009 et à s'engager à appliquer des BAT, ce qui "désigne les meilleures techniques disponibles telles qu'elles sont définies en appendice 1 à la Convention OSPAR" au maximum de crématoriums possibles (avec certaines restrictions techniques pour les petits établissements). Ils s'engagent également à fournir des données de suivi des émanations mercurielles liées au crematoriums.

Suite à la ratification de l'OSPAR, la machine bureaucratique française, dans le climat d'omerta habituel qui fait tout le charme de la société française, s'est lancée un défit titanesque. Mettre les incinérateurs au norme "BAT" ? Point du tout ! Le plan "Crémation 1" [sic] a mis en place un protocole permettant de mesurer les rejets des différents crématoriums français de façon à disposer d'une évaluation a peu près fiable des rejets des polluants toxiques dans l'environnement des crématoriums français. Cette étude a pour but de "Consolider la réponse française à la recommandation OSPAR 2003/4 qui demande dans un premier temps aux parties de fournir "au plus tard le 30.09.2005 […] les estimations des charges de mercure libérées dans l'environnement par les crématoriums"."

Ce plan français fait en réalité une lecture extraordinairement réductrice de OSPAR 2003/4 qui prévoit certes des outils de mesure des émanations, mais ceux-ci ont vocation a suivre dans le temps l'efficacité des mesures de mise au norme des crématoriums ! D'ailleurs les réponses prévues prévoient 2 points : I. Compte rendu de mise en conformité et II. Compte rendu d'efficacité

Ainsi, le point I. Compte rendu de mise en conformité a été totalement occulté alors qu'il prévoit des Moyens de mise en œuvre qui peuvent être : par la législation, par des mesures administratives, par un accord négocié. Par ailleurs il est demandé de préciser :

"a. mesures prises spécifiquement afin de faire entrer la présente mesure dans les faits ;
b. difficultés particulières éventuelles qui se sont présentées, telles que des problèmes pratiques ou juridiques, dans la mise en œuvre de la présente mesure ;
c. on indiquera clairement les raisons éventuelles pour lesquelles la présente mesure n'a pas été entièrement appliquée et on précisera les plans prévus pour qu'elle le soit complètement."

On voit à quel point la France ne souscrit pas à ses obligations puisqu'aucune mesure dans ce domaine n'a été prise au jour ou nous écrivons et que par exemple les crématorium qu'ils soient neufs ou anciens ne sont toujours assujettis à aucune contrainte en matière de rejets ! On est dans ce domaine entièrement livré à la bonne volonté des fabricants et des collectivités locales et à la prise de conscience et à la mobilisation des populations concernées par les implantations ! Lire par exemple la mobilisation de la population de Bussy Saint Georges.

C'est dans ce contexte de démission tant au niveau européen qu'au niveau français que la Norvège s'est décidée à prendre le programme initial de 2005 de la Commission au sérieux et que "Depuis le premier janvier 2008, l'emploi du mercure est interdit en Norvège." Et cela sous toutes ses formes amalgames dentaires y compris.

L'enjeu est d'importance car une décision similaire dans l'Union Européenne annoncerait une évolution rapide similaire pour tous les pays développés. Et ces normes seraient ensuite probablement adoptées progressivement par les pays en voie de développement ou l'enjeu est crucial compte tenu de ce que les pays industriels tendent à y délocaliser leur production. Et bien sûr au vue du retard incroyable dans le retraitement des déchets mercuriels on imagine quelle peut être la situation dans les pays en voie de développement où le cadre écologique et la santé humaine sont sacrifiés au développement industriel. On pourrait raisonnablement viser à ce que les centrales au charbon soient le dernier foyer d'émission de mercure. Un problème qui touche peu l'UE où le charbon n'est pas beaucoup utilisé mais qui concerne beaucoup plus l'Amérique du Nord et surtout la Chine où la question de la pollution mercurielle au charbon devient un problème écologique absolument critique.

En ce qui concerne le problème spécifique des crématoriums, les retards dans l'adoption de normes drastiques sont catastrophiques car la pratique de la crémation est en plein développement, notamment en France, et il sera très difficile mettre aux normes ou de fermer des équipements coûteux et récents qui n'auraient pas été construit avec des normes de filtrage adaptées.

Conclusion et ouverture

Cette affaire montre une fois de plus (cf. mon récent billet du 13 Avril 2008 : Histoire de la radiologie : La tragédie des enfants irradiés pour traiter la teigne) comment dans nos sociétés capitalistes, la vie et la santé des populations, la préservation de notre environnement, sont des variables mises sur le même plan (ou plutôt sur un plan bien inférieur dans la mesure où elles sont difficilement "monétarisables" !) que les variables économiques qui constituent le coût d'un équipement. On voit aussi ce que vaut le baratin de certains penseurs ultralibéraux à la mode sur le soit disant principe de précaution qui entraverait de façon ridicule le développement économique. On en est est pas à "prendre des précautions" lorsque de très graves nuisances comme celles que nous venons de décrire ne sont tout simplement pas prises en compte par les pouvoirs publics ! Et le mercure n'est évidemment qu'un cas particulier, ce sont toutes les composantes du développement économique qui mettent l'optimisation du profit au coeur du développement économique dans la société capitaliste et la vie humaine, sociale et l'écologie à la périphérie.

Enfin pour les lecteurs de Gestion Santé qui souhaiteraient approfondir l'aspect socio-politique et philosophique de ces questions (et qui lisent l'anglais) je voudrai signaler un des rares auteurs à s'être consacré à l'écologie marxiste, il s'agit de John Bellamy Foster, un universitaire américain qui a publié un tryptique sur les apports du marxisme à l'écologie. Suite à l'industrialisation sauvage de l'Union soviétique sous Staline et ses successeurs nous avons l'image du marxisme comme étant une théorie totalement coupée de la question écologique. En réalité Marx était un penseur d'avant garde aussi dans ce domaine, qui avait par exemple une pensée d'une extraordinaire modernité sur la question de l'érosion et de l'appauvrissement des sols (un problème crucial du développement agricole au XIXeS) qu'il liait de façon très claire et pertinente aux premières étapes de l'industrialisation capitalistique de l'agriculture de son époque. Ceci est bien expliqué dans un chapitre du petit ouvrage "Ecology Against Capitalism", Monthly Review Press (2002) que j'ai lu récemment et qui traite de différents apports du marxisme à la compréhension de la question écologique contemporaine et du rapport entre capitalisme et crise écologique. L'auteur a également publié un volume plus conséquent sur le même thème dans l'oeuvre de Marx, "Marx's Ecology: Materialism and Nature", Monthly Review Press (2000), qui est en attente de lecture dans ma bibliothèque... Un troisème ouvrage de l'auteur "The Vulnerable Planet: A Short Economic History of the Environment", est une histoire de la crise écologique contemporaine dans sa relation avec le développement historique du système capitaliste.

Ces ouvrages sont un point de départ intéressant pour mieux comprendre un problème qui m'a travaillé depuis que je m'occupe de Gestion Santé et que j'écris sur les questions de santé publique, qui est l'impossibilité de faire avancer certains dossiers de santé publique qui sont, paradoxalement, simultanément identifiés et soigneusement occultés. J'en suis arrivé à la conclusion que seule une analyse marxiste de la structure de classe et des modes d'appropriation des forces productives dans la société contemporaine permettait d'expliquer le fabuleux décalage existant entre les connaissances et possibilités du développement technico-scientifique contemporain et des connaissances dans le domaine des sciences humaines et l'incapacité à mettre ces connaissances au service d'un développement humain et social progressif et cohérent. En ce qui me concerne cela a entrainé un glissement régulier politique vers la gauche et vers une analyse marxiste radicale de la société. En effet je suis convaincu que compte tenu de l'état actuel de la structure sociale et du pouvoir politique et économique de nos sociétés, celles-ci ne pourront être transformées que par une crise révolutionnaire de première grandeur.

De ce point de vue, les trois ouvrages précités, malgré des insuffisances importantes dans le domaine de l'action politique proprement dite ( = comment faire pour que l'analyse marxiste puisse déboucher sur de véritables et profonds changements sociaux et ne se réduisent pas à de plaintives et impuissantes exhortations ou à des changements superficiels) est une bonne introduction pour un approfondissement de la réflexion dans le domaine de l'écologie politique.

16 Avril 2008 : Déficit en vitamine C dans la population générale

Ma page sur la vitamine C est une des plus visitée de Gestion Santé. Je lis donc avec attention ce qui sort sur cette question, même si je n'ai pas toujours le temps d'en rendre compte au lecteur.

Compte tenu du désintérêt de la médecine académique et de la politique de santé publique pour les vitamines et les minéraux et de la sous estimation massive de l'importance d'apports suffisants en nutriments essentiels pour maintenir la santé, il n'est pas toujours facile d'avoir des informations fiables sur les carences que peut présenter la population générale en nutriments essentiels.

D'après ce que j'ai pu lire ici ou là la carence modérée ou sévère en un ou plusieurs nutriments essentiels concernerait 1/3 environ de la population, ce qui est énorme et représente un problème de santé publique de premier plan. Sur la progression des troubles biologiques en fonction du degré de carence en un nutriment on pourra se reporter à l'exemple des vitamines B.

Je suis toujours intéressé par les études qui me permettent de préciser ces données. Le problème est compliqué par le manque de fiabilité des études fondées sur les apports nutritionnels des populations qui sont très difficiles à mener pour diverses raisons (difficulté de recueil des données, incertitudes sur les apports réels en nutriments des aliments consommés, assimilation variables des nutriments suivant les personnes, etc.).

Les études de présence par prélèvement sanguin et identification du nutriment ont donc ma préférence même si elle doivent parfois être interpétées avec prudence, par exemple, le plasma sanguin ne permet pas de repérer la carence en magnésium, il faut analyser les globules rouges pour ce faire.

En ce qui concerne la vitamine C, le taux plasmatique est un excellent indicateur, beaucoup plus fiable que les apports journaliers compte tenu des variations dans la bio-consommation de cette vitamine par l'organisme.

J'ai donc été ravi de trouver une excellente étude américaine de 1998 (Vitamin C Status of an Outpatient Population) réalisée sur des membres de la classe moyenne américaine de l'Arizona, en bon état de santé général, visitant un centre de santé pour des examens médicaux de routine.

Les auteurs distinguent la déficience franche (concentrations du plasma en vitamine C de moins de 11.4 µmol/L) qui peut amener des troubles plus ou moins caractérisés (commençant en général par un état de fatigue générale), de l'insuffisance [depletion] (concentrations plasmatiques de vitamine C de 11.4 à moins de 28.4 µmol/L). Dans la population concernée la déficience franche touchait 6% des personnes et 30% avaient des taux insuffisants. Enfin n'oublions pas qu'il s'agit d'une population en bonne santé générale, ce qui exclut beaucoup de personnes âgées, de malades, de population marginalisées dont le risque est certainement plus élevé.

A cet égard, l'article complet rappelle que beaucoup de maladies aïgues sont associées à des pourcentages élevés de carence en vitamine C chez les patients concernés du fait que la carence favorise la maladie et / ou qu'elle augmente les besoins en vitamine C de l'organisme.

On voit qu'on se retrouve bien dans la fourchette des 1/3 de la population en insuffisance que j'évoquais et ces données confirment l'importance du problème en terme de santé publique.

15 Avril 2008 : Les sites de Bernard Guennebaud

Les lecteurs fidèles de Gestion Santé se souviendront que j'ai hebergé plusieurs articles de Bernard Guennebaud sur la tuberculose au moment très important où l'abandon de l'obligation vaccinale était égulièrement envisagé et sans cesse repoussé - et finalement accepté par les pouvoirs publics.

Bernard Guennebaud a depuis pris son autonomie pour pouvoir écrire à son rythme sur les sujets qui l'intéressent à travers divers Blog : La vaccination BCG - La question des vaccins - Mon premier 7000 en vélo.

Lorsque je l'avais interviewé, il avait évoqué en fin d'interview son intérêt pour différentes médecines complémentaires.

Suite à un grave accident de vélo (fracture du col du fémur - chez un homme de 64 ans), ce grand passionné de vélo, s'est pris comme terrain d'étude pour une remise en forme efficace qui utilise la médecine académique, une hygiène de vie adapatée à son cas et certaines approches tirées des médecines complémentaires. C'est aussi l'occasion pour lui de revenir sur certaines étapes de son parcours de vie et de santé.

Le récit de son accident commence en décembre 2007 (pour se déplacer sur le bog utiliser le petit calendrier en haut à droite - cela permet de se déplacer de mois en mois et de cliquer sur les jours du mois qui sont surlignés). Tout cela fourmille d'infos santé à la fois académiques et alternatives, soigneusement mises en perspective et testées "in vivo", ce qui fait tout leur intérêt ! Il présente par exemple la La mil-thérapie que je ne connaissais pas avant d'avoir lu son billet et qui a l'air d'une méthode fort intéressante utilisant conjointement des champs magnétiques et des sources lumineuses et infra-rouge selon des protocoles adaptés aux différentes pathologies.

La page du 24 mars est particulièrement intéressante car il y présente l'homéopathie séquentielle de Elmiger et récapitule l'ensemble de son parcours santé et ce qu'il doit à la pratique sportive du vélo.

La page du 6 avril (qui cite certaines infos tirées de Gestion Santé) est consacrée à l'intérêt possible de l'arginine et d'autres acides aminés pour la cicatrisation et la fonte musculaire.

Les deux autres Blogs de l'auteur sont aussi une mine d'information de haute tenue scientifique sur le BCG pour l'un et les vaccinations en général pour l'autre. A noter le témoignage personnel de l'auteur (le 19 mars 2008 - sous-section Big Bang) sur la tuberculose dont il a été victime - déclenchée suite à un test tuberculinique en médecine scolaire.

14 Avril 2008 : Au choix : Selon le coeur des médias dominants "Les vitamines ne servent à rien et sont même dangereuse pour la santé" ou selon les revues scientifiques : "Importante chute du risque de plusieurs cancers de l'enfant chez les mères s'étant complémentées avant et pendant la grossesse"

Dans une de nos pages les plus populaires sur la vitamine B9 et la grossesse, nous évoquions, avec beaucoup de prudence compte tenu du peu d'études disponibles, les bénéfices éventuels de la supplémentation en vitamine B9 et d'autres vitamines sur le risque cancéreux des enfants des femmes complémentées. Il s'agit d'un problème d'importance car le cancer est la deuxième cause de décès chez les enfants dans la plupart des pays développés et que l'occurence est en augmentation constante et semble-t-il inexorable depuis des décennies.

Les effets de la seule complémentation en acide folique des farines au Canada qui avait amenés des chercheurs à faire un lien avec la baisse de certains cancers pédiatriques nous paraissait prématurés au vu des données disponibles (lire plus bas les infos les plus récentes sur cette question). Par contre nous avions trouvé une excellente étude de 2001 qui établissait un lien important entre supplémentation et baisse des leucémies lymphoblastique (diminution des 2/3).

C'est pourquoi nous nous attendions à voir sortir de nouvelles études sur la question permettant d'y voir plus clair. C'est ce qui s'est produit en 2007 avec un article dans Clinical Pharmacology & Therapeutics (analyse de docguide.com), qui est une confirmation de ces découvertes préliminaires (ma traduction) :

"L'étude a examiné les données de sept publications qui rencontraient les critères d'inclusion et nous avons découvert que la supplémentation prénatale avec des multivitamines contenant de l'acide folique est associée avec un effet protecteur de 47% pour les neuroblastomes [sur les neuroblastomes], 39% pour la leucémie et 27% d'effet protecteur pour les tumeurs cérébrales. Alors que d'autres études ont étudié l'effet des vitamines prénatales sur le taux des tumeurs pédiatriques , ceci est la première revue et méta-analyse de l'utilisation des multivitamines en prénatal avant et durant la grossesse et ses effets protecteurs sur plusieurs cancers pédiatriques."

Une autre page nous en apprend plus sur la prévalence de ces tumeurs "La leucémie, la forme la plus commune de cancer , est responsable de 25 à 35% des nouveaux cas de cancer pédiatriques chaque année. Les tumeurs du cerveau et de la colonne vertébrale, la deuxième cause la plus fréquente de cancer, est responsable de 17% des nouveaux cas de cancers pédiatriques annuels, et le neuroblastome, la tumeur solide la plus répandue qui se trouve en dehors du cerveau chez les enfants de moins de cinq ans, affecte un enfant sur 6000 à 7000 en Amérique du Nord."

Ajoutons qu'il n'est donc pas du tout certain que la vitamine B9 soit le seul responsable de la baisse des cancers pédiatriques. Les autres vitamines et minéraux des suppléments pouvant notamment intervenir comme cofacteur utiles de la vitamine B9. La vitamine B9 aurait toutefois un effet majeur probable en renforçant la structure de l'ADN.

Pour en revenir aux farines canadiennes complémentées en vitamine B9, il s'avère en fait que la relation avec le cancer était très probablement pertinente. G. Koren un des chercheurs ayant participé à la méta-analyse sur la supplémentation pendant la grossesse indiquait au Toronta Star que les "oncologistes de Sick Kids [un Hôpital pédiatrique canadien] estimaient que le nombre de neuroblastomes qu'ils découvraient avait commencé à diminuer significativement il y a à peu près cinq ans.
Cette maladie, un cancer dévastateur du système nerveux périphérique, affecte environ un enfant sur 6500 avant l'âge de cinq ans en Amérique du Nord.
"Les médecins cancérologues nous ont demandé dans le cadre du programme Motherisk program [Le programme d'expertise canadien sur la sécurité des traitements médicaux, sur les infections, les produits chimiques, les produits à usage personnel, et les expositions de la vie quotidienne, pendant la grossesse et la période d'allaitement] si nous pouvions envisager un mécanisme à l'origine de cette réduction", nous a expliqué Koren.
"Nous leur avons dit que le seul évènement intervenu qui pouvait correspondre à leur impression a été l'addition (à la demande expresse de Health Canada) d'acide folique à la farine au Canada en 1997 et 1998." "

C'est cette observation étonnante qui a amené une recherche complémentaire, la méta-analyse sur la supplémentation pendant la grossesse qui consolide les relations entre supplémentation vitaminiques pendant la grossesse et risque de cancer de l'enfant à partir d'études réalisées dans différents pays.

Voici donc un usage potentiel de ces vitamines qui ne servent à rien et sont même dangereuses pour la santé comme nous l'expliquent si souvent nos médias dominants français !

Ce type de données établissant un lien très fort entre alimentation et cancer est à mettre en rapport, outre les conceptions véhiculées par les médias dominants, avec les conceptions de l'establisment médical français, ainsi de l'Académie de médecine, dont un énorme rapport récent sur "Les causes du cancer en France" minimise, selon Le Nouvel Observateur les risques environnementaux : "Non seulement l'étude n'apporte aucune information nouvelle, mais elle minimise ou écarte complètement les observations récentes sur les risques environnementaux. Affirmant que ces risques ne sont pas démontrés scientifiquement, les académiciens ne prennent même pas en compte certains travaux des experts et des organismes qu'ils ont consultés, notamment le Centre international de Recherche sur le Cancer (Cire). Ce dernier a publié dans la période récente plusieurs communications qui soulignent l'importance de l'alimentation et attribuent aux facteurs nutritifs jusqu'à 30% des cancers. Et, selon une étude de Richard Doll et Julian Peto, épidémiologues britanniques de réputation mondiale, la nutrition serait à l'origine de 25% des morts par cancer. Le Cire a aussi annoncé, en juin 2005, que les faibles doses de radiations ionisantes provoquaient une légère augmentation du risque de cancer. L'Académie de Médecine balaie ces recherches d'un revers de main."

Au vu de la sous estimation en France du rôle de l'alimentation stricto sensu dans le cancer on imagine le dédain avec lequel peut être traité la supplémentation !

[Ce billet sera prochainement ajouté à notre page sur la vitamine B9 et la grossesse]

13 Avril 2008 : Histoire de la radiologie : La tragédie des enfants irradiés pour traiter la teigne

Petite histoire du traitement de la teigne par les rayons X

Le Figaro du 24/03/08 a publié un article fort intéressant de Jean-Michel Bader La tragédie des enfants irradiés pour traiter la teigne qui s'appuie sur une recherche d'un historien de la médecine Gérard Tilles qui a publié ses recherches dans La Presse médicale (La ref. de l'article non donnée par Bader est "L’histoire inachevée des enfants teigneux irradiés" - La Presse médicale - Vol 37 - N° 3-C2 - Mars 2008).

L'article fait référence aux travaux de radiothérapie initiés par le grand dermatologue Raymond Jacques Adrien Sabouraud à partir de 1904. Sabouraud avait défini des dosages de rayons X que l'on croyait à l'époque inoffensifs : "En 1910, Sabouraud, ayant traité 2000 enfants teigneux à l'école Lallier, pouvait affirmer n'avoir pu observer «dans aucun cas un trouble cérébral ni un retard intellectuel. L'action sur le cerveau du traitement des teignes par les rayons X est tout à fait nulle.»" Ce nouveau traitement permettait d'éradiquer facilement les cas de teignes qui affligeaient les enfants et amenaient de nombreux enfants à être hospitalisés en pédiatrie (fiche Doctissimo sur la teigne).

Bader rappelle le contexte socio-médical :

"Depuis 1850, un hôpital des teigneux à l'hôpital Saint-Louis à Paris accueille les enfants pour les soigner (et les éduquer à partir de 1886 dans l'école des teigneux de l'établissement, bâtiment Lallier). Il s'agissait aussi d'éviter l'absentéisme scolaire, le rejet voire la désocialisation de ces enfants. Mais il fallait alors entre six mois et deux ans de traitements pour guérir de ce parasite.

Dans ce contexte historique, la radiothérapie permet de traiter en quelques séances la maladie, de faire sortir 10 enfants par semaine de l'hôpital. Le coût du traitement, calculé par le Dr Sabouraud passe en moyenne de 2000 francs de l'époque à 0,50 franc. L'Assistance publique a ainsi pu fermer 150 lits à Saint-Louis et 350 lits en province, et économiser plus de 2,5 millions de francs. Les générateurs de rayons X seront utilisés sur les teigneux jusque dans les années 1950 en France "

L'avancée thérapeutique était majeure même s'il nous semble, vu de notre présent, que le rapport bénéfice - risque fut fort mal évalué et SURTOUT mal réévalué au fil du temps (de 1910 aux années 1950).

Dans les années 1950, on abandonne le traitement en France à la suite, semble-t-il de l'arrivée sur le marché du Griséofuline, un antifongique très efficace (à une date qui n'est pas clairement précisée par Bader mais qui aurait son importance pour comprendre les processus de décisions ayant abouti à l'abandon de cette pratique). C'est à peu près à cette époque que selon Bader sont publiés les premiers travaux signalant la survenue de cancers de la peau après radiothérapie de teigne en France. Et en bilan final et catastrophique on découvre que :

"En 1974, la première étude d'incidence des conséquences de l'irradiation chez ces enfants a montré un doublement des tumeurs malignes du cerveau, de la thyroïde. En 2005, des travaux sur la même cohorte ont montré que le risque de tumeurs cérébrales persiste plus de trente ans après le traitement, et celui du cancer de la thyroïde subsiste jusqu'à quarante ans après l'irradiation. Mais l'absence de registres, et la disparition des dossiers et archives hospitalières rendent impossible en France tout suivi à long terme des cohortes de ces dizaines de milliers d'enfants…"

Amnésie médicale et histoire de la découverte des dangers de la radiologie

Une des caractéristiques étonnantes de ces grandes catastrophes de santé publique, de ces drames humains épouvantables, c'est l'incroyable capacité du corps social à les effacer quasi complètement de la mémoire collective, avec il faut le reconnaître l'aide ni négligeable ni désintéressée du corps médical, de l'administration et des politiques. Je pense ne pas être le seul lecteur cultivé intéressé par les questions de santé publique à ne jamais avoir entendu parler de cette affaire (en ce qui me concerne j'avais entendu néanmoins parler d'une affaire similaire en Israël - nous y reviendrons - mais ignorais l'affaire française et la façon dont elle s'inscrivait dans l'histoire de la radiologie médicale).

La façon de traiter de ce genre d'affaire est complexe car il est facile de renvoyer dans le passé l'état actuel de nos connaissances sur la radiologie. C'est le phénomène de l'illusion rétrospective dont il est difficile de se défaire et dont on trouve diverses décinaisons chez de nombreux vulgarisateurs scientifiques traitant de l'histoire des sciences.

Ainsi, il convient de ne pas projeter notre connaissance actuelle de la toxicité des rayons X dans le passé et de définir précisément les connaissances de l'époque dans ce domaine (lesquelles ont bien sûr varié avec le temps). Or comme l'indique Bader dans son article "Trois ans seulement après la découverte des rayons X par Wilhelm Conrad Roentgen, le médecin français Toussaint Barthélémy et ses confrères Paul Oudin et Jean Darier publient une quarantaine d'observations de radiodermites survenues chez des électriciens et des patients." Les radiodermites sont des lésions cutanées induites par les radiations ionisantes ( article d'un site dermatologique sur les radiodermites). C'était un fléau à l'époque car le dosage et l'orientation des rayons étaient encore mal définis et les temps d'exposition très longs.

En France, c'est le docteur Toussaint Barthélémy qui étudia l'aspect médical des rayons X. Les docteurs Paul Oudin et Claude Bernard se joignirent à lui (brève histoire de la radiologie).

L'enthousiasme de la découverte et la compréhension rapide des applications possibles fit que le milieu médical ne prit pas sérieusement en compte les risques, même lorsqu'ils étaient connus... et ils l'ont été très tôt. Dans sa thèse de doctorat en médecine de 1972, Stéphane Balcerowiak a rappelé le climat d'innocence émerveillée (p. 95/165 et suivantes) qui a accompagné cette découverte et son utilisation dans les milieux mondains, dans l'illusionisme et d'innombrables autres domaines... sans aucune prise en compte des risques. Sur le développement de la radiologie médicale pour le diagnostic on se reportera aux pages 101/165 et suivantes de cette thèse. Une brève histoire de l'instauration du monopole médical sur la radiologie humaine (obtenue par un vote à à la Chambre et au Sénat en 1934) est également présentée (p. 105-106/165). Un des trop rares moments où le corps médical évoque le danger possible des rayons X pour s'en réserver l'exclusive !

La façon dont Stéphane Balcerowiak évoque les dangers de la radiologie respecte de façon probablement inconsciente les canons littéraires de la littérature médicale, que l'on retrouve sous des déclinaisons très similaires dans d'innombrables documents de médecins et de journalistes vulgarisateurs, où les seuls martyrs identifiés de la radiologie sont les illustres médecins et chercheurs : "On compte, chez les grands précurseurs de la radiothérapie, les martyrs les plus tristement célèbres de cette période d’utilisation empirique des rayons X (c’est-à-dire de 1896 à 1920) ; parmi eux, l’allemand Heinrich Ernst Albers-schönberg (1865 – 1921), pionner de la radiothérapie des cancers profonds, et le français Jean Allan Bergonié (1857–1925), découvreur de la radiosensibilité des cellules cancéreuses, mourront des effets redoutables d’une thérapeutique qu’ils ont contribué à créer." (p.116/165)

Les autres victimes, opérateurs et "malheureux patients" sont évacuées en de courtes phrases, le plus souvent au détour d'exposés consacrés à l'amélioration du procédé radiologique.

Le danger de la radiothérapie pour les populations traitées n'est jamais évoqué frontalement dans un bilan structuré quantitatif et qualitatif des victimes connues à l'époque et plus tardivement. En 1972, date de l'écriture de cette thèse, de nombreuses données intéressantes devaient pourtant être disponibles, tant en France qu'à l'étranger, permettant de se faire une idée du bilan humain des effets iatrogènes de la radiologie sur la période la plus sensible de 1900 à 1950. Mais ce sujet n'intéresse pas l'auteur.

Pour compléter mon propos je conseille au lecteur de lire une page bien faite du site infonucléaire réalisée à partir de la thèse de Stéphane Balcerowiak et d'autres sources complémentaires et accompagnée d'excellentes illustrations d'époque. Le site s'intéresse aussi un peu plus au sort des victimes...

Des dangers identifiés et compris très tôt - Aspects juridiques comparés

On trouve néanmoins un passage intéressant, dans une section intitulée "Perspectives thérapeutiques : entre raison et utopie" (p. 110/127), lorsque l'auteur évoque les questions légales, à propose de l'utilisation comparée, au début du XXe siècle, des rayons X en France par rapport aux pays étrangers, notamment germaniques, passage qui mérite d'être cité in extenso :

"En France, le Dr Oudin constate, en 1901, que ce courant de recherches [sur des dermatoses de nature très variées] constitue l’apanage presque exclusif de l’école allemande ou viennoise :
« C’est à l’étranger qu’il nous faut aller chercher nos renseignements pour la radiothérapie des maladies cutanées ; la France n’a contribué en rien à la progression de cette méthode. » (6)
Si l’expérience française dans ce domaine reste discrète et se limite aux travaux de Sabouraud et de quelques précurseurs, c’est surtout à cause des risques juridiques encourus par les médecins qui expérimentent les rayons X dans le domaine du diagnostic médical :
« Ce retard tient probablement, en grande partie, à la jurisprudence spéciale existant chez nous, qui assimile le médecin à un industriel, les accidents que peut causer son intervention à des accidents de travail, et qui a frappé rudement des opérateurs ayant eu à regretter des radiodermites, plus fréquentes à l’étranger que chez nous, et qu’il était presque impossible d’éviter, il y a quelques mois encore [1901], alors qu’on ignorait complètement les causes vraies de ces accidents. » (6)
Entre 1896 et 1901, la Gazette des Tribunaux relate de nombreuses condamnations de médecins auteurs de radiodermites graves chez leurs malheureux patients. Par crainte d’une sanction juridique pénale imminente, le corps médical français hésite à se lancer dans l’aventure radiothérapeutique. Pour beaucoup, il manque avant tout des connaissances techniques suffisantes sur les rayons X (dont leur nature électromagnétique n’est encore que supposée) : cette sagesse transparaît dans les propos du Dr Oudin :
« Tant qu’on ne sera pas certain des agents de la radiodermite, tant qu’on ne saura pas avec précision l’éviter ou la produire, il sera imprudent de faire de la radiothérapie, parce que les accidents n’éclatent que longtemps après l’action novice, alors qu’ils sont irréparables. » (6) [note 6 : BELOT J. Traité de Radiothérapie Paris : G. Steinheil, 1905]

Ainsi dès le tout début du siècle (et même avant) la nature précise des dangers de la radiothérapie médicale sont parfaitement identifiés par un de ses principaux créateurs, Oudin, et sont trés clairement exposés dans un ouvrage médical spécialisé publié en 1905 par Belot. Dans le même ouvrage l'action différenciée des rayons X sur les tissus selon leur nature est clairement exposée : "Bergonié et Tribondeau énoncent, en 1904, une loi caractérisant l’action destructrice des rayons X sur les tissus : « la radiosensibilité est d’autant plus fort que les cellules irradiées sont plus jeunes, peu différenciées et en voie de multiplication, de prolifération ou de reproduction »." (p. 112/165)

Néanmoins, un des points les plus importants à ne pas être encore bien compris à l'époque c'est la capacité des rayons X à induire le cancer. Il y aurait sur ce point aussi une histoire de la médecine à reconstruire car on ne nous fera pas croire que la capacité des rayons X a induire le cancer ait été connue seulement au début des années 50 et ait correspondu comme par miracle à l'arrivée des antifongiques sur le marché. Ainsi dès l'origine de la radiologie il avait été observé que les radiodermites pouvaient s'accompagner d'une cancérisation des tissus atteints (lire par ex. cette page sur l'histoire de la radiologie). Il est probable que l'on a du observer très tôt tout un continuum de manifestations entre les radiodermites et la survenue plus ou moins rapprochées de cancers. L'expérimentation animale qui a du être pratiquée très tôt en radiologie avait peut-être aussi ramené des données intéressantes. La clinique des effets iatrogène imputables à la radiologie a également du ramener une riche moisson de cas montrant la relation entre canncer et rayons X. La aussi un exposé historique structuré de l'évolution des connaissances serait précieux.

Si la population française a été relativement protégée au tout début du XXe siècle de certaines expérimentations tous azimuts, c'est à cause de la législation française qui à l'époque protège dans une certaine mesure les patients des dangers que peuvent leur faire courir les médecins.

Il est probable que cette législation, relativement avancée pour l'époque, évoquée dans un ouvrage de 1905, a du évoluer dans le temps et certainement pas de façon favorable aux patients français, les médecins toujours bien implantés dans les assemblées parlementaires n'ayant jamais eu de cesse d'étendre le pouvoir médical (par exemple avec l'exercice réservé s'étendant à tous les domaines de la santé de façon démesurément étendue) et de diminuer dans le même temps leurs responsabilités en tant que praticiens à l'égard des patients et de la société. L'évolution de la responsabilité légale des médecins par rapport à la radiologie (ou à d'autres pratiques) mériterait en tout cas un examen historique approfondi. On peut supposer, au vu de la situation actuelle, que la corporation médicale a très tôt du se retrancher derrrière des normes de sécurité dites de "santé publique", d'origine étatique, en réalité largement inadaptées et insuffisantes, pour organiser son irresponsabilité juridique à l'égard des patients.

Les effets iatrogènes de la médecine ne sont pas sérieusement pris en compte - Un problème qui se renouvelle potentiellement avec chaque innovation médicale

L'histoire de la médecine, en ce qui concerne la protection des patients, a un aspect terriblement illusoire et cette l'histoire convenue considère que l'on va de façon relativement linéaire de pratiques médico-sociales archaïques en matière de prise en compte des effets iatrogènes et de protection des patients vers des pratiques plus éclairées. La prise en compte des dangers liés à l'exercice de la médecine ne seraient par ailleurs qu'une préoccupation sociale récente. C'est une façon de présenter les choses qui permet de s'exonérer commodément de beaucoup de scandales de santé publique. Or la situation juridique qui prévalait au début du XXe siècle en France montre au contraire une loi (dont l'origine mériterait d'être précisée) qui responsabilisait et encadrait fortement le corps médical au bénéfice de la sécurité du patient. On voit sur cet exemple que le progrès dans ce domaine n'a pour le moins rien de linéaire et peut laisser s'intercaler de nombreuses régressions !

Par ailleurs cette loi du début du XXe siècle démontre qu'une déontologie médicale sérieuse n'a pas le plus souvent le corps médical en tant qu'institution et qu'elle lui est généralement imposé (nous ne sous estimons pas le rôle individuel de médecins éclairés). La situation comparée que fait Belot dans son traité de 1905 entre les abus étrangers et la prudence des praticiens français ne tient pas d'une part à la vertu française et d'autre part à la cruauté et à l'indifférence des médecins allemands. Elle provient de ce que la société à l'époque contrôle et encadre plus fortement le corps médical en France qu'en Allemagne.

Evidemment dans une société raisonnable, pronant de véritables idéaux de solidarité, le contrôle du corps médical s'effectuerait de façon beaucoup plus profonde et celui-ci, qui serait dans une relation beaucoup plus solidaire avec le reste de la société, devrait être engagé dans un dialogue approfondi avec la société quand à ses buts, ses méthodes et ses moyens. Par rapport à notre propos, la prise en compte des effets iatrogènes de la médecine ne serait pas l'éternel wagon de queue des avancées de la médecine parce qu'il serait pris en compte en amont dans une évaluation soigneuse du rapport bénéfice - risque des nouvelles pratiques médicales à toutes les étapes de leur développement.

Force est de constater que cette évaluation est aujourd'hui encore très insuffisante. Nous avons par exemple analysé dans un autre document cette situation en détail à propos des médicaments, mais cette situation prévaut dans tous les domaines de la santé publique et de l'innovation médicale (Les obstacles à une évaluation comparative des médicaments avant AMM - Les obstacles à une évaluation comparative des médicaments après AMM - Les entraves à une pharmacovigilance indépendante, fiable et protectrice de la santé publique)

Le traitement de la teigne en Israël

Il y a de celà deux ans, je crois, je suis tombé par hasard sur un article de Barry Chamish sur les effrayantes conséquences au début des années 50 du traitement des enfants sépharades supposés teigneux récemment immigrés en Israël (en anglais - traduction en français). Chamish exposait cet affaire à la suite d'un film documentaire de 2003, prix du meilleur documentaire au Festival International de Cinéma de Haïfa est passé à la TV israélienne en 2004 ; "The Ringworm Children" traduit en hébreux "100,000 Rays" (L'apocalypse des teigneux en français) de David Belhassen et Asher Hemias relate le drame de ces enfants sépharades.

Barry Chamish a une réputation équivoque d'écrivain conspirationiste violemment antisioniste et je n'ai malheureusement pas vu le film... ni trouvé à l'époque d'auteurs plus "recommandables" ayant traité ce dossier que je m'étais contenté de garder en mémoire.

Par rapport à tout ce que nous venons d'exposer, on ne comprend pas vraiment, en lisant Chamish, que le traitement contre la teigne était un traitement courant aux USA et en France jusqu'en 1950 en France et même au-delà aux USA sur certaines populations (lire page précitée de infonucléaire, à la fin du document). Néanmoins on a l'impression que d'énormes fractions de la population d'enfants sépharades (bien au delà de la population des teigneux proprement dite) ont été traités "préventivement" (?!!) avec des dosages de rayons X peut-être plus élevés que ceux des "bonnes pratiques" de l'époque (points à vérifier mais que le synopsis du film semble confirmer). Il semble en effet y avoir eu beaucoup d'effets secondaires immédiats de ces expositions et non pas différées de plusieurs années comme en France.

J'ai récemment revérifié les sources disponibles sur de cette affaire par une recherche Internet et trouvé une page récente de 2007 sur Wikipedia, très prudente, voire trompeuse. En effet, le nombre d'enfants évoqué dans l'article est de 20 000 enfants sur une période de 1948 à 1960. Malheureusement l'unique article de santé publique spécifiquement consacré à cette affaire donné en référence fait état de 100 000 enfants irradiés dans son résumé ! Celui-ci est de Nadav Davidovich, un historien israélien spécialiste de santé publique dont le CV semble celui d'un chercheur solide et qui dépendant d'une université israélienne et ayant exploré de nombreux domaine de l'histoire de la santé publique d'Israël doit disposer de données particulièrement fiables. Cette altération massive des données factuelles n'est pas de nature à améliorer la réputation de Wikipedia (l'historique de l'article montre pourtant de nombreuses modifications) !

Selon l'abstract de l'article de N. Davidovich (ma traduction), "Entre 1949-1960 approximativement 100,000 immigrants en Israël, nombre d'entre eux provenant de pays d'Afrique du Nord, furent irradiés contre la teigne du cuir chevelu. Cette pratique médicale était une pratique médicale courante à l'époque. Toutefois, l'échelle et l'étendue de ce programme de santé publique de masse met le cas israélien dans une situation unique à l'échelle mondiale. L'Etat israélien nouvellement établi consacra des efforts énormes dans l'absorbtion de centaines de milliers d'immigrants et le domaine de la santé publique était une part cruciale de celui-ci.
Selon la version officielle, ce fut une histoire à succès : la teigne et les taux d'autres maladies infectieuses déclinèrent de façon relativement rapide. Mais les conséquences furent sévères. Plusieurs décennies après le traitement aux rayons X, les immigrants irradiés développèrent des complications allant d'affreuses cicatrices à des complications potentiellement mortelles telles que les méningiomes [méningiomes], des cancers de la thyroïde et d'autres affections. En 1994 l'Etat israélien promulga une loi de dédommagement qui établit un appareil bureaucratique de comités chargés d'évaluer les dommages et les demandes de réparations.
Dans cet article nous analysons les différentes versions des récits des traumatismes et des procédures de soins en rapport avec l'affaire de la teigne. Alors que les discours médicaux et légaux ont tenté de raconter les évènements traumatiques et d'y remédier, ces récits sont contestés par celle des survivants. L'Etat, en utilisant ces discours médicaux et légaux a tenté d'individualiser la réponse aux évènements, ignorant pour l'essentiel la construction collective du traumatisme, en particulier ses éléments ethniques. D'un autre côté, les survivants, surtout originaire d'Afrique du Nord, se sont appropriés l'histoire du traumatisme, excluant d'autres groupes d'irradiés, tels que les survivants de l'holocoste et les israélo-arabes qui ont également été irradiés pendant cette période."

Par ailleurs un article du BMJ 1995;310:350-351 nous donne des précisions intéressantes sur l'indemnisation des populations concernées et sur les modalités et les dates de traitement des populations en Israël (jusqu'en décembre 1960 !). C'est le très grand nombre des enfants traités et l'arrêt tardif de ce type de traitement, nettement décalé dans le temps par rapport aux autres pays développés, qui explique que le gouvernement israélien ait consenti à une indemnisation.

J'essaierai de faire une mise à jour de ce billet si j'arrive à obtenir des informations plus détaillées, mais je ne souhaite pas me lancer dans des spéculations hasardeuses sur cette affaire en l'état des données dont je dispose...

Conclusion

Le cas israélien constitue une clôture en forme apocalyptique de l'affaire de la teigne et des effets iatrogènes des rayons X en général. Tout cela rend encore plus stupéfiante l'amnésie quasi totale qui entoure les drames de la radiologie dans tous les pays et qui ne se lèvent péniblement et très partiellement que dans les toutes dernières années.

On atteint avec cette affaire un singulier niveau dans l'horreur, que les lobbies médicaux, administratifs et politiques responsables de ces faits et qui portent une très lourde responsabilité dans leur survenue se sont efforcés d'effacer de la mémoire collective. La responsabilité porte en particulier sur les traitements poursuivis à la fin des années 40 et en pleines années 50 où le risque cancéreux de la radiologie est bien mieux connu. Ces évènements mettent trop crûment en évidence la dangerosité potentielle de certaines procédures de santé publique de masse que l'on souhaite pouvoir imposer aux populations sans avoir à négocier leur consentement ni devoir procéder à des évaluations sérieuses, en amont, pendant les traitements de masse et en aval de ceux-ci.

Une société réellement humaine mettrait la santé des populations au coeur de ses préoccupations, au bénéfice de cette population et sous le contrôle de celle-ci, via des mécanismes d'évaluation et d'autorégulation démocratiques. Les sociétés hiérarchisées et autoritaires comme celles où nous vivons proposent une caricature de cela, on gère via des experts et des administrateurs la santé des populations humaines comme celle d'un poulailler dont on voudrait maximiser la rentabilité et on aboutit à ce type de catastrophes qui sont finalement un risque tout à fait calculé et acceptable par rapport à l'idéologie de telles sociétés où la valeur de la vie humaine est secondaire par rapport à ce qu'elles considèrent comme l'exercice efficace et rationnel du pouvoir se déployant du haut vers le bas.

Cette amnésie sociale organisée, organiquement liée au pouvoir tel qu'il s'exerce dans nos sociétés, n'est pas seulement inhumaine, elle condamne des êtres humains à une mort prématurée. Rappellons la citation de Bader donnée au début : "En 1974, la première étude d'incidence des conséquences de l'irradiation chez ces enfants a montré un doublement des tumeurs malignes du cerveau, de la thyroïde". Il eut fallu à cette époque protéger et réunir les dossiers de populations traitées, lancer un appel général à la population pour retrouver les "perdus de vue" et mettre ensuite en place un suivi médical et social adapté des populations concernées. Mais c'eut été déclencher un gigantesque scandale de santé publique et décridibiliser durablement toutes les actions de santé publique imposées à la population et prétendant à une totale inocuité, on pense notamment à la vaccination ! L'abstention délibérée des pouvoirs publics dans cette affaire est d'une gravité extraordinaire.

De telles scandales touchant à la santé publique ne sont probablement pas gérables dans le cadre d'une société dotée d'une structure de pouvoir pyramidal dans laquelle la santé des populations est une variable extériorisée, c'est-à-dire que la population est quelque chose que l'on contrôle et dirige comme de l'extérieur (d'où mon image du poulailler). Ce rapport à la société suppose une déresponsabilisation individuelle et collective à l'égard de la santé. Sur le plan individuel, la personne intéressée à prendre en charge sa santé rencontre de grandes difficultés à le faire et cela aura un coût finacier important pour elle, et les processus collectifs le lui rendront également la tâche très difficile (alimentation dénaturée, pollution, vie stressante, destruction des thérapeutiques et pratiques de santé naturelles par l'Etat, etc. ). Sur le plan collectif un processus similaire sera mis en oeuvre visant à rendre les populations passives et dépendantes de façon à ce que les personnes ne tendent pas à questionner la médecine qu'on leur propose ni à se responsabiliser par rapport à leur santé (même si un discours paradoxal prétendra la contraire lorqu'il s'agira de couper dans des dépenses devenues insupportables du fait de l'inefficacité de la médecine ainsi proposée).

De ce point de vue l'individualisme sensé être promu dans nos sociétés est largement en trompe l'oeil, la personne étant amenée à confondre individualisme avec égotisme et compétitivité et à réaliser un effort paradoxal où elle doit s'autonomiser dans le cadre de la servitude qu'on lui impose, d'où les tensions psychologiques extrêmes qui nous sont souvent imposés dans la société actuelle et qui contribuent d'ailleurs également à miner notre santé.

La gestion par l'amnésie permet d'interposer, pour certains problèmes de santé publique majeurs, des durées qui peuvent atteindre des décennies entre les faits et leur évocation publique. Le fait de différer dans le temps leur examen permet évidemment d'amortir énormément la charge émotionnelle associée - et donne le temps de mettre largement hors jeux les victimes - et de prétendre que l'on était alors à une autre époque de la médecine qu'aujourd'hui. En réalité ce procédé d'amnésie est, au contraire, l'assurance que l'on se situe dans un processus de répétition où l'on offre à nouveau un espace d'expression aux dernières folies médicales du jour, dont nos enfants seront peut-être prudemment informés dans quelques décennies.

2 Avril 2008 : Du nouveau sur l'EPO (érythropoïétine ) en cancérologie : à éviter dans la plupart des cas !

L'actualité apporte une nouvelle confirmation de la pertinence de Gestion Santé et sa capacité à anticiper l'actualité médicale.

En effet la dernière Newsletter du site du Dr Rath nous a fait découvrir un article sur l'EPO en cancérologie tiré du New York Times du 14/03/08. Selon cet article un panel d'expert qui conseille la FDA (l'agence qui contrôle les médicaments aux USA) recommande des restrictions drastiques dans l'utilisation de ce produit pour les anémies d'origine cancéreuse.

Or nous avons déjà traité de cette question à l'occasion de notre critique du livre (chercher EPO dans la page) "Comment sauver (vraiment) la Sécu - Et si les usagers s'en mêlaient ? L'exemple des médicaments" (2004) de Philippe Pignarre. Dans son ouvrage l'auteur consacrait un petit encart à la question, qu'il considérait au moment où il écrivait, sur la base des études disponibles (notamment une étude très démonstrative de 2003), comme une coûteuse (entre 500 et 1000$ l'injection aux USA !) et inutile et même néfaste méthode de prise en charge des anémies cancéreuses. Stimulé par l'encart de Philippe Pignarre nous avions creusé la question et complété les informations données par l'auteur.

Nous reproduisons ci-dessous ce passage écrit en 2004 (la partie en italique du texte constitue notre apport personnel sur la question)

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Philippe Pignarre donne aussi, en encart (p. 68), l'exemple de l'EPO (Erythropoïtéine) qui, surtout connue du grand public comme produit dopant des cyclistes, est un traitement hors de prix pour les anémies cancéreuses depuis 1989. Malheureusement selon une étude de 2003, l''EPO abrège significativement (61% de mortalité versus 52%) la durée de vie des malades par rapport à un placebo ! L'EPO est pourtant toujours sur le marché et reste un des médicaments les plus coûteux et les plus prescrits, l'anémie cancéreuse étant une pathologie très fréquente accompagnant le cancer.

L'EPO est l'exemple typique d'une médecine du symptôme (diminuer l'anémie) sans vérification de l'impact sur la mortalité, alors que le cancer est une maladie où la mortalité à court terme, malheureusement très élevée, est un facteur clé facile à évaluer par des études ad hoc. Ceci est d'autant plus inacceptable que de nombreuses approches nutritionnelles et par la complémentation permettent de lutter efficacement contre l'anémie. Il faut quand même rappeler que, "Tous cancers confondus, on estime que 10 à 40 % des patients cancéreux sont dénutris en ambulatoire, et 30 à 60 % d'entre eux, lorqu'ils sont hospitalisés. Cette dénutrition a un impact sur l'évolution de la maladie, en augmentant les complications et le taux de mortalité. Les causes sont multiples : diminution des apports du fait d'une difficulté à s'alimenter (cancers digestifs, gorge...) d'une anorexie et de l'asthénie ; augmentation des besoins à cause des perturbations métaboliques liées à la tumeur elle-même. Traiter la dénutrition est donc primordial pour raccourcir les temps d'hospitalisation, pour prolonger la survie, pour améliorer la qualité de vie [Le Quotidien du Médecin du 02/12/2004 ]."

Malheureusement en France, nous sommes loin d'une prise en charge nutritionnelle personnalisée des patients via des conseils diététiques précis et évidemment encore moins via des supplémentations orales. Celles-ci sont pourtant disponibles dans des produits très concentrées en nutriments, hypercaloriques, souvent liquides, très riches en protéines et en bonnes graisses, très digestes, dont certaines déclinaisons sont par exemple utilisées pour les personnes âgées dénutries ou pour certains troubles de l'alimentation de type anorexique (6) . Cette approche est indispensable en substitut ou en complément d'une alimentation équilibrée dès que la dénutrition s'est installée si l'on veut espérer éviter l'installation de carrences durables en nutriments. Pour autant que nous le sachions la prise en charge nutritionnelle sérieuse incluant la mise à disposition de ce type de suppléments oraux ne concerne qu'une infime proportion de patients cancéreux en France. Mais en France, il suffit apparemment d'avoir un diététicien dans un hôpital, donnant des conseils express à quelques malades sans pouvoir leur donner ou prescrire de produits ad hoc, pour pouvoir dire que les patients font l'objet d'une prise en charge nutritionnelle, la nourriture fut-elle par ailleurs exécrable comme c'est le cas dans la plupart des hôpitaux publics français (c'est sans doute bien le seul poste de dépense à l'hôpital où les économies sont drastiques !). C'est dans cet incroyable climat d'abandon nutritionnel des patients que l'on initie des injections d'EPO hors de prix (500 à 1000$ aux USA pour chacune des nombreuses injections nécessaires au traitement, j'ignore les prix français), celles-ci étant pourtant d'une efficacité hypothétique. C'est un exemple malheureusement typique de la médecine moderne, qui renonce aux soins de base fondamentaux et prioritaires, pour une médecine de luxe instrumentalisée par l'industrie pharmaceutique et la loi du profit.

De façon tout aussi typique on constate que l'arrivée d'études objectives évaluant l'efficacité réelle du traitement par l'EPO n'aboutissent à aucune remise en cause des traitements sauf chez quelques praticiens bien informés et particulièrement scrupuleux. Soucieux de vérifier les sources de Philippe Pignarre et curieux d'en savoir plus, nous avons retrouvé sur Internet l'article du New York Times de Denise Grady (seule source citée par Philippe Pignarre) qui résume et commente en fait une étude du Dr. Michael Henke sur l'EPO publiée dans le Lancet (le Lancet en ligne étant payant, je n'ai pas pu consulter le texte complet de l'étude ni l'abondante correspondance au Lancet que semble avoir suscité l'article). Le protocole ne concerne que certains cancers traités par radiothérapie et 350 personnes au total, mais les résultats sont très inquiétants, puisque l'on constate une augmentation peu importante mais significative de la mortalité, alors que la normalisation des paramètres sanguin et l'effet positif sur le tonus aurait fait espérer une chute très significative de la mortalité globale . Par ailleurs l'évolution cancéreuse n'est pas améliorée, bien au contraire, alors que l'une des justifications théoriques du traitement à l'EPO est d'augmenter l'oxygénation cellulaire via l'augmentation du nombre de globules rouges, et ainsi d'améliorer la sensibilité des cellules cancéreuses à la radiothérapie ou à la chimiothérapie. Un autre article de synthèse sur l'EPO évoque une autre étude, publiée aussi en 2003, très négative sur l'EPO. L'étude BEST menée contre placebo, sur des patients non anémiques cette fois, a du être interrompue prématurément à cause de ses effets sur la mortalité. Par ailleurs des recherches sur différents types de tumeurs étudiées in vitro montrent que l'EPO fournit des facteurs de croissance aux cellules cancéreuses et aide à la néovascularisation des tumeurs (voir aussi cet article ) ! En tout cas selon le Dr Michael Henke, qui est un éminent oncologue de l'université allemande de Freiburg, "j'aurai maintenant des scrupules à donner de l'EPO à des patients sous traitement sur la base de ces études et d'autres essais non publiés [ source ]".

Toutes ces données plaident donc pour une très grande prudence et pour une abstention thérapeutique dans la plupart des cas, dans l'attente d'études complémentaires. Ceci d'autant plus que les alternatives thérapeutiques par une approche nutritionnelle "énergique", telle que nous l'avons présentée dans ce qui précède, sont disponibles et ne sont pour l'instant quasiment pas mise en oeuvre par le milieu médical (sauf sur le mode de l'invocation), qu'elles ne présentent pas d'effets secondaires, et qu'elles sont infiniment plus économiques ! Mais il faut toutefois aussitôt préciser que dans la médecine dite "moderne", le choix des options thérapeutiques est extraordinairement réduit et verrouillé par des présupposés idéologiques et les pressions commerciales de l'industrie pharmaceutique et que le "choix" alternatif à l'EPO, pour la majorité des oncologues, ce n'est pas la nutrition et les compléments alimentaires, c'est la transfusion sanguine, qui présente encore plus de contre-indications que l'EPO !

La non réaction générale des médias et des experts qui a suivi la publication de cette étude est particulièrement édifiante, dans un contexte où l'on s'attendrait a minima à une mobilisation générale des sociétés de cancérologie appelant les pouvoirs publics à mener d'urgence des études complémentaires sur l'EPO. Or, c'est tout le contraire. Ainsi, le communiqué de presse sur les nouvelles lignes directrices de l'OERTC (Organisation européenne pour la recherche et le traitement du cancer) publiées dans l'édition d'octobre 2004 de l'European Journal of Cancer, préconise toujours sans véritable mise en garde l'utilisation de l'EPO. Elle évoque bien le traitement de l'anémie par "la correction des autres causes de l'anémie (comme une carence en fer, l'hémorragie, une alimentation déficiente ou l'hémolyse)" avant d'entamer un traitement par EPO. Ces généralités prudentes sont louables, sauf que le suivi diététique des cancéreux est en France proche du néant ! On notera que selon l'OERTC, il faut éviter une alimentation "déficiente" ce qui sous entend qu'une alimentation "normale" ou "habituelle" est sensée être suffisante ! On est donc très loin de la compensation nutritionnelle de l'anémie évoquée ci-dessus dans un contexte où les besoins du métabolisme de base sont significativement augmentés par la maladie et où le malade manque très souvent d'appétit. Surtout les experts encouragent toujours à l'utilisation de l'EPO, et aucune allusion n'est faite aux études préoccupantes BEST ou à celle du Dr. Michael Henke pourtant publiée dans le prestigieux Lancet en octobre 2003. Les auteurs de ces lignes directrices de l'OERTC n'hésitent pourtant pas à affirmer sur un ton péremptoire que, "Ces nouvelles directives [sont] fondées sur les preuves" ! Faut-il comprendre que pour l'OERTC l'étude BEST (Cf. supra) n'a pas a être évoquée puisque les chercheurs ont pris la précaution de réserver l'indication de l'EPO aux sujets anémiques et que les patients ne seraient donc pas concernés par les résultats d'une étude menée sur des patients non encore anémiques ? Le résumé proprement dit de l'étude de l'OERTC indique quand à lui que "les données sont insuffisantes pour déterminer l'effet sur la survie suivant le traitement avec les protéines erythropoiétiques [EPO] utilisées en conjonction avec la chimiothérapie ou la radiothérapie (ma traduction et mon souligné)". On m'excusera de ne pas avoir payé les 15$ nécessaires pour consulter le corps du texte et les notes de ce chef d'oeuvre de la nouvelle médecine par les preuves, ce qui fait que j'ignore si le travail du Dr. Henke (sur les patients en radiothérapie ), l'étude BEST où les recherches sur l'effet potentiellement carcinopromoteur de l'EPO sont cités dans la biographie détaillée ou commentés dans le corps de l'article...

On se demande s'il ne s'agit pas tout simplement à travers ces recommandations de s'assurer d'un consensus de notables cancérologues pour étouffer un ensemble de recherches dérangeantes dont une partie a eu le malheur de sortir dans un média grand public. Pour compléter notre tour d'horizon du sujet, nous avons consulté le site de la ligue contre le cancer qui évoque l'utilisation de l'EPO sans l'assortir de la moindre mise en garde. Aucun article en français sur Internet ne répond d'ailleurs dans Google à une recherche sur "Michael Henke", ceux-ci étant tous en allemand ou en anglais. Un sondage dans la recherche du Quotidien du médecin avec "érythropoïétine" remonte un article du 23-Sep-2004 sur l'asthénie du cancéreux où un oncologue de l'hôpital Cochin, conseille, sans le moindre bémol, l'érythropoïétine comme un traitement efficace... Est-il besoin d'épiloguer ?

(6) Nous n'évoquerons même pas ici les compléments alimentaires proprement dits ou certaines approches alternatives permettant une oxygénation efficace et sans danger de l'organisme (comme le bol d'air Jacquier). Ceci afin de mettre en évidence les lacunes de la prise en charge des patients même si l'on se borne à envisager la question dans le cadre de référence de la médecine la plus académique.

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Et bien finalement la médecine a poursuivi son avancée en trainant les pieds comme chaque fois qu'il s'agit de mettre en cause de scandaleuses rentes financières. Apparemment les multinationales l'ont échappé belle, puisque l'on n'excluait pas, au vu des études très négatives qui se sont accumulées sur l'EPO depuis celles dont j'ai rendu compte, que la recommandation soit purement et simplement de ne plus utiliser du tout le produit pour les patients cancéreux ! La perte aurait de 1 milliard de $ pour chacune des deux firmes qui commercialisent de l'EPO sous la marque Aranesp fabriqué par Amgen et Procrit by Johnson & Johnson. Les recommandation sont néanmoins très restrictives puisque les experts, selon l'article du NYT "recommandent que le médicament ne soit pas utilisé par les patients traité dans l'intention de soigner leur cancer. La définition de cette catégorie est vague, mais elle se réfère généralement à des cancers débutants qui suivent une chimiothérapie après une ablation chirurgicale de la tumeur, où les médecins espèrent que le cancer a été éliminé."

La présentation du NYT semble déjà relativement tendancieuse puisque cet autre article plus fouillé évoque une autorisation à réserver aux cancers incurables seulement ! Par ailleurs les deux articles indiquent que le produit ne devrait plus être utilisé pour les cancers métastatiques du sein et ceux de la tête et du cou car les dangers de l'EPO sont mieux documentés dans ces cas.

Prise au pied de la lettre cette expertise devrait limiter drastiquement l'utilisation de l'EPO à un usage compassionnel dans des cas de cancer très graves où les chances de survie sont faibles et où l'anémie hypothèque la survie à court terme. Le problème c'est que la FDA risque d'édulcorer les préconnisations du panel d'expert et que le panel s'est par ailleurs fortement opposé à un programme de distribution contrôlé. Or celui-ci aurait probablement été le seul à même, en fixant des indicateurs de prescription stricts et précis, de limiter efficacement la prescription du produit par les cancérologues.

Dans ces conditions on risque de se retrouver dans la situation d'innombrables autres médicaments mal prescrits par le corps médical au vu des études comparatives disponibles mais qui continuent à être massivement prescrits du fait du laxisme des autorités de régulation et de la pression commerciale et psychologique exercée sur le corps médical et sur les patients. C'est bien pourquoi aussi les actions des deux sociétés n'ont guère baissé malgré les recommandations en apparence très sévère du panel.

Bien entendu on va continuer à dissimuler aux patients l'existence d'alternatives nutritionnelles pour gérer le risque d'anémie. Il est vrai que s'intérersser à la nutrition s'est rentrer dans la complexité des situations individuelles, s'intéresser à la psychologie du malade, à sa situation sociale, à ses habitudes, etc. et mettre en place des protocoles individualisés à faire évoluer dans le temps. Toutes choses dont la médecine moderne tend à se détourner et à se désintéresser pour lui préférer une approche ménaniste qui se prétend scientifique mais qui résulte en réalité d'une négation profonde d'une anthropologie médicale digne de ce nom qui devrait s'appuyer sur une prise en compte de l'homme dans la réalité et la complexité de son inscription sociale.

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Créé le 01/04/08. Dernière modification le16/04/08.